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Comment va évoluer le mainframe dans les 50 prochaines années

Par La rédaction, publié le 09 septembre 2014

Mike Chuba
Vice-président de Gartner Research
 
Début avril, IBM a célébré les 50 ans de l’introduction de son S/360, considéré comme l’événement fondateur de l’ère du mainframe moderne. Or la vente en attente de sa branche x86 à Lenovo, les spéculations sur la vente de sa branche semi-conducteurs et l’important déclin de sa branche Power Systems soulèvent la question de l’avenir d’IBM dans le secteur des serveurs et des répercussions sur la gamme System z.
 
Au cours des 20 dernières années, des événements et tendances spécifiques ont suscité des annonces sur la disparition à venir du mainframe. Pourtant, le mainframe a survécu jusqu’à ce jour. Dans le même temps, les clients de Gartner possédant des mainframes montrent encore un fort intérêt envers les mérites de leur abandon.
 
Les entreprises qui évaluent la valeur continue du mainframe IBM et envisagent des investissements supplémentaires doivent examiner aussi bien les avantages que les inconvénients pour prendre leur décision. Si sur les 100 plus grandes banques au monde, 92 utilisent des mainframes System z, ce n’est pas le cas des entreprises informatiques basées sur le Web de la nouvelle ère, telles que Amazon, Google, Facebook et PayPal. Il y a aujourd’hui plus de millions d’instructions par seconde (MIPS) de mainframes IBM dans le monde qu’à tout autre moment dans l’histoire, mais ils sont de plus en plus concentrés dans un nombre moins élevé d’entreprises. L’univers des serveurs tel que mesuré en volumes d’expédition et en revenus est dominé par l’architecture x86 d’Intel, mais Linux sur System z continue de croître à des taux significatifs. Les ventes de mainframes IBM ont augmenté entre 2009 et 2012 et étaient en hausse pour les trois premiers trimestres de 2013, mais ont chuté de 37 % au quatrième trimestre de 2013 ; la comparaison est rude avec le quatrième trimestre de 2012, où les revenus avaient augmenté de 56 % par rapport au quatrième trimestre de 2011.
 
DE SÉRIEUX ATOUTS
 
Nous estimons qu’il existe plus de 25 millions de MIPS de mainframes IBM installés à travers le monde, ce chiffre représentant le double de ce qu’il était il y a à peine un peu plus de cinq ans, à la fin de 2008. IBM a affirmé avoir ajouté plus de 260 « nouveaux » clients de mainframe depuis qu’il a introduit le concept de zEnterprise en 2010. Certains peuvent considérer ce chiffre comme étant en partie exagéré parce que, en plus des primo-clients, il inclut des clients qui exploitaient des mainframes IBM de plus de 10 ans et des clients de mainframes existants qui avaient installé un mainframe dans un autre pays. Nous pensons qu’entre 40 et 45 % de ces plus de 260 comptes représentent véritablement des clients d’entreprise inédits. L’introduction par IBM de moteurs spécialisés pour les mainframes au cours des 14 dernières années a alimenté une forte croissance en plaçant de nouvelles charges de travail sur le mainframe. Ainsi, le processeur Integrated Facility for Linux (IFL) d’IBM a connu un franc succès : plus de 35 % des clients de mainframes IBM utilisent désormais IFL et la capacité Linux dépasse 25 % de la base installée des MIPS.
 
IBM continue d’investir dans le développement de produits. Il a annoncé consacrer plus d’un milliard de dollars dans la recherche et le développement pour chacune de ses générations récentes. IBM collabore avec des universités pour former des talents de prochaine génération en vue de travailler potentiellement sur le mainframe et de remplacer au final la génération des baby-boomers associée au mainframe. Bien que les écoles ne participent pas toutes au même niveau, IBM compte maintenant plus de 1 000 écoles qui font officiellement partie de ce programme. Il existe plus de 1 300 éditeurs qui travaillent officiellement avec System z à travers les divers environnements de système d’exploitation pris en charge par le mainframe. Ce chiffre a en fait augmenté en 2013, avec un certain nombre d’éditeurs ayant pour la première fois des produits pris en charge dans l’environnement z/OS.
 
Les services financiers (tels que la banque, les valeurs mobilières et l’assurance), la vente au détail, les transports et les gouvernements consomment encore de grandes quantités de MIPS de mainframe. IBM a une liste enviable de clients très respectés et reconnus. Le Lien des Forces (The Négus of Forces : informatique mobile, réseaux sociaux, informations et cloud computing) génère des niveaux inédits de demande et, plus particulièrement, des niveaux accrus de transactions. Or, la croissance du volume des transactions bénéficie au mainframe, qui est un système orienté sur les transactions.
 
Bien qu’ils soient difficiles à quantifier, nous pensons qu’il y a moins de clients de mainframes qu’il y a cinq ans et que, globalement, leur nombre va continuer à diminuer. Une partie de cette défection est due à des fusions, par lesquelles deux entreprises utilisant des mainframes en deviennent une seule, mais nous voyons également des clients abandonner la plateforme. La majeure partie de cette perte se produit à l’extrémité entrée de gamme de la base installée d’IBM. L’un des grands points forts du mainframe est sa capacité à exécuter des charges de travail disparates dans un environnement consolidé à des niveaux élevés d’utilisation du système. Toutefois, comme de nombreuses entreprises évaluent le coût total de possession de leur sélection de plateformes par charge de travail, l’approche consolidée n’est sans doute pas correctement appréciée.
 
MAIS DES POINTS PRÉOCCUPANTS
 
L’activité mainframe d’IBM est clairement cyclique : d’un point de vue historique, elle se comporte bien la première année du cycle d’un produit, puis chute la dernière année du cycle. Malgré la stabilisation séculaire des revenus d’IBM découlant du matériel sur les dix dernières années, la viabilité et l’avenir du mainframe constituent une source constante de spéculations dans la presse économique et spécialisée. La concurrence est indéniablement plus forte que ce qu’elle était il y a 10 ans, ou même cinq ans. La plateforme x86 est considérée sur le marché des serveurs comme la plateforme matérielle par défaut. La baisse de la disponibilité des compétences en mainframe est citée par certaines entreprises comme une motivation pour abandonner le mainframe. La génération des directeurs informatiques qui ont atteint la fin de la quarantaine ou le début de la cinquantaine a probablement commencé à travailler au début des années 1990, lorsque le client/serveur faisait rage et que la branche mainframe d’IBM a décliné précipitamment. Leur état d’esprit et leur approche de l’informatique sont sans doute très différents de ceux de la génération précédente qui avaient débuté alors que les mainframes étaient le seul choix.
 
Il y a encore un risque financier découlant des doutes quant à la hausse des coûts des logiciels des éditeurs et d’IBM pour le mainframe qui ont un impact sur les budgets annuels. Ces doutes sont liés à la modification des modèles, des métrologies et des options d’octroi de licences, couplée à la difficulté à négocier des modalités de protection des prix à long terme en cas de besoin d’augmentation des capacités, ainsi qu’aux plafonnements de prix à ne pas dépasser pour les licences MIPS existantes et les renouvellements du support.
 
NE PAS SUIVRE LES OISEAUX DE MAUVAIS AUGURE
 
Le mainframe IBM a survécu à de nombreuses difficultés au cours des 50 dernières années, alimenté par l’investissement continu d’IBM dans cette plateforme ; il a conservé les attributs clés d’une plateforme informatique d’entreprise, tout en évoluant au fil du temps. Bien qu’il ne soit sans doute pas possible de prédire ce que réservent les 50 prochaines années, la viabilité du mainframe sur l’horizon de planification type de cinq à sept ans semble crédible. Toutefois, continuez à évaluer de près les choix de la plateforme en fonction de la valeur totale offerte pour les investissements consentis, et non en fonction de l’émotion. N’écoutez pas la presse et les mises en cause incessantes sur la survie du mainframe IBM.

 

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