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Infleqtion annonce une machine 1600 qubits et publie sa roadmap quantique à 5 ans
Par Laurent Delattre, publié le 14 février 2024
Infleqtion (ex ColdQuanta) annonce la finalisation d’un processeur 1600 qubits à atomes neutres et publie une roadmap qui doit conduire la Deeptech à un quantique d’entreprise fin 2028 avec son système Sqorpius à correction d’erreurs en temps réel et plus d’un million de portes quantiques.
Publier des roadmaps est devenu un exercice inévitable des Deeptechs qui planchent sur l’informatique quantique. De telles roadmaps sont, avant tout, des outils marketing. Mais elles ont aussi le mérite de fixer un cap aussi bien aux équipes de recherches internes qu’aux potentiels partenaires technologiques. Elles contribuent à stimuler l’écosystème quantique, à inciter l’investissement en compétences et en recherche, et à préparer les entreprises à intégrer l’informatique quantique dans leurs opérations.
Le problème, c’est qu’elles sont finalement très rarement respectées. À une exception près. Depuis cinq ans, IBM a montré une étonnante faculté à rester synchronisé avec ses roadmaps.
En fin dernière, Big Blue publiait d’ailleurs une nouvelle roadmap étonnamment longue puisque s’étendant sur une décennie. Un exercice loin d’être évident. Invité sur notre plateau TV la semaine dernière, Pierre Jaeger, Quantum Strategic Partnership Executive chez IBM, expliquait pourquoi le constructeur s’était hasardé à publier une roadmap jusqu’à 2033. « Cette roadmap quantique d’IBM marque un engagement à long terme dans le développement et l’innovation en informatique quantique, offrant ainsi une visibilité et une prévisibilité aux partenaires et clients. Elle inclut des jalons techniques spécifiques, comme l’amélioration de la scalabilité des ordinateurs quantiques et la démonstration de la correction d’erreur à l’échelle en 2026, soulignant une progression linéaire dans les capacités de nos ordinateurs quantiques. Le choix de 2033 n’est pas arbitraire. Cette date résulte de l’évaluation réaliste du temps nécessaire pour développer les composants technologiques clés et les codes informatiques qui maximiseront le potentiel de l’informatique quantique ».
Aujourd’hui, c’est un autre acteur du quantique qui dévoile sa propre roadmap à 5 ans. Plus connu sous sa précédente identité « ColdQuanta », Infleqtion est une deeptech américaine plutôt ancienne donc pionnière puisqu’elle est née en 2007. Ces dernières années, l’entreprise avait plutôt fait parler d’elle pour ces capteurs quantiques (dont certains sont même embarqués dans la station orbitale ISS). Mais elle revient sur le devant de la scène informatique avec ces développements autour de qubits basés sur le refroidissement d’atomes par laser et l’acquisition (en 2022) de la startup « Super.tech » spécialisée dans les solutions logicielles quantiques et l’atténuation des erreurs.
Infleqtion – qui est le principal concurrent de Pasqal (mais aussi de QuEra et Atom Computing) dans la conception de machines quantiques à base d’atomes neutres (aussi appelés atomes froids) – annonce ainsi avoir finalisé une machine quantique de 1600 qubits construite autour d’un réseau de 40×40 atomes de césium.
Et pour célébrer cet aboutissement, Infleqtion a partagé sa roadmap quantique pour les 5 ans à venir.
« 2024 est un point d’inflexion pour les technologies quantiques » affirme Scott Faris, CEO d’Infleqtion. « L’année va être marquée par un nombre croissant d’opportunités à court terme pour les organisations des secteurs public et privé de commencer à déployer des solutions quantiques de grande valeur. Notre plateforme technologique à base d’atomes neutres permet des économies d’échelle sans précédent en nous permettant de desservir ces marchés prêts à l’emploi tout en fournissant les bases d’ordinateurs quantiques tolérants aux pannes. Associée à nos investissements dans la fabrication, notre plateforme technologique nous place dans une position unique pour commercialiser le quantique à grande échelle. »
La roadmap, qui démarre avec la mise à disposition en 2024 de sa machine 1600 qubits et de sa plateforme logicielle Superstaq, comporte plusieurs étapes avec comme chez IBM deux dates clés : 2026 pour une correction d’erreurs vraiment fonctionnelle et 2028 pour des machines (projet Sqorpius) permettant d’assembler des circuits logiques composés d’un million de portes quantiques.
Les roadmaps d’IBM et Infleqtion sont assez différentes. Si IBM la focalise sur l’informatique quantique, celle d’Infleqtion fait apparaître d’autres axes de recherche connexe comme les horloges atomiques optiques (projet Tiqker en 2025) et les capteurs RF quantiques (projet SqyWire).
Cependant, on retrouve sur la roadmap d’Infleqtion la même volonté que chez IBM : se focaliser davantage sur la correction en temps réel des erreurs inhérentes aux technologies quantiques et à l’accroissement de la profondeur (donc de la stabilité) des circuits quantiques plutôt que de poursuivre la course au nombre de qubits physiques.
Les technologies sont cependant différentes et certains objectifs chiffrés divergent entre les deux pionniers du quantique. Là où IBM pense n’atteindre les 15 000 portes qu’en 2028 (et 1 milliard en 2033), Infleqtion ambitionne le million de portes dès 2028. Toutefois, IBM pense atteindre les 100 millions de portes vers 2029/2030.
Dans les deux cas néanmoins, ils espèrent tous les deux dépasser les 100 Qubits logiques (comprenez 100 Qubits utiles à correction d’erreurs) dès 2028. Mais IBM compte obtenir 150 Qubits logiques avec 1090 qubits physiques là où Infleqtion envisage plus de 100 qubits logiques réalisés avec 40.000 qubits physiques.
Une différence qui permet à Infleqtion de prévoir un « avantage quantique » dans les entreprises dès la fin 2028 avec son système Sqorpius. Plutôt que d’ « avantage quantique », IBM préfère parler d’un déploiement à l’échelle dans les entreprises en 2033 avec sa génération de machines évolutives « Blue Jay ».
Rendez-vous dans cinq ans pour voir lequel d’IBM ou Infleqtion a été le plus fidèle à sa roadmap…
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