Gouvernance

Ce que doivent faire les DSI vis-à-vis des CDO

Par Mark Raskino , publié le 01 octobre 2018

De nombreuses entreprises nomment un directeur du numérique (ou CDO pour Chief Digital Officer) orienté sur la stratégie pour conduire leur transformation numérique. S’ils ne briguent pas ce rôle, les DSI ont tout intérêt à traiter le CDO comme un allié et à le soutenir, avant que ce rôle disparaisse.

Les directeurs du numérique sont essentiellement des agents stratégiques du changement qui se concentrent sur l’exploitation de l’innovation technologique. Ils apportent aux dirigeants une perspective stratégique sur l’entreprise, une énergie du changement et un ciblage transformationnel plus explicite sur l’utilisation de la technologie. Le plus souvent, ils sont rattachés au PDG. La plupart ne sont pas là pour rester. Le poste est créé, puis pourvu une fois ou deux, et sa période d’exercice est courte. Gartner l’estime en moyenne à deux ans. Elle dépend du temps nécessaire jusqu’à ce que la numérisation devienne ancrée dans la culture de gestion et la stratégie d’entreprise.

Similaire à la tendance qui a conduit les entreprises, au début des années 2000, à se doter de « responsables du e-business », la tendance du recours à un CDO est apparue vers 2012. Gartner estime que 15 % des grandes entreprises ont un rôle de directeur du numérique. Le recrutement au poste de CDO atteindra son plus haut niveau avant 2019. L’intitulé du poste disparaîtra d’ici 2025. Et pendant l’exercice de son rôle, le CDO préconisera de nombreux changements que le DSI souhaite voir en définitive. De ce fait, les CDO sont les alliés des DSI.

Devenir directeur du numérique ?

Certains DSI deviennent CDO. Toutefois, il convient d’évaluer honnêtement ses compétences et ses ambitions avant de se proposer pour ce rôle qui est en rupture avec celui des DSI traditionnels des années 2000. Ceux-ci jouaient principalement un rôle de soutien, ils assistaient l’entreprise, mais ne la façonnaient pas. Ils mettaient fortement l’accent sur l’optimisation des coûts informatiques et la réduction du risque. De son côté, le CDO est un leader transformationnel dont le temps et la focalisation sont limités. Ce doit être un visionnaire entrepreneurial, un stratège d’entreprise et un leader de l’agenda. Les DSI doivent refuser le rôle de CDO à moins qu’ils soient sûrs d’avoir la capacité et la forte envie de l’exercer correctement. Avec ce que cela comporte comme conséquence directe, à savoir, en particulier, déléguer plus de la moitié de leurs anciennes tâches de DSI. Autre conséquence et non des moindres, qui affecterait toute autre personne interne à l’entreprise accédant à ce poste : le risque inhérent à l’instauration de changements qui peuvent froisser certaines personnes et conduire à quitter l’entreprise dans les deux ou trois ans qui suivent.

Aider à trouver le meilleur allié

Refuser poliment le rôle et aider les dirigeants à trouver le profil idéal est éventuellement un meilleur calcul. Si le PDG décide de recruter un directeur du numérique, la recherche doit se concentrer sur des responsables issus d’entreprises qui sont déjà numériques : les géants du numérique, ou celles qui ont déjà des CDO. Les agences de conception numérique, les opérateurs de télécommunications et les fournisseurs de technologies sont d’autres viviers possibles. Des candidats internes peuvent être choisis parce qu’ils apparaissent moins menaçants vis-à-vis des modèles économiques existants. Mais ce n’est pas forcément indiqué, car si l’entreprise choisit d’entamer une transformation numérique, elle doit s’engager pleinement dans ce changement. Toutefois, des responsables aux multiples talents et hautement estimés qui approchent de la retraite peuvent tenir ce rôle s’ils possèdent une pensée de rupture et de prise de risques. Le choix d’une personne externe, qui n’aura pas d’intérêt particulier à conserver les façons de faire actuelles, facilitera naturellement les changements.

Soutenir l’action du CDO

Le DSI a tout intérêt à soutenir le directeur du numérique sur les plans personnel, politique et matériel, à l’encourager à étendre son champ d’action le plus loin possible, à créer une stratégie d’économie numérique complète. Toutes choses dont il bénéficiera le moment venu, d’autant plus que le CDO aura soutenu son rôle de « bon » DSI au cours de la transformation numérique. En effet, plus l’entreprise est avancée dans sa transformation numérique, plus le DSI a tendance à être rattaché directement au PDG. Si le couple DSI-CDO a bien fonctionné, le DSI aura gagné en crédibilité dans des fonctions qui dépassent le support traditionnel. Il deviendra alors l’héritier naturel de la direction du numérique dans l’entreprise une fois le CDO parti.

Par Mark Raskino (photo) et Tomas Nielsen, Gartner

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