Parole de DSI : et si on procédait à la marchandisation de nos données personnelles. Le produit c'est toi, la data c'est toi...

Data / IA

Avec la data, le produit c’est toi !

Par La rédaction, publié le 19 février 2024

Et si on appliquait aussi des thèses paranoïaques à la data ? Rien de ce que vous faites tous les jours, dans la rue, dans vos habitudes d’achats, sur votre téléphone, avec Siri ou Alexa, dans votre voiture connectée… Rien n’échappe à la data. Pas le moindre de vos faits et gestes.


Parole de DSI / Par Thomas Chejfec, Directeur des systèmes d’information 


Nous sommes les premiers à surfer sur cette vague de la data qui enrichit les entreprises, leur permet de mieux comprendre leurs consommateurs. Alors pourquoi ne pas pousser le vice à l’extrême et se dire que, dans quelques dizaines d’années, nous vivrons dans un monde gouverné par nos données personnelles ? Peut-être que cela ne vous plaît guère, à première lecture… Je vous propose donc d’examiner comment la marchandisation de nos données personnelles pourrait être une solution.

Bien placés en tant que DSI, nous basons notre stratégie et nos actions sur la data, celle qui permet, dans nos fonctions, de créer de la valeur pour les entreprises pour lesquelles nous travaillons. Des entreprises qui vendent des produits pour des particuliers que nous sommes. C’est un cercle où notre activité individuelle pour le compte d’une entreprise vient impacter indirectement notre vie personnelle, notre liberté, nos données personnelles, notre libre arbitre… Nous collectons, analysons, fabriquons des data lakes, des datamarts qui peuvent contenir nos propres données. Bien sûr, toutes ne sont pas sensibles. De simples cookies n’auront pas le même impact que le croisement de nos données médicales avec celles de nos habitudes de consommation.

Mais ne soyons pas naïfs, les supermarchés où vous achetez toutes vos courses, où vous payez avec une carte bancaire à votre nom des articles qui figurent sur un ticket de caisse, c’est techniquement croisable, aussi, avec vos données médicales, où votre nom figure aussi. Elles ne sont bien sûr pas stockées par la même structure, mais imaginez quand même que, techniquement, ce croisement est faisable. Multipliez cela par des dizaines de millions d’individus et je vous laisse imaginer les corrélations que nous pourrions faire entre votre santé et vos achats.

Si vous couplez l’IA et les modèles prédictifs, vous pourriez très bien être informé, avant que vous ne le sachiez vous-même, de ce que vous allez acheter lors de vos prochaines courses, voire de votre risque de contracter une maladie… Les données sont toutes là, il suffit de les corréler à l’extrême.

Alors heureusement, du moins je l’espère, la réglementation et la conformité s’exercent au bon niveau. Sans réglementation, nous serions dans un monde sans foi ni loi, où nous ne serions que des humains prévisibles, analysés en permanence pour le seul profit des entreprises.

Néanmoins, l’ultra-digitalisation de nos sociétés civiles soulève un problème d’éthique et d’implications sociétales. L’influence des algorithmes des réseaux sociaux, que ce soit sur nos choix individuels ou sur nos opinions, n’est pas négligeable. Nous pensons tous, sous couvert du sentiment de liberté que nous ressentons, avoir accès à toute l’information et toute la connaissance, à des choses auxquelles aucun de nos ancêtres avant nous n’a eu accès. Mais cela a un prix. Quand c’est gratuit, c’est que le produit c’est nous.

La collecte massive d’informations sur nos habitudes de comportement digital soulève indubitablement des questions et des inquiétudes sur le respect de notre vie privée, et érode la confiance envers les entreprises qui exploitent cela. Je rencontre beaucoup de gens, et je ne suis pas loin d’en faire partie, qui me disent préférer le monde d’avant : moins parfait, moins analytique, plus aléatoire. Aujourd’hui, hélas, on en vient à se demander, quand nous prenons une décision, si celle-ci est liée à notre libre arbitre, ou si elle découle de notre monde digital.

Nous ne reviendrons pas en arrière. La société ne se dénumérisera pas. Il faut apprendre à vivre avec cette certitude que notre vie sera de plus en plus analysée, disséquée, soumise à des algorithmes d’IA, pour que les entreprises puissent affiner au mieux leurs produits, transformer leurs efforts marketing en ventes fermes. Le produit c’est nous, la data c’est nous.

Alors soyons ultra-libéraux, et vendons notre âme au diable ! Vendons-nous ! Imaginons un monde où nous sommes aussi une valeur data, où celle-ci est monnayable, sous réserve d’accord, bien sûr. Libre à ceux qui ne le veulent pas de le refuser, et libre à ceux qui le veulent de le faire, dans la mesure du respect de l’éthique humaine.

Le défi sera alors de fournir un consentement éclairé pour savoir comment nos données sont utilisées en y mettant la limite que nous voulons.

Monétiser sa donnée personnelle est un acte moderne, futuriste, peut-être même rentable : si une entreprise veut accéder à mes données pour que je succombe au charme de ses produits, cela aura un prix. Je conçois que ce soit acceptable pour certains, très certainement aussi complètement impensable ou abject pour d’autres. Mais quitte à être exploité, autant faire partie de l’équation en toute connaissance de cause.

À LIRE AUSSI :

À LIRE AUSSI :

À LIRE AUSSI :

Dans l'actualité

Verified by MonsterInsights