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TDF optimise ses opérations grâce à la création d’un jumeau numérique

Par Charlotte Mauger, publié le 22 janvier 2025

Pour simplifier et sécuriser l’installation de nouvelles antennes sur ses infrastructures, TDF construit actuellement un jumeau numérique de ses sites. Cette numérisation, menée avec l’aide de la société Myx, va également rendre possible la maintenance prédictive des infrastructures.

À côté de son rôle historique d’assurer la diffusion de la TNT et de la radio (sur 97 % du territoire aujourd’hui), l’une des autres missions principales de l’opérateur d’infrastructures (ou tower company) TDF est d’héberger les opérateurs de téléphonie mobile sur ses tours, des pylônes et des toits d’immeubles. Ainsi, lorsqu’une zone est non couverte par le client en réseau 4G ou 5G, celui-ci peut formuler une expression de besoin à TDF, pour prévoir l’installation d’une nouvelle antenne sur l’une de ces infrastructures.

TDF se donne alors trois à six mois pour y répondre. Mais cette étape de vérification est longue, coûteuse et non sans risques. « Deux de nos techniciens doivent se déplacer, l’un d’eux doit monter sur le pylône pour prendre des mesures et des photos. Puis, de retour au bureau, ils doivent calculer la faisabilité », détaille Mouaad Aabibou, manager de la transition chez TDF.

Pour simplifier et accélérer la réponse aux clients, l’entreprise a décidé de construire, en trois ans, un jumeau numérique de ses infrastructures.

« L’objectif est de numériser l’ensemble de nos 8 000 sites en France dans leur intégralité », détaille Mouaad Aabibou, qui a pris la chefferie sur ce projet. Lequel ne concerne pas seulement les infrastructures pour les télécommunications, mais aussi celles pour le déploiement de réseaux de fibre optique et celles utiles à la diffusion hertzienne de la télévision et de la radio.

Le projet « jumeau numérique » avait commencé dès 2020, avec une phase de tests préliminaires sur une cinquantaine de sites. « Cette présérie nous a confirmé l’intérêt de la démarche », se souvient le responsable.

En 2023, un appel à projets a donc été lancé, qui a débouché, au printemps 2024, sur la sélection de la société Myx, spécialiste de la numérisation des infrastructures et notamment celles des tower companies. « Myx faisait partie des rares sociétés capables de proposer une solution adaptée à notre métier. Nos infrastructures évoluent en effet assez régulièrement, avec des réinstallations, des démontages, des visites. Il est du coup assez différent de mettre en place un jumeau numérique ici par rapport à d’autres contextes, comme ceux proposés par des usines par exemple. Nous avons besoin qu’il évolue au rythme du terrain », explique le chef de projet.

TDF a choisi de créer des jumeaux numériques de ses installations. La modélisation 3D obtenue (à gauche) sert aux visites virtuelles. La maquette BIM 3D permet d’optimiser les opérations sur les infrastructures, notamment la maintenance.

Une vue de toutes les installations en mode « Google Street »

Les opérations ont débuté juste après la signature du projet et 400 sites ont déjà été entièrement numérisés. Le reste le sera d’ici 2027.

Ce processus comprend trois étapes. La première est la captation des infrastructures : des techniciens TDF se rendent sur site pour prendre des photos de la structure – au sol avec une caméra 3D et en hauteur avec un drone.

Ces prises de vues servent ensuite à reconstruire le modèle 3D de la structure, identique à la vision humaine, avec sa forme, ses dimensions, sa localisation. Cette technique de photogrammétrie a fait ses preuves. « L’idée est d’obtenir une vue de type Google Street du toit-terrasse ou du pylône », image Mouaad Aabibou. Surtout, ce modèle accessible en visite virtuelle donne l’accès à des données utiles pour préparer une installation (environnement autour de l’infrastructure, vue du pylône par le dessus, boulonnerie associée…).

Pour accélérer la réponse client, une troisième et dernière étape est nécessaire : la modélisation au format BIM. Elle permet d’obtenir un plan 3D qui intègre toutes les informations utiles sur chaque structure (nom de l’équipement, hauteur, référence technique…).

Le jumeau numérique de Myx fait la différence grâce aux possibilités de mises à jour de manière instantanée, à partir des données du SI. La DSI de TDF s’est pour cela chargée de construire avec son fournisseur une interface entre celui-ci et le jumeau numérique. Cette API organise la coordination entre les données du SI et celles de la maquette 3D BIM.

Mouaad Aabibou

Manager de la transition et chef de projet chez TDF

« Nos infrastructures évoluent assez régulièrement, avec des réinstallations, des démontages, des visites. C’est assez différent de mettre en place un jumeau numérique ici par rapport à d’autres contextes comme ceux proposés par des usines par exemple. Nous avons besoin qu’il évolue au rythme du terrain. »

L’opérateur espère réduire de 65 % le nombre des déplacements annuels. C’est un résultat spectaculaire de la disponibilité de ces modélisations : la plupart des calculs nécessaires pour répondre à l’expression de besoin du client pourront en effet désormais se faire directement avec l’interface, et les techniciens n’auront à se déplacer que pour les projets les plus complexes. En réduisant les déplacements et les montées sur installations, « nous aurons aussi des gains importants en matière de RSE, sur le plan de la sécurité sur les chantiers et en termes de qualité de nos réponses aux clients », complète Mouaad Aabibou. Des réponses qui pourraient aussi être produites plus rapidement, le gain se chiffrant ici en semaines.

Une autre perspective prometteuse concerne la valorisation du patrimoine de TDF. Avec le panel de données rendues disponibles par ces numérisations, l’opérateur pense déjà à la mise en oeuvre d’applications utilisant l’IA ou les techniques de big data. Par exemple, il en escompte une meilleure maîtrise de la consommation électrique sur ses installations : grâce à des capteurs ajoutés sur les infrastructures et modélisés dans le jumeau numérique, il serait possible de prévoir les impacts énergétiques lors de l’ajout d’un nouvel équipement.

Autre atout du jumeau, les nouvelles possibilités de déclenchement d’opérations de maintenance prédictive. La photogrammétrie permet en effet aussi de remonter des constats d’anomalies, et de les confronter à un modèle d’IA capable d’évaluer l’état d’usure des pièces à partir d’anomalies déjà répertoriées (rouille, câbles abîmés, etc.). Pour cela, il faudra mettre à jour les images régulièrement, en renouvelant les captations tous les ans sur les sites les plus actifs (et trois ans pour les autres). « Cette nouvelle approche nous permettra d’assurer une maintenance optimisée et de qualité », explique Mouaad Aabibou.

Ce projet s’inscrit dans une refonte plus large du SI de TDF, dont les deux tiers de l’architecture ont été transformés. « TDF est une towerco qui s’industrialise, et pour répondre de manière compétitive à nos enjeux et défis industriels et commerciaux, nous devons aussi moderniser notre SI. La plus grande révolution est l’arrivée d’une plateforme d’orchestration de processus qui permet d’automatiser des tâches de faible valeur ajoutée », détaille Mouaad Aabibou.
Le choix s’est porté sur la solution de Camunda en janvier dernier et ses premières utilisations concerneront justement l’automatisation de la gestion de projets et des résolutions d’incidents sur sites.


Le projet en chiffres

8 000 jumeaux à produire en France

3 ans de numérisation à venir

65 % de déplacements en moins pour les techniciens

L’entreprise TDF

Activité : Opérateur d’infrastructures
Effectif : 1 800 collaborateurs
CA       : 849,7 M€ (2023)

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