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L’État met le paquet pour recruter des experts du numérique

Par Laurent Delattre, publié le 20 février 2024

Pour attirer des informaticiens dans ses ministères, la fonction publique d’État joue la transparence sur les profils de poste à recruter et surtout sur les salaires potentiels. Surprise, ils tiennent la comparaison avec le privé, à ceci près qu’il ne s’agit pas toujours de CDI.

Le manque d’attrait de la fonction publique et de ses emplois n’est pas nouveau. Il suffit de voir les difficultés actuelles de recrutement dans l’enseignement ou à l’hôpital public pour s’en convaincre. Et les DSI des ministères, des collectivités territoriales ou des opérateurs de service public (Urssaf, Cnav, France Travail, etc.) sont aussi à la peine. Cette situation a des causes multiples, mais la modicité des salaires proposés – réelle ou supposée – en est une majeure.

C’est pourquoi il faut saluer l’effort de transparence de l’État qui, depuis 2019, a mis en place un référentiel de rémunération. Celui-ci définit des fourchettes de salaires et notamment des limites hautes sous lesquelles l’embauche d’un agent contractuel peut s’opérer plus rapidement, sans passer par un appel d’offres. En effet, une des plaies des DSI du public reste la lenteur des process de recrutement, qui les pénalise face à la réactivité de leurs concurrents des entreprises privées.

Ce référentiel a aussi le mérite de dresser en filigrane une liste des profils de postes (55 à date) dont la fonction publique d’État a besoin. Celle-ci emploie aujourd’hui 21 000 agents et entend en embaucher 2 500 supplémentaires par an jusqu’en 2028.

Dans une mise à jour en ce début d’année, de nouveaux métiers font leur apparition : par exemple, ingénieur DevOps et ingénieur de solutions cloud. Ils devraient bientôt intégrer la « bible » des métiers de l’État, à savoir le Répertoire des métiers de la fonction publique (RMFP), dont la lecture relève de l’inventaire de Prévert, si on a l’âme poétique.

Concrètement, un professionnel du numérique qui souhaiterait travailler pour l’État peut savoir, avant un entretien d’embauche, à quel salaire prétendre, en se référant à ses compétences et à son expérience dans la fonction. La comparaison est d’ailleurs assez flatteuse pour les postes décrits. Par exemple, un data manager aguerri (plus de 20 ans d’expérience) peut espérer une rémunération de 154 K€, un data analyst 95 K€. Quant aux fonctions d’encadrement, elles ne sont pas négligées non plus. Un directeur de projets IT pourra être payé jusqu’à 159 K€, tandis qu’un DSI atteindra les 177 K€ avec une expérience de plus de 20 ans.

Pour en savoir plus :

Téléchargez le Référentiel de rémunération des 55 métiers de la filière numérique. Applicable à l’ensemble des administrations d’État, ce référentiel définit des valeurs de salaires sur l’ensemble des métiers de la filière numérique, avec des fourchettes basses et hautes, en fonction du métier et de l’expérience de chaque candidat ou agent déjà en place.

Ces différents salaires sont tout à fait cohérents avec ceux qu’un cabinet comme Robert Half a publié récemment pour le secteur privé, en région parisienne où sont la plupart des postes à pourvoir dans les ministères et autres organismes publics.

Mais c’est peut-être la limite de l’exercice : la traduction de ce travail de référencement pour la fonction publique de l’État n’est pas disponible pour la fonction publique territoriale. Au moins peut-on y trouver une base de discussion avant de rencontrer la DRH d’une grosse collectivité ou d’un hôpital régional ?

Par ailleurs, les éléments de rémunération proposés concernent des contractuels, tandis que Robert Half parle de postes en CDI. À noter que la circulaire du 3 janvier préconise justement le recours aux CDI pour les métiers les plus en tension, considérant que cela pourra « renforcer l’attractivité de la filière numérique de l’État et répondre à l’enjeu de fidélisation des agents et de souveraineté numérique ».

Il n’est pas certain cependant que les professionnels de l’IT rêvent d’un statut de fonctionnaire, du moins pas tant que le marché de l’emploi est porteur pour eux. L’inverse est en revanche plus probable et c’est pourquoi, sans doute, l’État a aussi lancé début janvier son campus numérique à l’Institut national du service public pour développer la formation, voire la reconversion de tous les agents et proposer une formation continue à ses agents de la filière numérique.

L’Urssaf joue des clichés pour attirer les professionnels de l’IT

Au-delà de la rémunération, une des difficultés rencontrées pour recruter dans le secteur public (ou assimilé) reste son image disons vieillotte pour manier l’euphémisme. Vu de l’extérieur en effet, ces DSI seraient poussiéreuses et les technologies mises en œuvre dateraient de Mathusalem.

Dans le cadre d’une campagne de recrutement prenant à contre-pied l’image qu’elle pourrait renvoyer, l’Urssaf a décidé de jouer sur ces a priori en présentant son plus beau profil technologique, tout en insistant sur les missions de service au public proposées, qui donnent plus de sens au quotidien de ses collaborateurs. Rafraîchissant sur le plan de la com. Pour faciliter le rafraîchissement de la pyramide des âges de sa DSI ?


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