Vers des entreprises Data Centric

Data / IA

L’entreprise data-centric a encore du pain sur la planche

Par Marie Varandat, publié le 13 janvier 2023

Pour transformer la donnée en valeur, il ne suffit pas de s’entourer des bonnes compétences et de la bonne infrastructure data. Il faut aussi changer les mentalités et réorganiser l’entreprise autour de la donnée. Cette évolution “data-centric” est difficile. Résultat, seulement deux organisations françaises sur 10 utilisent réellement la donnée comme un levier de transformation…

Editeur d’une plateforme d’expériences data, Opendatasoft vient de réaliser une étude sur “les usages de la donnée dans les organisations en France” avec le concours de l’institut de sondage Odoxa.

Riche d’enseignements, elle nous apprend que la majorité des dirigeants sont conscients de l’importance de la data : les trois quarts des décideurs sont convaincus de la place centrale de la donnée dans la prise de décision. La data constitue même un axe de développement important pour 85% d’entre eux, 39% en ont même fait une priorité. Pour autant, « seulement 21 % des organisations (deux organisations sur 10) démocratisent leurs données et peuvent être considérées comme ‘data centric’ », stipule l’étude.

Des freins culturels et organisationnels

Réalisée en octobre dernier auprès de 541 décideurs émanant d’organisations françaises de 50 salariés et plus, l’enquête est d’autant plus intéressante que les retards français en matière d’IT sont souvent imputés à la pénurie de compétences sur le marché, au manque d’outillage et autres contingences techniques.
Or, l’étude montre clairement que la problématique n’est pas technologique : 8 décideurs sur 10 déclarent que leur organisation dispose des ressources nécessaires pour rendre ses données accessibles et encourager leur utilisation. Coté compétences, la majorité des organisations estime également avoir intégré les fonctions de gouvernance des données (68% des organisations), de gestion des accès ou encore de diffusion de la culture et d’acculturation des collaborateurs (65%).

De fait, les freins sont clairement culturels ainsi que le soulignent les résultats de l’étude : 71% des décideurs estiment que la prise de décision est encore basée sur la perception et l’expérience des dirigeants, contre seulement 20% des personnes interrogées qui fondent les décisions sur l’analyse des données.

Dit autrement, la donnée existe, elle est disponible, mais trop peu d’organisations l’utilisent pour élaborer des stratégies. Pour preuve, moins quatre organisations sur 10 ont défini et mis en œuvre une stratégie générale d’utilisation des données alors que plus d’un tiers des organisations renforcent leurs investissements dans les outils de partage des données.

Un partage encore difficile et mal cadré

L’étude met également en évidence des blocages culturels, révélateurs d’une relation individuelle à l’information. Même à l’ère numérique, l’adage « Le savoir, c’est le pouvoir » continue à faire des ravages : pourquoi partager l’information quand elle peut me donner un avantage sur mon collègue, mon partenaire ou mon concurrent ? Les réglementations et la sécurité des données contraignent les entreprises à la prudence mais quand on interroge les dirigeants sur la démocratisation de l’accès à la data, ce ne sont pas les premiers arguments cités.

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De fait, seulement 35% des organisations interrogées ont établi une stratégie de partage systématique des données nécessaires aux salariés pour accomplir leur mission. Pour la moitié des décideurs, certaines informations sont trop confidentielles pour être partagées. Dans le sillage de cette réticence, seuls 65% des salariés susceptibles d’utiliser les données peuvent y accéder sans contrainte.

Quant à partager les données avec les partenaires ou les clients, moins de la moitié des organisations l’envisage ou la pratique. Preuve que les mentalités évoluent peu sur le sujet : en 2018, une étude commanditée par la Commission Européenne révélait qu’un peu moins de 40% des entreprises interrogées étaient engagées dans des démarches de partage de données avec d’autres entreprises (B2B). La possibilité de développer de nouveaux produits – première motivation évoquée par les participants à l’étude – n’arrive pas à balayer les enjeux concurrentiels : en partageant leurs données, les entreprises craignent de perdre un avantage compétitif.

Enfin, autre point intéressant, l’accès aux données dans les organisations reste encore ouvert en priorité aux spécialistes de la data (développeurs et responsables informatiques).

De grandes disparités selon les secteurs et la taille des organisations

Une fois n’est pas coutume, il est important de souligner que le secteur public n’est pas forcément à la traine : 42% des organisations publiques estiment que le partage des données est un enjeu prioritaire, contre 37% dans le privé.

La taille de l’organisation ainsi que le secteur d’activité influe également sur la perception de la valeur de la donnée. Ainsi, le secteur des services est particulièrement sensible à l’apport de la donnée en matière de transformation digitale : 91% estiment que c’est un aspect essentiel de la transformation digitale contre 82% pour la moyenne nationale. Dans le secteur de l’industrie, la donnée est synonyme d’innovation et de création de nouveaux usages (85% contre 77% pour la moyenne nationale).

De manière générale, les organisations de plus de 5000 salariés sont particulièrement sensibles aux enjeux de la data : 84% de leurs dirigeants sont convaincus que l’utilisation des données fait gagner en transparence pour renforcer ses relations avec ses parties prenantes internes et externes contre 76% pour toutes les tailles confondues. Le sentiment d’être en avance sur la moyenne nationale est aussi plus présent (41%) et c’est également dans ces organisations de plus de 5000 salariés que la prise en compte systématique des données à disposition des collaborateurs a plus de poids.

Reste que pour 80% des décideurs de ces organisations, les décisions relatives aux données sont prises en comité de direction ou à la direction générale. Preuve que la démocratison des données a encore un long chemin à parcourir, y compris dans les organisations ouvertes au partage…

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