Retours d'expériences

Dassault Aviation personnalise les jets privés de ses clients

Par La rédaction, publié le 24 juin 2013

Posséder son jet, c’est bien. Le décorer à son goût pour en faire un avion unique, c’est encore mieux ! L’avionneur français répond aux exigences de sa riche clientèle grâce à un logiciel de réalité virtuelle qui simule tous les aménagements possibles.

Francis Ford Coppola aime le style art déco. Et c’est tout naturellement que le réalisateur a voulu retrouver dans son Falcon 7X l’atmosphère si particulière de ses bureaux de San Francisco. Il n’existe aucune autre cabine comparable à celle de son jet : elle est directement inspirée des salons du dirigeable Hindenburg.

Le fondateur de la marque de mode Diesel, lui, a des goûts plus simples. Renzo Rosso (trois milliards de dollars de fortune personnelle au classement Forbes 2013) ne s’est accordé qu’une seule originalité : sur l’épaisse moquette de son appareil figure sa maxime, “ Only the Brave ”. A chacun ses petites fantaisies… Mais à l’image des plus grandes marques de luxe, Dassault Aviation doit pouvoir satisfaire toutes celles de ses clients d’exception. L’avionneur, qui produit entre 60 à 100 Falcon chaque année, donne aux stars une grande liberté dans l’aménagement de leur jet.

Simulation 3D. Bien sûr, tout n’est pas techniquement possible. Afin de s’assurer qu’elle a bien compris les desiderata de ses clients VIP, et que l’agencement tant désiré est réalisable, l’entreprise mise sur une technologie interactive et visuelle : la simulation en 3D. Elle permet de réduire efficacement le risque industriel de chaque projet en garantissant sa cohérence de l’avant-vente jusqu’à la production.

Dassault a découvert cet outil en 2008. Le constructeur s’est alors rapproché de Sobuzzy, petit éditeur d’un logiciel de 3D temps réel. Une fois adapté aux besoins de Dassault, le programme a été dévoilé la même année au public, lors du salon Ebace, l’événement de référence du monde de l’aviation d’affaires. Les participants avaient pu y découvrir une animation 3D du fleuron du constructeur à l’époque, le Falcon 900LX.

Depuis, Sobuzzy est devenu Serious Factory, et son application, baptisée Falcon Configurator, un véritable atout commercial. Avec un prix de base de 30 à 50 millions de dollars, un Falcon ne se vend pas comme n’importe quelle savonnette. “ Après avoir acheté son jet, le futur propriétaire choisit sa décoration intérieure. Cette phase intervient entre douze et dix-huit mois avant le lancement de la fabrication de l’avion. L’acquéreur effectue ses choix dans notre catalogue d’équipements et de matériaux. Pour des demandes plus spécifiques, nous réalisons une étude technique ”, explique Pascal Joyet, chef de projet Virtual Reality Center de Dassault Aviation.

Car la personnalisation d’un tel appareil peut aller beaucoup plus loin que la simple sélection des tissus, des cuirs ou des boiseries. L’acheteur a la possibilité de définir le nombre de pièces que comportera son jet, puis les emplacements des sièges, des tables et des couchettes. Il peut aussi préciser la taille de la cuisine ou de la salle de bain, et réfléchir à leur décoration. Dans les showrooms Dassault du Bourget (93) ou de Little Rock (dans l’Arkansas), l’application 3D de Serious Factory laisse les riches clients émettre leurs souhaits dans le moindre détail.

Au centre du dispositif, se trouve une salle de réunion équipée d’un écran Barco de 140 centimètres de diagonale en très haute définition (quatre fois la HD standard). Tout un aréopage s’active autour de l’application 3D : “ L’acheteur est accompagné du vendeur, d’un spécificateur et d’un designer. Une quatrième personne manipule le logiciel ”, précise Pascal Joyet. Le spécificateur met en place les éléments 3D, donne des conseils d’aménagement, et teste en temps réel si celui­ci est réalisable.

Par exemple, grâce aux animations proposées par l’application, il vérifie qu’une couchette ne bute pas sur un autre meuble lorsqu’on la déplie. Enfin, le designer conseille le client dans les choix de matières et des coloris afin d’obtenir un résultat harmonieux. Une démarche de vente aussi sophistiquée n’aurait pas été possible sans la réalisation préalable de modèles en 3D de chacun des avions disponibles au catalogue.

Souci du détail. Cette opération s’est révélée particulièrement difficile à mettre en œuvre. A titre de comparaison, il est d’usage, dans le secteur automobile, de numériser la voiture finale pour disposer de son image en 3D nécessaire à la communication et aux publicités. Une phase dont le coût atteint 15 000 euros. Pour ses jets, Dassault Aviation a choisi d’alimenter Falcon Configurator avec les informations provenant directement de ses logiciels de CAO (conception assistée par ordinateur).

Ces données, beaucoup trop compliquées pour permettre de faire de l’animation 3D en temps réel, doivent donc être retraitées avant d’être intégrées au configurateur. Dassault fournit les modèles et toutes les textures à Serious Factory, qui les inclut dans son application à chaque mise à jour produit, soit une à deux fois par an. Le reste relève du secret industriel. Une fois le design intérieur validé par le client, l’application crée un fichier décrivant très précisément la configuration souhaitée. Celui­ci est ensuite envoyé à l’atelier qui réalisera le montage de l’appareil.

Clients appâtés. Dassault Aviation possède ainsi une longueur d’avance sur les autres marques de luxe en matière de modélisation 3D. Mais toutes suivent cette tendance, qui permet de vendre davantage d’options au client appâté par ce qu’il voit à l’écran. Ferrari a mis en ligne un configurateur pour le lancement de la 458 Italia, en 2010. Depuis, chacun de ses nouveaux modèles dispose d’une maquette virtuelle. Aston Martin, Porsche et Rolls­Royce font de même. Dans le domaine des montres de luxe, le vendeur Bamford & Sons a dévoilé son configurateur de Rolex dès 2008 et, plus récemment, Chaumet a présenté son nouveau modèle de chronographe “ Attrape­moi si tu m’aimes ” en 3D sur son site Web.

Le joaillier Pandora, lui, propose à ses clients de personnaliser ses bijoux avec une application en ligne très convaincante, même si la 3D a ses limites : “ Une pierre précieuse d’un carat, au prix déjà conséquent, peut paraître minuscule à l’écran. Le résultat commercial risque alors d’être catastrophique ”, remarque Frédéric Cavazza, consultant. Enfin, les aficionados de Louis Vuitton peuvent découvrir sur Internet chaque sac de voyage sous tous les angles, le personnaliser aux couleurs de leur choix et y apposer leurs initiales. Pour le client, reste alors un dernier casse­tête : vaut­il mieux accorder la nuance de ses malles à celle de son jet, ou bien l’inverse ?

Frédéric Cavazza (blog Richcommerce) : “ la modélisation 3D améliore l’image de marque ”

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