Data / IA

Quand ChatGPT devient un enjeu politique

Par Thierry Derouet, publié le 12 avril 2023

Faut-il avoir peur de ChatGPT ?“ Après quelques milliers de scientifiques, c’est au tour d’États et de politiques d’agiter le chiffon rouge.

La sidération a été grande quand, quelques heures après la mise en ligne de la nouvelle version de ChatGPT, le mercredi 29 mars dernier, plus de 1 000 personnalités et scientifiques, dont Elon Musk (Tesla), Steve Wozniak (cofondateur d’Apple) ou encore Andrew Yang (ex-candidat démocrate à la présidentielle américaine) ont signé une lettre ouverte pour réclamer une pause dans l’IA en évoquant “des risques majeurs pour l’humanité“. Jeudi 31 mars 2022, l’Italie a été le premier pays, à bloquer provisoirement ChatGPT, un geste symbolique mais plus motivé par un éventuel non respect du RGPD et des données privées que par les risques de l’IA.

Peu auparavant, le 19 février dernier, dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, Marion Maréchal Le Pen, la vice-présidente de Reconquête nous prévenait d’un “sujet bien plus important que la réforme des retraites“. Car selon elle, l’arrivée de ChatGPT risquait non seulement de mettre “Google au chômage“, mais de provoquer “un creusement très important des inégalités“ où une partie de la population pourrait être sur le carreau, car non accompagnée pour affronter cette innovation majeure.

ChatGPT régulé avec l’IA Act ?

Ce jour, c’est au tour de Jean-Noël Barrot, Ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications d’être auditionné par le Sénat sur ce sujet. Et la position de Jean Noël Barrot est autre. Pour lui, “bloquer ChatGPT“, comme le font les Italiens “est la mauvaise réponse aux bonnes questions“.
Interrogé à de nombreuses reprises sur nos ondes, il souligne qu’il y a “une voie intermédiaire“ entre “les technolâtres qui considèrent que l’innovation doit pouvoir se dérouler sans contrôle démocratique“ et “les technophobes qui veulent tout arrêter“. N’oubliant pas toutefois de souligner “que les intelligences artificielles génératives, pouvaient être porteuses de grandes promesses…/… à condition que ce soient les hommes qui décident de leurs orientations“. Et qu’avec “l’élaboration en cours d’un règlement européen, le IA Act“, l’Europe serait “la première démocratie du monde à se doter d’un cadre pour que l’innovation en matière d’intelligence artificielle puisse se faire au service de ses concitoyens“.

Depuis 1980, la seconde révolution selon Bill Gates

Curieux contraste avec Bill Gates qui rappelle qu’au cours de sa vie, il a assisté à deux démonstrations qui lui ont paru révolutionnaires : “la première fois, c’était en 1980”, lorsqu’il a été confronté à une interface utilisateur graphique, la deuxième étant sa rencontre avec l’équipe d’OpenAI où en 2022, il leur a lancé un défi : “former une intelligence artificielle à réussir un examen de biologie avancée“ pour la rendre capable de répondre à des questions pour laquelle elle n’a pas été spécifiquement formée (Pourquoi l’AP Bio ? “Parce que l’examen est plus qu’une simple régurgitation de faits scientifiques, il vous demande de réfléchir de manière critique sur la biologie.“) Il pensait alors que le défi les occuperait pendant deux ou trois ans. Ils l’ont terminé en quelques mois seulement. On connait la suite.

À LIRE AUSSI :

ChatGPT, une intelligence très superficielle

La piqûre de rappel de Yann Le Cun, directeur du laboratoire d’intelligence artificielle de Meta doit être toutefois entendue on a l’impression que ces systèmes sont intelligents, mais en fait, ils n’ont pas le type d’intelligence qu’on constate chez les humains. Ils sont capables de manipuler la langue et ça nous donne l’impression qu’ils sont intelligents, mais c’est une intelligence très superficielle.”
Et de réinsister sur ce qu’il professe depuis de nombreuses années : L’intelligence artificielle est un moyen d’amplifier l’intelligence humaine, de même que les machines sont un moyen d’amplifier la force physique, et qu’il ne faut pas avoir peur de l’intelligence artificielle. Il faut voir ça, au contraire, comme une certaine nouvelle renaissance, possiblement un nouveau départ pour l’humanité, parce que le progrès de l’humanité est limité par l’intelligence de l’humain.

Avec ChatGP, jamais en aussi peu de temps, un service n'avait réussi à séduire autant d'utilisateurs.

Avec ChatGPT, jamais en aussi peu de temps, un service n’avait réussi à séduire autant d’utilisateurs.

Même avertissement depuis des années chez Luc Julia aujourd’hui directeur scientifique de Renault et co-concepteur de l’assistant vocal Siri d’Apple : “parler d’intelligence artificielle reste une vaste fumisterie : l’IA est stupide et elle ne fait que ce qu’on lui demande de faire”. Et de pointer le véritable sujet “le vrai danger, c’est la consommation d’énergie de cette technologie.
ChatGPT consommerait en effet une quantité folle de ressources selon une étude de l’université de Californie. Il est peut-être là le véritable sujet. Mais pour l’heure, nos politiques semblent bien démunis face à cette nouvelle révolution technologique, pour laquelle, il est pour l’heure impossible d’en définir les réels effets. Positifs ou négatifs.

À LIRE AUSSI :

Dans l'actualité

Verified by MonsterInsights