Gouvernance
Short S2E32 — Régulation numérique : Trump hausse le ton face à Bruxelles
Par Alessandro Ciolek, publié le 18 décembre 2025
Le Bureau du représentant américain au commerce a publié une liste d’entreprises européennes, dont le français Mistral, susceptibles de subir des sanctions si l’Union européenne maintient sa régulation du numérique. Une escalade inédite dans le bras de fer transatlantique.
L’escalade entre Washington et Bruxelles sur la régulation du numérique vient de franchir un nouveau palier. Dans un communiqué publié le 16 décembre sur X, l’Office of the United States Trade Representative (USTR) a menacé l’Union européenne de représailles commerciales si elle persiste à appliquer ses réglementations numériques contre les entreprises américaines. Sans être précisément cité, le cœur du différend repose sur le Digital Markets Act (DMA) et le Digital Services Act (DSA), deux piliers de la régulation européenne du numérique entrés en vigueur depuis 2023.
Régulation numérique : amendes records
Ces textes ont conduit Bruxelles à infliger des amendes substantielles aux géants américains. Cette année, par exemple, Apple a écopé de 500 millions d’euros d’amendes pour ses pratiques restrictives sur l’App Store. Pour Meta la facture est montée à 200 millions d’euros pour son modèle « consentir ou payer ». Le gros lot a été réservé à Google qui doit s’acquitter de près de 3 milliards d’euros pour pratiques abusives.
Des entreprises européennes dans le collimateur
Si ces menaces ont un goût de déjà vu, c’est la première fois que l’administration américaine a désigné nommément des entreprises européennes susceptibles de faire l’objet de sanctions. Accenture, Amadeus, Capgemini, DHL, Mistral, Publicis, SAP, Siemens et Spotify figurent sur cette liste. Ces groupes, fortement implantés aux États-Unis, pourraient se voir imposer des taxes supplémentaires ou des restrictions d’accès au marché américain. Pour les entreprises européennes visées, l’enjeu est considérable. Mistral, la pépite française de l’intelligence artificielle, réalise environ 20 % de son chiffre d’affaires annuel récurrent outre-Atlantique, soit près de 60 millions d’euros. Le cas de Spotify est encore plus préoccupant : 40 % des revenus du géant suédois du streaming proviennent du marché américain. Capgemini et Publicis, deux fleurons français des services numériques et de la communication, y réalisent également une part majeure de leur activité, les États-Unis constituent même le premier marché de Publicis.
Des sanctions déjà en tête
Si la nature exacte des mesures de rétorsion reste inconnue, l’USTR a précisé que « la législation américaine autorise, entre autres, l’imposition de taxes ou de restrictions sur les services étrangers ». L’administration a également indiqué qu’elle adopterait une approche similaire envers tout pays qui poursuivrait « une stratégie de type européen dans ce domaine ». Le combat que se livrent Bruxelles et Washington monte donc à nouveau d’un cran. Plus le temps passe, plus l’amitié euroaméricaine s’efface.
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