Parole de DSI : L'IA générative au cœur des nouveaux défis

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IA : du Roman de la Rose à Terminator…

Par La rédaction, publié le 18 septembre 2023

L’IA générative… Elle est presque sortie de nulle part, et même certains des plus grands acteurs du secteur du numérique ne l’ont pas vue venir. Aujourd’hui, elle est sur toutes les lèvres ; c’est le sujet d’actualité et surtout une nouvelle façon de travailler.


Parole de DSI / Par Thomas Chejfec, Directeur des systèmes d’information


J’ai eu ce débat avec beaucoup de personnes, des jeunes et des moins jeunes, des enthousiastes et des réfractaires, et je me suis posé la question du sens… Comment en sommes nous arrivés là, est-ce la nouvelle norme ? J’ai tenté de rassembler mes souvenirs pour comprendre les différentes étapes qui ont mené l’Homme à ce niveau. Je me suis demandé ce qui faisait la modernité de tout être, tout au long de notre histoire. Certains éléments seront peut-être flous, mais la réflexion vaut d’être posée en ce sens.

Avant l’écriture, la transmission orale était la norme. Nous savons tous à quel point elle nécessite des efforts et est sujette aux dérives. En ce temps-là, on imagine aisément que connaître par oralité était un signe de sagesse et synonyme de pouvoir. En faisant référence au Moyen-Âge (Dieu seul sait pourquoi j’ai l’image du Roman de la Rose en tête), la modernité passait par la faculté de lire et d’écrire. Cela faisait de nous des sachants et, nous le savons désormais, moyennant une éducation, c’est quasiment à la portée de tous. Les livres et bibliothèques étaient les garants de la conservation et de la diffusion du savoir. Le seul effort à fournir est finalement devenu de se déplacer pour y accéder.

Quelques siècles plus tard, la révolution technologique a amené la radio et la télévision. Le savoir en mode push. Où que vous soyez ou presque, le savoir venait jusque chez vous, de façon sûre. Avec toutefois un choix limité de sources d’information. Avec Internet et Google, les choses sont devenues sérieuses, avec une masse d’informations colossale. Désormais, chaque minute sur Terre se créent des heures de nouvelles connaissances, et le savoir n’a plus de limites. Les sources sont infinies, les avis aussi. Le pouvoir de l’Homme ne tient plus dans sa capacité à connaître, mais dans celle à savoir où chercher.

Et arrive l’IA générative… J’avais connu l’intelligence artificielle lors de mes études, essentiellement sous la forme d’une science expérimentale, mais sans pouvoir imaginer ce qui est apparu en 2022. Cette forme d’IA est redoutable ! Et rebat les cartes du pouvoir puisqu’il n’est même plus nécessaire de savoir où chercher. En effet, cette IA permet, sur la base d’une question, d’obtenir une formulation humaine de la réponse ou de la solution. À tort, on pense que l’IA « invente » une réponse (mais les spécialistes vous diront que c’est l’utilisation d’un modèle de langage couplé à des réseaux neuronaux entraînés sur des grands ensembles de données). C’est en cela que la réponse est surprenante : elle reproduit presque parfaitement le langage humain, doublé de la connaissance. À nos yeux cela paraît être de l’intelligence.

Deux questions se posent alors.

La première est assez court-termiste : quand l’IA générative devient la norme, que se passe-t-il dans nos sociétés ? Comment nos collaborateurs le vivent-ils ? Comment l’utilisent-ils au quotidien ? Comme toute technologie émergente, le champ des possibles et le nouveau paradigme généré font que nous perdons nos repères. Nous le voyons, certaines entreprises ouvrent totalement les accès et d’autres les ferment. Il y a une phase d’appropriation. Et nos collaborateurs adoptent dans leur mode de fonctionnement le GPT-way-of-life et passent tout à sa moulinette : mail, rapport, code, SQL… Mais c’est comme tout. Chaque nouvelle invention est utilisée de façon exacerbée avant de se normaliser, soit par l’expérience qu’on en fait, soit par une acclimatation à cette technologie. Teams voit le jour ? Lors des premières visioconférences, on se dit « oh c’est formidable cette technologie ! », pour qu’au final cela devienne un outil banalisé. L’enjeu va être là pour l’IA générative. À quel moment cesserons-nous de jouer avec pour en faire un usage raisonné ?

La deuxième question tourne autour de la créativité. Je m’interroge sur notre capacité à conserver notre esprit critique quand les réponses aux questions sont satisfaisantes à nos yeux. Oui, l’IA ne nous empêche pas techniquement de garder cet esprit créatif, mais il l’inhibe fortement. Quelle facilité ! Besoin d’un courrier, d’une correction de bug ? L’IA rédige, l’IA corrige. Et nous que devenons-nous ? Quel est notre rôle ? Je renvoie vers ce film symbolique, Idiocracy, où finalement l’Homme, à force d’améliorations technologiques, ne comprend plus pourquoi elles sont là, comment elles fonctionnent. Il perd son esprit critique et se contente des réponses données.

Histoire de finir sur une touche de prospective encore plus glaçante à mes yeux, couplez ChatGPT et les robots de Boston Dynamics (vous savez ceux qui sautent partout, capables d’éviter les obstacles et de garder l’équilibre quand on les pousse du pied). Eh bien je pense que nous ne sommes pas loin de Terminator et du « soulèvement des machines » : un robot, un humanoïde, qui sait, qui fait, qui est capable d’assister l’homme comme jamais… Le progrès fait rêver, l’enjeu c’est ce que nous en faisons.


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