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Nutanix Enterprise Cloud Index 2025 : la France accélère, l’IA générative s’impose
Par Laurent Delattre, publié le 02 juillet 2025
La dernière édition de l’Enterprise Cloud Index de Nutanix met en évidence l’ancrage quasi total des conteneurs et l’ascension rapide de l’IA générative dans les stratégies IT. Les entreprises françaises y apparaissent étonnamment plus matures que la moyenne mondiale (oui, c’est une bonne nouvelle), conjuguant Kubernetes, sécurité et souveraineté pour moderniser leurs infrastructures à l’ère de l’IA.
Pour la septième année consécutive, Nutanix publie son Enterprise Cloud Index (ECI). Cette étude annuelle ambitionne de mesurer l’évolution des stratégies cloud des entreprises à l’échelle mondiale. Réalisée par Vanson Bourne auprès de 1 500 décideurs IT et DevOps répartis dans plusieurs régions du monde, cette enquête propose un panorama des tendances IT du moment, tout en servant bien évidemment et inévitablement de support à la stratégie commerciale de Nutanix (personne n’est dupe). En un sens, le Nutanix ECI éclaire surtout les tendances sur lesquelles investit l’éditeur.
Et si les précédentes éditions se concentraient principalement sur l’adoption du cloud hybride, les défis de migration tout en cherchant à démontrer l’existence d’une vague de rapatriement des workloads cloud vers le « on-premise » façon cloud privé, cette septième mouture se démarque avec d’intéressants constats sur l’adoption des containers et l’ampleur prise par l’IA générative dans les stratégies des DSI. Elle reflète ainsi la transformation profonde des priorités des entreprises. Et, de manière générale, elle mène aussi au constat que la conteneurisation est devenue un passage obligé pour supporter la GenAI.
Conteneurisation : la France en tête
Alors que la conteneurisation s’est généralisée à l’échelle mondiale en 2025, avec 90 % des organisations mondiales engagées dans la démarche et 54 % indiquant avoir déjà conteneurisé l’ensemble de leurs applications qu’elles soient nouvelles ou existantes, la France se distingue par une adoption encore plus massive. Toutes les entreprises françaises sondées affirment avoir initié des projets de conteneurisation, et près d’un tiers (29 %) appliquent systématiquement ce modèle à chaque nouveau développement.
L’organisation des environnements Kubernetes montre également une spécificité française : 93 % des DSI en France opèrent plusieurs clusters Kubernetes, contre 80 % au niveau mondial. De plus, la moitié des entreprises françaises (51 %) privilégient un double environnement (multi-cluster), alors que cette pratique concerne 36 % du panel international.

Cette adoption massive s’explique par les bénéfices perçus : 94% des répondants mondiaux (99% en France) estiment que leur organisation tire profit de l’adoption d’applications cloud-natives et de conteneurs. Toutefois l’étude révèle un écart significatif de perception entre les dirigeants C-level, qui surestiment souvent le niveau réel de conteneurisation de leur organisation, et les équipes opérationnelles qui font face aux défis quotidiens de cette transformation. Un bémol qui a son importance.
Car cette dynamique ne doit pas gommer pas les défis rencontrés. Ainsi, 85 % des décideurs français estiment que leur infrastructure n’est pas encore totalement adaptée pour soutenir efficacement les charges de travail cloud-natives, une proportion supérieure à la moyenne EMEA (79 %). Les principaux obstacles cités restent la fragmentation des données en silos et la difficulté à assurer la portabilité entre cloud public et infrastructures sur site. En revanche, 80% des répondants français ont estimé posséder toutes les compétences nécessaires pour gérer ces environnements, un chiffre qui paraît de prime abord très élevé mais reste cohérent avec les insights donnés plus haut.

IA Générative : un réel enthousiasme… prudent !
Mais s’il faut retenir une chose de ce Nutanix ECI 2025, c’est bien la progression endiablée de l’IA générative. On peut ici clairement parler d’emballement mondial : 85 % des organisations déclarent avoir déjà mis en place une stratégie dédiée, 55 % l’exécutant déjà.
Et, une fois encore, la France sur-performe : 90 % des entreprises françaises interrogées disposent d’une feuille de route IA et 57 % sont en phase de déploiement actif.

Les objectifs poursuivis sont ambitieux : augmentation de la productivité (57%), automatisation accrue (51%) et réduction des coûts opérationnels (38% mondial).
La France se démarque avec des cas d’usage actuels qui diffèrent peu du reste du monde. Les répondants français placent l’assistance client (où l’IA sert à automatiser le traitement des demandes, à générer des réponses personnalisées ou à améliorer la qualité des interactions) et la cybersécurité (pour la détection proactive des incidents et l’analyse automatisée des menaces) au premier plan de leurs initiatives « GenAI » tout en manifestant un intérêt plus marqué que dans le reste du monde pour d’autres applications comme l’automatisation des processus métiers, la gestion documentaire intelligente et l’aide à la décision.

Et si le reste du monde reconnaît que le retour sur investissement reste incertain à court terme, l’Hexagone semble plus optimiste sur un ROI positif à moyen terme : 70 % des groupes mondiaux espèrent un retour sur investissement sous trois ans alors que 88 % des répondants français partagent cet horizon. Les responsables français ne sont cependant que 30 % à exiger des gains dès la première année, signe d’une patience budgétaire plus grande que la moyenne EMEA (38 %).
Comme ailleurs, l’effet « Lune de miel » cache des investissements douloureux : 98 % des DSI français anticipent une hausse de dépenses IT liée à GenAI, et 45 % jugent indispensable de former leurs équipes, un niveau proche du global (52 %).
Sécurité et souveraineté : la face sombre du boom
La montée en puissance de GenAI exacerbe les tensions réglementaires. En France, 96% des répondants placent la confidentialité des données au premier plan de leurs projets d’IA générative, tandis que 98% admettent que leur organisation pourrait en faire davantage pour sécuriser ses modèles et ses applications IA.
Cette inquiétude se traduit concrètement : à l’échelle internationale, l’intégration avec l’infrastructure IT existante constitue le principal défi lors du passage de l’IA générative du développement à la production, suivi de près par le manque de compétences (53%) et les questions de visibilité sur les coûts et le ROI (52%).
Près de la moitié des organisations mondiales déclarent, par ailleurs, devoir recruter pour soutenir leurs efforts de mise en œuvre de l’IA et la France n’est pas en reste : 67 % des entreprises françaises cherchent actuellement des spécialistes IA, 75 % ciblent les compétences « cloud-natives ».

Alors, oui, bien sûr, si l’Enterprise Cloud Index de Nutanix offre des éclairages intéressants sur l’évolution du marché, il sert aussi les intérêts commerciaux de son commanditaire. Les conclusions sur la nécessité de moderniser les infrastructures, d’investir dans des plateformes unifiées et d’adopter des solutions d’orchestration sont bien alignées avec la stratégie actuelle de Nutanix. Difficile de savoir si Nutanix calque sa stratégie sur son étude ECI ou si l’étude tend à éclairer ce que Nutanix met en œuvre. Un peu des deux sans doute, l’étude donnant parfois l’impression de confondre adoption de technologies et bénéfices Nutanix.
Reste que sur le fond, la conteneurisation et l’IA générative représentent effectivement des évolutions majeures du paysage IT que cette étude a le mérite de quantifier. Elle rappelle la complexité croissante des environnements IT, le défi permanent des compétences et l’équilibre délicat entre innovation et sécurité tout en offrant une vue par pays assez éclairante. Un contexte dans lequel la prudence française sur les délais de ROI à court terme et l’accent mis sur la sécurité apparaissent, une fois n’est pas coutume, comme des signes de maturité plutôt que de frilosité.
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