Gouvernance
L’Andra rationnalise le pilotage de ses projets numériques
Par Thierry Parisot, publié le 04 mars 2025
Depuis deux ans et demi, l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) est équipée d’une solution de gestion de portefeuille de projets. Celle-ci offre à son DSIN une vision globale et une capacité de coordination des initiatives, en cours ou à venir, dans les différents services.
Conséquence de Cigéo, son projet de création d’un site de stockage géologique profond dans le département de la Meuse, l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) s’est transformée et a vu ses effectifs fortement augmenter ces dernières années.
Ces évolutions et l’importance des travaux préparatoires pour ce projet hors normes par sa dimension (500 mètres de profondeur, 15 km2 de zone de stockage, 250 km de galeries, 83 000 m3 de déchets), son budget de 25 Md€ et sa durée d’exploitation de 120 ans, ont conduit en 2020 au lancement d’un programme de transformation numérique.
Premier acte avec le passage d’un service IT d’une quinzaine de personnes à un département du système d’information et du numérique (DSIN) deux fois plus gros. Objectif : renforcer l’appui aux métiers, à travers des chefs de projet dédiés, et mieux coordonner toutes les initiatives en matière d’équipement et d’utilisation de solutions informatiques. « L’organisation et le mode de fonctionnement historiques, qui laissaient la main aux métiers, ne nous permettaient pas de savoir précisément le nombre de projets numériques menés, ni leur nature ou leur statut, explique Stéphane Delysse-Hofman, chef du DSIN. La notion même de “projet informatique” était floue et n’était pas partagée par tous. »
Avec le lancement de Cigéo, il devenait urgent de remédier à cette situation pour gagner en efficacité. En 2021, parallèlement à la transformation organisationnelle, une démarche de gestion de portefeuille de projets ou PPM (project portfolio management) est instaurée, et déclinée en trois volets : gouvernance, processus et outillage. « L’agence avait déjà exploré cette voie sur le projet Cigéo quelques années plus tôt, en s’équipant d’un premier outil. Mais du fait de sa complexité et de l’absence d’une organisation adéquate, l’expérience de transposition sur les projets IT n’avait pas été concluante », raconte Stéphane Delysse-Hofman.
Avec l’appui du cabinet Colombus, la démarche est donc reprise à zéro, avec davantage de rigueur et un triple objectif : « Nous voulions améliorer la transparence, la collaboration et le reporting sur l’ensemble du portfolio », résume Virginia Ribeiro, PMO (Project management officer), c’est-àdire responsable de la gestion du portefeuille projets au sein du DSIN.

Avec le projet de création du Centre de stockage de l’Aube (CSA) dans la Meuse (55), l’Andra a vu ses effectifs fortement augmenter ces dernières années, ainsi que ses projets en matière d’équipement et d’usages numériques.
Un cycle de pilotage sur six semaines
Sur le volet gouvernance, un cycle de pilotage du portefeuille des projets des « domaines » (supports, gestion documentaire, colis, activités scientifiques, systèmes d’information) sur six semaines a été défini, ainsi que les instances rattachées : revue d’arbitrage, revues intermédiaires, revue globale en comité de direction. « Les rôles ont également été établis lors de cette étape, notamment ceux de pré-qualificateur, d’instructeur et de chargé de projet par domaine, amenés à collaborer avec un PMO, Virginia Ribeiro donc, et un architecte du SI », complète Stéphane Delysse-Hofman.
Le volet processus se concentre quant à lui sur la dimension opérationnelle de la gestion du portefeuille de projets, en cinq séquences : besoin (captation et intégration), instruction (étude d’opportunité et de faisabilité, pré-cadrage, validation), lancement (cadrage, cahier des charges, achat), réalisation (conception, développement, recette, mise en production), clôture.
Sur le volet outillage, enfin, la consultation lancée dans le cadre de la procédure adaptée du code des marchés publics auprès de six éditeurs présélectionnés conduit à une shortlist de trois solutions PPM. Puis au choix de Project Monitor de Virage Group début 2022, sur l’avis des experts de Colombus et d’un groupe d’utilisateurs métiers, notamment ceux déçus par le premier outil déployé. « En plus de cibler parfaitement notre besoin, en mettant l’accent sur le suivi de portefeuille et moins sur la gestion de projets elle-même, la solution nous est apparue plus robuste et plus simple d’utilisation que ses concurrentes, grâce à une ergonomie et des workflows reprenant les séquences du processus opérationnel que nous avions définies », justifie Stéphane Delysse-Hofman.
Stéphane Delysse-Hofman
Chef du département du système d’information et du numérique (DSIN)
« La solution “Portfolio SI&N” nous permet aujourd’hui d’avoir une vue d’ensemble centralisée, facilitant la prise de décision grâce à un meilleur suivi des projets, et bientôt celui des ressources allouées et des résultats attendus. »
Après une phase de mise en œuvre et de déploiement sur plusieurs mois, Project Monitor, rebaptisé en interne « Portfolio SI&N », est opérationnel et utilisé depuis mi-2022 par une quarantaine de personnes, formées par les équipes de Virage et aujourd’hui accompagnées par Virginia Ribeiro. « Le travail de recensement et de collecte des données sur les projets numériques auprès des métiers a été particulièrement long, puis leur chargement dans le système », détaille le chef du DSIN.
Aujourd’hui, la solution propose un cadre pour la remontée des besoins lors des revues d’arbitrage, ainsi qu’un planning détaillé et un ensemble d’indicateurs pour le suivi périodique de l’avancement des projets lors des revues intermédiaires, et le suivi stratégique lors de la revue de gouvernance. « Cela nous donne une vision globale de la “météo” des projets par grandes thématiques, pour adapter le calendrier et les ressources en fonction des dérives constatées et des priorités, ainsi qu’une capacité de coordination de nos chantiers et de nos efforts dans le domaine du numérique », poursuit-il.
Avec actuellement un portefeuille d’une centaine de projets gérés dans la solution, dont vingt en cours, l’objectif est désormais d’étoffer les équipes du DSIN pour mieux répondre aux attentes des métiers et être mesure de s’adapter efficacement en toute circonstance, avec un suivi renforcé des ressources et des risques. « Beaucoup d’autres pistes d’amélioration sont ouvertes, mais avec Cigéo, dont le stockage des premiers colis est prévu dans les années 2040, nous avons 150 ans devant nous ! », conclut Virginia Ribeiro.
Le projet en chiffres
3 métiers principaux impactés par le PPM
80 projets numériques en cours (fin 2024)
40 chargés de projet appuyés par un PMO et un architecte SI
Les cinq objectifs d’une démarche et d’une solution PPM
1 – La priorisation des projets, en fonction de leur valeur ajoutée et de leur impact sur les objectifs stratégiques.
2 – L’allocation des ressources (humaines, financières et matérielles), pour que les projets prioritaires disposent des moyens nécessaires.
3 – Le suivi outillé des performances et avec des indicateurs qui aident à ajuster au mieux les priorités ou les ressources.
4 – La gestion des risques (identification, évaluation et atténuation) au niveau du portefeuille global de projets, pour éviter les échecs des plus critiques.
5 – L’alignement avec la stratégie de l’entreprise, afin d’éviter les gaspillages en temps et en ressources.

L’organisation Andra
Activité : EPIC (Établissement public à caractère industriel ou commercial) en charge de la gestion des déchets radioactifs en FranceEffectif : 760 collaborateurs (2024)CA : 284 M€ (2024)
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