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Alcatel Submarine Networks (ASN) bascule dans l’Industrie 4.0 avec PTC
Par Alain Clapaud, publié le 17 avril 2024
Filiale de Nokia spécialisée dans la fabrication et la pose de câbles sous-marins, ASN a lancé sa stratégie 4.0 il y a quatre ans. Au coeur de cette modernisation, un nouveau PLM pour gérer ses données produits et de fabrication. Un projet qui s’étend désormais à l’informatique industrielle (OT) via la 5G privée.
Depuis quelques années, opérateurs et Gafam ne cessent de poser des fibres optiques au fond des océans pour faire face à l’explosion du trafic internet. Alcatel Submarine Networks, qui revendique 33 % des parts du marché mondial des réseaux de communication sous-marins, a ainsi fabriqué près de 600 000 km de câble et 6 500 répéteurs dans ses usines de Greenwich en Angleterre et de Calais en France.
Pour faire face à cette demande, l’entreprise a lancé une vaste stratégie Industrie 4.0 en 2019 qui portait sur plusieurs pans. La filiale de Nokia a déployé des capteurs connectés sur ses machines, doté ses collaborateurs de tablettes et de lunettes de réalité augmentée. Pour supporter ces nouveaux terminaux, un réseau 5G privé a également vu le jour sur le site de l’usine de Calais. Le troisième pilier de cette stratégie porte sur une architecture logicielle avec de nouvelles solutions de conception & industrialisation, de gestion de la production, de planification et de calcul des coûts.
Dans ce dernier cadre, le déploiement d’un nouveau logiciel de PLM est acté afin de gérer l’ensemble des données produits et de manufacturing en temps réel. L’industriel fait le choix de la solution PLM Windchill éditée par PTC, en cohérence avec la solution de conception Creo du même éditeur, déjà utilisée dans les bureaux d’études. « En 2019, il s’agissait de la solution PLM la plus performante au regard de nos besoins, explique Christophe Bejina, DSI d’Alcatel Submarine Networks. Lorsqu’en juin 2023 nous avons voulu étendre les usages de cette plateforme dans le domaine de l’Industrie 4.0 et digitaliser nos ateliers de production, nous avons complété le PLM avec la solution ThingWorx. »
Cette plateforme de communication IIoT (Industrial IoT), également de l’éditeur PTC, a permis d’interconnecter le PLM à l’ERP d’ASN afin d’automatiser et de synchroniser les processus de production.
L’autre objectif de ce projet était de donner aux opérateurs accès aux données produits et aux données de fabrication dans les ateliers. « La base de données produits doit être la seule et unique source de vérité quant aux données de fabrication, qui doivent être accessibles à l’ensemble des opérateurs autorisés à travers un flux numérique unique. »
En outre, le DSI souhaite une synchronisation automatique des événements dans l’atelier sur le MES qui supervise les opérations de fabrication, et sur l’ERP qui enregistre l’exécution des ordres de fabrication.

Sur sa tablette, l’opérateur peut à la fois consulter les informations du PLM ou des vidéos qui expliquent des procédures de fabrication, obtenir les ordres de fabrication et les compléter une fois ceux-ci exécutés par le MES.
Numériser l’ensemble du process était indispensable pour atteindre l’objectif de synchronisation des données en temps réel. De plus, les tablettes ont permis d’éliminer les saisies manuelles sur papier, précédemment ressaisies par la suite, ce qui constituait une source d’erreurs humaines.
« Le plus complexe dans ce type de projet est de faire collaborer les architectes et les métiers sur cette transformation des usages, ajoute le DSI. Les habitudes de travail sont profondément impactées par les outils et il faut pouvoir impliquer les équipes industrielles dans le projet très tôt afin de bien comprendre leurs besoins, et de leur expliquer ce que vont leur apporter ces nouvelles technologies. C’est la phase qui demande le plus de temps. » La mise en place des interfaces techniques entre les trois systèmes a été menée avec l’intégrateur, en tenant compte de ce que les utilisateurs métiers voulaient voir s’afficher sur leur tablette. « C’est lors de la modélisation des interfaces que se matérialisent les demandes des équipes industrielles », souligne le DSI.
Une 5G privée pour connecter les opérateurs sur l’ensemble des sites
Ce premier gros déploiement PLM arrive à son terme sur une première famille de produits et sera suivi par les autres familles dans les années à venir. En parallèle et pour que ces solutions soient accessibles sur les sites industriels de manière totalement mobile, des réseaux 5G privés ont été mis en œuvre sur les deux usines de production. « Cette connectivité 5G nous permet de disposer d’une part de connexions fiables, de bonnes performances en termes de débit, et d’autre part de la sécurité apportée par les mécanismes de chiffrement définis par les normes 3GPP 5G. En effet, l’ensemble de ces flux de données sont critiques pour nous. Ces réseaux 5G constituent la dorsale de transmission des données dans nos deux usines et supporteront les flux critiques liés à la production. »
Outre l’accès aux données de production via des ordinateurs portables, une trentaine de tablettes Zebra 5G ont été déployées à ce jour dans les ateliers. Ainsi, les opérateurs accèdent à leurs ordres de fabrication où qu’ils se trouvent, que ce soit au pied de la chaîne ou à plus grande distance. En effet, les ateliers de préparation des câbles font plusieurs dizaines de mètres de longueur et les espaces de circulation sont nombreux.
L’IIoT vient s’intégrer à l’architecture Industrie 4.0
En 2023, les études sur un programme IoT/OT ont été lancées afin de connecter l’ensemble des équipements industriels, machines, automates industriels et PLC (Programmable logic controller) de l’entreprise à cette même infrastructure. « Depuis deux ans, la direction industrielle est très active sur cette thématique Industrie 4.0, avec une équipe dédiée qui pilote les projets. L’OT a vraiment pris le relais de l’IT qui poussait le projet à son origine. »
Christophe Bejina
DSI d’Alcatel Submarine Networks
« À terme, plusieurs dizaines d’opérateurs auront accès aux données de fabrication issues du PLM via des terminaux mobiles 5G. ».
La mise en production est prévue en 2024 et va mettre en oeuvre la plateforme ThingWorx de PTC qui joue le rôle de MOM (Message oriented middleware) dans l’architecture Industrie 4.0 de l’industriel. Le logiciel crée le lien entre les plateformes industrielles et le MES qui supervise les opérations. « Cette couche doit être suffisamment riche pour connecter des briques IT comme le PLM et le MES avec le volet IIoT et les données issues de capteurs, afin de pouvoir constituer l’écosystème de données qui constitue la base des systèmes Industrie 4.0. C’est un élément d’intégration fondamental. »
Ces flux de données IIoT permettent d’alimenter les écrans de supervision de la fabrication, mais aussi de constituer un data lake de tous les événements, mesures et informations liés à la production industrielle. « La prochaine étape sera de faire tourner sur ces données des algorithmes prédictifs, notamment sur la gestion de la qualité, et intervenir de façon beaucoup plus anticipée qu’aujourd’hui auprès des opérateurs sur la base de ce qui sera détecté par les algorithmes. »
L’analyse de ces données va permettre à l’industriel d’indiquer aux opérateurs les actions correctives à prendre avant que la dérive d’un paramètre n’impacte la qualité de la production. Il s’agira de l’ultime étape d’un programme engagé par ANS voici quatre ans.
Le projet en chiffres
2 réseaux privés 5G couvrant 70 000 m2
100 % des données générées par la production digitalisées en temps réel
0 délai pour l’accès aux procédures de fabrication ; idem pour la propagation des changements produits
L’entreprise Alcatel Submarine Networks
Activité : Industrie (réseaux optiques sous-marins)
Effectif : 1 120 collaborateurs (2021)
CA : 1,1 Md€ (2022)
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