Au sujet de l'emploi des séniors dans la tech

RH

Les seniors, un vivier de compétences ignoré par la tech

Par Laurent Delattre, publié le 29 mars 2024

En dépit de la pénurie de compétences, les entreprises de la tech se privent, volontairement ou non, de l’apport de profils expérimentés. En cause : des préjugés tenaces sur les seniors et des difficultés à rapprocher l’offre de la demande.

Plus que le diplôme, le genre, l’origine ethnique ou l’orientation sexuelle, l’âge reste le principal facteur de discrimination à l’embauche. Selon les statistiques du ministère du Travail (Dares), 43,1 % des personnes de 55 à 64 ans étaient ainsi sans emploi en 2022 en France. Un chiffre terrible alors que la question du maintien des seniors dans l’emploi se pose de manière encore accrue depuis la réforme des retraites et le recul progressif de l’âge à atteindre pour prétendre en profiter.

Si on zoome sur le secteur de la tech, et plus particulièrement sur le monde des start-up qui cultive le jeunisme, les cheveux blancs se font encore plus rares. Selon une étude de La French Tech Grand Paris portant sur un panel de 80 jeunes pousses, seulement 7,7 % de leurs salariés dépassent 45 ans et 2,4 % ont plus de 55 ans.

Un tiers des organisations interrogées n’ont pas de senior dans leurs rangs. Plus gênant encore, un quart considère qu’une personne ne peut pas être recrutée à partir d’un certain âge. Un comble alors que le secteur est confronté à un déficit structurel de compétences.

Reste à savoir ce qu’est un senior, notion particulièrement floue. Plus de 20 % des répondants à l’étude en question considèrent qu’au-delà de 45 ans, une personne fait partie de cette catégorie. Une proportion sensiblement équivalente place la barre au-delà de 60 ans. Un professionnel peut ainsi se retrouver étiqueté senior pendant 20 ans, soit la moitié de sa vie au travail.

Parmi les explications avancées par les entreprises de la tech de leur manque d’intérêt pour les profils expérimentés, figurent en tête le montant de leur rémunération, jugé trop élevé, puis le manque d’adaptabilité à l’utilisation des outils digitaux du quotidien.
« Ce dernier point est clairement un préjugé à l’encontre des personnes expérimentées qui, pour une grande partie, ont vécu l’essor des outils numériques et leurs évolutions jusqu’à aujourd’hui », juge Alexandra André, directrice générale de la French Tech Grand Paris. A contrario, les start-up ouvertes aux seniors louent, quant à elles, leur sagesse et leur expérience, des apports salutaires au sein de leurs jeunes équipes.

Au-delà de ces préjugés à combattre, l’étude pointe la difficulté de rapprocher l’offre et la demande. Ne serait-ce qu’en termes de sourcing : 28 % des dirigeants précisent avoir des difficultés dans l’identification des profils expérimentés et ne pas savoir où les trouver. De leur côté, 60 % des seniors ne savent pas comment identifier les opportunités professionnelles. 76 % d’entre eux disposent d’un réseau limité voire d’aucun réseau dans la tech.

Pour changer la donne, les entreprises de la tech réclament notamment des aides financières et des contrats adaptés d’insertion, des formations et des outils plus efficaces pour le sourcing. De leur côté, deux seniors sur trois souhaiteraient bénéficier d’une immersion professionnelle au sein d’une entreprise innovante.

Mais une autre étude, réalisée par le cabinet Robert Walters, met en évidence des pratiques à changer au sein des DRH. Plus de sept cadres sur dix estiment en effet que les blocages aux candidatures des seniors se font dès la réception de leur CV (64 %), plutôt qu’à l’issue de l’entretien (14 %), ou encore lors de la finalisation du processus de recrutement (13 %).

Dans ce même document et pour dépasser les a priori sur les prétentions salariales des seniors, 62 % des cadres souhaiteraient instaurer une communication plus transparente sur la rémunération. Ce qui permettrait à la fois aux profils expérimentés de postuler en toute connaissance de cause et aux recruteurs de rencontrer davantage de candidats.


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