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Generative Engine Optimization : le jeu du référencement a changé

Par Thierry Derouet, publié le 03 octobre 2025

L’époque où l’on se battait pour grimper en haut de la page Google touche à sa fin. Désormais, ce n’est plus la position dans la SERP qui compte, mais la mention dans une réponse générée par une IA. Alors que ChatGPT a réduit de 52 % le trafic référent vers les sites en un mois à l’été 2025, que Perplexity dépasse les 780 millions de requêtes mensuelles, et que Google expérimente ses AI Overviews, le DSI doit apprendre à son CMO un nouveau langage : celui de la citabilité.

Pendant vingt ans, nous avons mesuré des clics. Désormais, c’est le nombre de citations qui compte. Le référencement change de nature : au-delà du SEO (Search Engine Optimization), il faut parler de GEO, pour Generative Engine Optimization. Car en 2025, l’utilisateur ne voit plus une liste de liens, mais une réponse rédigée par un modèle de langage. Trois ou quatre sources apparaissent parfois en bas, mais le plus souvent, il n’y a plus de clic.

Le DSI, face à son CMO, doit dire les choses simplement : la vitrine numérique n’est plus une page de résultats, c’est une réponse. Et dans cette réponse, soit la marque est citée, soit elle disparaît.

Un basculement mesurable dans les comportements

Le déplacement des usages est chiffrable. Adobe a observé que, de juillet 2024 à mai 2025, le trafic généré par les interfaces IA vers les sites de e-commerce américains a bondi de plus de 3 000 % (×35 dans le retail, ×32 dans le voyage). Autrement dit, les utilisateurs ne passent plus par Google pour aller vers un site, ils passent par une IA qui décide de citer ou non.

Mais ce trafic est désormais redistribué. Une analyse menée par Josh Blyskal (Profound), relayée par Search Engine Land, montre qu’entre le 21 juillet et le 20 août 2025, ChatGPT a réduit de 52 % ses renvois vers les sites. La majorité des citations s’est concentrée sur Reddit et Wikipedia, deux plateformes jugées plus « answer-first », c’est-à-dire capables de donner immédiatement la réponse attendue. Pour le reste du web, l’audience s’est évaporée.

Les comportements confirment cette recomposition. Selon Pew Research, lorsqu’une réponse générative est affichée, seuls 8 % des utilisateurs cliquent sur un lien, contre 15 % lorsqu’il n’y a pas de résumé IA. Digital Content Next estime la perte moyenne de trafic pour les sites médias à 34,5 % dès qu’un aperçu généré est présent. Même une première place sur Google peut donc ne plus rien rapporter.

Et ChatGPT n’est pas seul. Perplexity, qui se définit comme un « answer engine », a dépassé les 780 millions de requêtes en mai 2025, avec une croissance mensuelle estimée à 20 %. Mais, selon Forbes, les moteurs IA (OpenAI, Perplexity) envoient 96 % de trafic en moins aux sites de presse et de blogs que les moteurs traditionnels. Le New York Times est même allé jusqu’à adresser une mise en demeure à Perplexity, l’accusant de reprendre ses contenus sans attribution suffisante.

Google vs ChatGPT : une question d’échelle… et de trajectoire

Le comparatif des volumes souligne l’ampleur du phénomène. Google traite encore plus de 5 trillions de recherches par an, soit 14 à 16 milliards de requêtes par jour (Search Engine Land, Exploding Topics). À titre de contraste, ChatGPT recevait déjà 2,5 milliards de prompts quotidiens à l’été 2025, contre environ 1 milliard en début d’année (The Verge). L’écart reste conséquent : Google capte dix à quinze fois plus de requêtes. Mais la dynamique est frappante : en quelques mois, ChatGPT a plus que doublé, et Perplexity s’installe comme un acteur de masse.

La domination de Google n’est pas remise en cause, mais la croissance des IA conversationnelles déplace l’attention. Ce qui comptait hier — grimper dans la SERP — cède la place à un nouvel impératif : être présent dans la réponse générée.

OpenAI, entre promesse de citation et réalité des flux

OpenAI a bien conscience de l’enjeu. À l’été 2024, l’entreprise a dévoilé un prototype baptisé SearchGPT, avec une promesse claire : montrer des citations en ligne et des colonnes de sources pour relier l’utilisateur aux éditeurs. Quelques mois plus tard, ChatGPT Search a été intégré, avec l’assurance que l’assistant affichait des liens pertinents quand il naviguait sur le web. En parallèle, OpenAI a signé des accords avec de grands éditeurs (Washington Post, Guardian, Future/TechRadar, Axel Springer, The Atlantic), promettant des extraits et des liens visibles dans l’interface.

Mais sur le terrain, la pratique reste inégale. Les citations ne s’affichent pas toujours de manière cohérente, surtout en dehors du mode « search ». Pour une marque, cela veut dire une chose : ne jamais présumer que la citation est automatique. La seule garantie reste d’avoir un contenu clair, stable, sourcé et citable.

La citabilité, ou comment écrire pour être repris

C’est ici que le DSI doit changer la grammaire du CMO. Dans le monde du GEO, l’important n’est plus le positionnement, mais la citabilité. Qu’est-ce qui rend une page citable ? D’abord, la présence d’une réponse directe : un chiffre, une définition, une norme, un cas d’usage concret. Ensuite, la cohérence : un produit doit porter le même nom sur tous les supports, un indicateur doit garder la même valeur dans tous les documents. Enfin, la fraîcheur : une page obsolète est une page invisible.

Ce qu’il ne faut plus faire est presque aussi parlant. Ne pas cacher la réponse derrière un formulaire. Ne pas commencer un article par trois paragraphes de storytelling avant d’entrer dans le sujet : l’IA cite celui qui répond en premier. Ne pas multiplier les versions contradictoires d’un même chiffre ou les appellations divergentes d’un produit. Ne pas produire de contenus trop courts, sans contexte ni source : une IA préfère toujours une ressource encyclopédique à un post-it marketing.

Vers un nouveau dialogue entre DSI et CMO

Le CMO a ses repères : CTR, taux de conversion, part de voix médias. Le DSI doit en proposer de nouveaux : taux de citation dans les réponses IA, part de voix générative par rapport aux concurrents, qualité des mentions (sommes-nous cités comme référence principale ou en note). Ces indicateurs ne remplacent pas le SEO, ils le prolongent. Le SEO reste le socle ; le GEO est sa déclinaison dans un monde où la réponse remplace la page.

Conclusion : réécrire pour être cité, ou disparaître du discours

Le GEO n’abolit pas le SEO, il en déplace le centre de gravité. C’est encore le contenu qui fait la visibilité, mais ce contenu doit être pensé pour habiter les réponses IA. Pour le dire au CMO : nous ne devons plus seulement écrire pour séduire un lecteur, nous devons écrire de façon à ce qu’une machine nous trouve citables, vérifiables et cohérents.

Ce changement est profond. Il demande de revoir les rituels de publication, de tenir un registre de vérité pour les noms et les chiffres, de rédiger avec un souci de précision qui ne sacrifie pas la fluidité. Les CMO qui parviendront à traduire cette exigence en stratégie donneront à leurs marques une longueur d’avance. Les autres, peu à peu, sortiront du champ de vision. Car dans un monde où l’IA raconte la réponse, ne pas être cité revient simplement à ne pas exister.


Adobe LLM Optimizer ou comment s’outiller pour passer du SEO au GEO


Le 1ᵉʳ octobre 2025, à la Maison de la Chimie à Paris, Adobe a présenté devant un public de CMO son outil LLM Optimizer, déjà annoncé à Cannes Lions. Intégré à Adobe Experience Manager, il introduit une nouvelle métrique stratégique : la part de voix générative.

Concrètement, LLM Optimizer agit comme un tableau de bord en temps réel. Il montre où, quand et comment une marque est citée par des moteurs comme Google AI Overviews, ChatGPT Search, Perplexity ou Copilot. Il compare cette visibilité avec celle des concurrents, repère les thématiques où l’entreprise est absente, et propose des actions correctives très concrètes : enrichir une FAQ, harmoniser une terminologie, ajouter une source primaire, corriger une métadonnée ou structurer une page en mode HowTo/FAQ. Grâce à son intégration avec Adobe Experience Manager Sites et GenStudio, ces ajustements peuvent être appliqués immédiatement, sans rupture de workflow.

À l’Adobe Summit France, l’IA générative fait entrer les marques dans l’ère du GEO : dépasser le SEO pour exister dans les réponses des IA et offrir une expérience client personnalisée à grande échelle.

À l’Adobe Summit France, l’IA générative fait entrer les marques dans l’ère du GEO : dépasser le SEO pour exister dans les réponses des IA. Mais également démontrer comment offrir une expérience client personnalisée à grande échelle. 

Mais au-delà de l’outil, Adobe relie ce lancement à une vision plus large dévoilée lors de l’Adobe Summit 2025 : celle de l’IA agentique. LLM Optimizer s’inscrit dans une logique d’orchestration, où un “Agent Orchestrator” coordonne différents agents — certains conçus par Adobe, d’autres issus d’écosystèmes tiers — pour automatiser la production, la personnalisation et le suivi des contenus marketing. Le bénéfice clé pour les entreprises est double : reprendre la main sur leur visibilité dans les moteurs IA et réallouer leurs équipes vers le stratégique plutôt que vers la correction manuelle et répétitive.

Dans ce nouvel environnement, le passage du SEO au GEO n’est plus une option technique, mais un chantier stratégique où la mesure, l’orchestration et l’exécution convergent.


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