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Comment les DSI doivent se préparer à l’exploitation et à l’optimisation de l’informatique dans l’économie numérique

Par Stéphane Demazure, publié le 25 juin 2014

Michael Smith
Vice-président de Gartner Research

L’émergence d’une économie numérique se produit plus vite que prévu. Une étude réalisée par Gartner auprès de plus de 500 entreprises issues de divers secteurs révèle que près de 50 % des budgets de marketing seront consacrés au marketing numérique en 2014. Cette allocation est supérieure au budget informatique total d’une entreprise moyenne. Ce phénomène survient cette année et n’est pas limité aux budgets de marketing. L’internet des objets ouvre de nouvelles capacités pour automatiser et intégrer les activités d’un bout à l’autre d’une entreprise.

Le transfert des dépenses depuis les ressources traditionnelles (supports papier, dotation en personnel et appareils non programmables) vers les ressources numériques (médias sociaux, apps mobiles et appareils intelligents) est en train de créer tout à la fois des opportunités et des menaces pour les entreprises aussi bien du secteur public et que du secteur privé. Ces opportunités et menaces doivent être identifi ées et explorées par tous les professionnels de l’entreprise (domaine informatique et autres), mais tandis que ces innovations de rupture passent du statut d’idées à celui de capacités métiers fondamentales, le rôle du DSI gagne en importance. L’explication tient au fait que les connaissances et l’expérience requises pour dimensionner, sécuriser et optimiser toutes les diff érentes formes numériques existent au sein de l’entité informatique.

Nos études révèlent que les DSI doivent adopter une approche bimodale pour soutenir la transformation de l’entreprise vers l’économie numérique. Un mode cherche à développer une capacité, une culture et une approche plus agiles et innovantes vis-à-vis du leadership afin de relever les défi s émergents de la numérisation, tout en étant préparé à gérer les compromis et les risques inhérents. Le second mode met l’accent sur une plus grande industrialisation de l’informatique, l’exploitation des services émergents de cloud computing et de l’automatisation, et l’utilisation de services, méthodologies et processus rigoureux, fi ables et éprouvés.

L’approche de soutien des phases d’identification et d’exploration est caractérisée par des initiatives plus restreintes, plus rapides et plus agiles, pilotées par des professionnels de l’entreprise issus du domaine informatique et d’autres domaines. Dans ce mode de soutien, le rôle du DSI relèvera plus de l’infl uence que du contrôle. Dans le second mode de soutien, couvrant les phases de mutualisation et d’industrialisation, l’influence du DSI doit augmenter de sorte que les connaissances et l’expérience de l’entité informatique dans la gestion des technologies puissent être exploitées afi n de diminuer le risque et gagner en effi cacité. Ces connaissances et cette expérience sont nécessaires pour préparer les nouvelles idées en vue de ce qui deviendra des capacités métiers fondamentales dans la phase d’industrialisation qui suit.

 

OPTIMISATION INFORMATIQUE À 360 DEGRÉS

À mesure que le monde entre dans l’ère numérique et que l’entreprise commence à consommer davantage d’informatique pour induire de la valeur, la gestion du coût et de la valeur sera un domaine d’intérêt important pour le directeur fi nancier comme pour le DSI. Un modèle traditionnel, dans lequel l’entité informatique est considérée comme un centre de coûts ou une surcharge, devra changer pour permettre à l’entreprise de croître et de suivre de nouveaux modèles économiques et canaux d’engagement avec le client. Pour être effi – cace dans ce nouvel environnement économique, il faut adopter une approche à 360 degrés dans laquelle le coût de l’informatique est considéré dans le contexte des performances opérationnelles. Une approche à 360 degrés permettra aux cadres dirigeants de voir la contribution apportée par l’entité informatique à l’entreprise dans son ensemble et pourrait signifi er une hausse du coût total de l’informatique en vue de retirer une valeur maximale. La pression pour gérer l’entité informatique avec effi cience existera encore, mais ce n’est plus la seule préoccupation. La comparaison des coûts par rapport aux groupes de pairs traditionnels devra parfois être mise en suspens pour favoriser des changements dans le modèle économique et prendre une longueur d’avance dans de nombreux domaines. Dans cette phase, le compromis entre la valeur fournie par l’entité informatique et ses coûts sera toujours la base pour les décisions de gestion. Une approche à 360 degrés de l’optimisation informatique vise à fournir aux cadres dirigeants la structure qui leur permettra de visualiser l’entité informatique comme un centre de valeur et de réaliser la valeur potentielle qu’elle peut créer.

 

VALORISATION DE LA MARQUE, COMMUNICATIONS ET MATURITÉ DU LEADERSHIP

Pour que les entreprises croissent et confortent leur évolution, l’architecture des processus métiers doit être optimisée en continu. Toutefois, l’expression « optimisée en continu » ne doit pas amener à croire que la phase d’exploitation et d’optimisation se borne à apporter des ajustements superficiels à des opérations déjà fluides. Cela va beaucoup plus loin. Dès lors qu’une initiative pilote a prouvé la valeur d’un modèle économique dans une initiative « en mode agile », vient le moment de transformer l’essai en un ensemble de processus adaptés à l’entreprise. Il est alors nécessaire de prendre plusieurs mesures : adapter l’initiative à l’architecture technique de l’entreprise ; ajouter les fonctionnalités de sécurité et les contrôles applicables ; intégrer l’initiative aux applications et processus existants ; et définir les objectifs de l’initiative à atteindre dans cette nouvelle phase.

Il est donc clair que l’étiquette « informatique traditionnelle », souvent mentionnée dans le modèle bimodal par opposition à « l’informatique agile », est une idée trompeuse. Plutôt que « l’informatique traditionnelle », le DSI doit y voir une informatique adaptée à l’entreprise, l’estampiller comme telle et vendre cette idée aux dirigeants de l’entreprise est vitale pour le DSI s’il veut obtenir la visibilité, le soutien et le budget qui sont nécessaires pour maintenir les processus métiers au niveau attendu de qualité et d’effi cience. Cette approche positionne-t-elle ce DSI comme un leader de l’entreprise ? La réponse est oui, au même titre qu’un responsable de la production industrielle est un leader d’entreprise. Le responsable de l’exploitation et de l’optimisation (ou le responsable de l’informatique adaptée à l’entreprise) contribuera à la rupture de la transformation vers la numérisation, mais n’y jouera pas un rôle de leadership dominant. Cela ne doit pas l’empêcher de se mettre en avant (sens des aff aires, relations et communication) pour se faire entendre.

 

GESTION DE LA CRISE DES COMPÉTENCES NUMÉRIQUES

L’étude de 2014 de Gartner auprès des DSI révèle une grave crise du leadership informatique et un besoin généralisé de nouvelles capacités numériques en vue de maîtriser l’avenir numérique. Les compétences du DSI et des eff ectifs informatiques doivent se transformer, s’ajuster et mûrir rapidement pour prendre en charge effi cacement l’économie numérique en rapide mutation. De nouveaux rôles, tels que le directeur du numérique et le directeur des données, ont vu le jour en première réaction à la crise du leadership informatique.

La quête incessante d’innovation continue via les technologies numériques oblige les entreprises à adopter de nouveaux paradigmes de leadership au-delà des structures hiérarchiques traditionnelles axées sur le pouvoir et le contrôle. Ces paradigmes doivent encourager la collaboration, l’agilité et un partage des tâches de leadership entre les individus qui disposent de la meilleure expertise ou perspective dans une situation donnée. Les entreprises doivent adopter des approches radicalement nouvelles dans l’organisation des talents numériques. Le recrutement de groupes de personnes plutôt que d’individus aidera les entreprises à surmonter au niveau structurel la pénurie de talents dans l’ère numérique. Les réseaux de connaissances mondiaux, les communautés de pratique ou les forums dédiés à l’innovation donnent accès à des individus de talent qui peuvent être connectés via la technologie numérique à des groupes de travail, des projets ou des processus de l’entreprise à tout moment et en tout lieu.

Les « camps d’entraînement » interdépartementaux ou les programmes de formation d’entreprise portant sur le marketing et la stratégie d’économie numérique, par exemple, peuvent aider à tisser une expertise numérique et une compréhension commune à travers l’entreprise permettant à cette dernière d’expérimenter et d’exploiter de nouveaux modèles de travail.

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