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La collaboration à l’heure du travail hybride
Par La rédaction, publié le 17 août 2022
Le management visuel orchestre la coopération à distance
Ils permettent de mieux communiquer l’information, de se coordonner au sein des équipes et de mieux collaborer en mode synchrone : avec la crise, les outils de management visuel ont gagné en popularité. Ils ne répondent cependant pas tous aux mêmes enjeux.
Vont-ils devenir une brique centrale du mode de travail hybride ? Avec le télétravail imposé par la crise sanitaire, les outils de management visuel se sont en tout cas invités dans les pratiques de travail des organisations, pour coordonner l’activité des équipes à distance, faciliter le partage d’indicateurs clés en temps réel, ou collaborer en mode synchrone dans le cadre d’ateliers en ligne. « Sur les 18 derniers mois, dix millions de workshops ont été organisés sur notre plateforme, témoigne ainsi Matthieu Beucher, PDG et fondateur de Klaxoon. Avant la crise, nous n’intéressions pas grand-monde, reconnaît-il. On trouvait notre solution bien, mais cela en restait là. »
En matière de collaboration, l’adoption de ces outils est sans doute le fait le plus marquant de la période. Auparavant, l’usage d’une simple gestion de tâches sur une plateforme collaborative généraliste pouvait être considéré comme un signe de maturité numérique. À la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam), par exemple, l’outil de gestion de tâche proposé par le réseau social d’entreprise Jamespot qui outille l’organisme est, certes, utilisé pour les projets. Mais il sert aussi à l’animation d’équipe. « Avec le confinement, beaucoup de managers se sont emparés de l’outil de gestion de tâches pour mieux piloter l’activité dans un contexte de télétravail », témoigne Vanessa Bernon, chargée de mission au cabinet du directeur général de la Cnam.

La catégorie des outils de management visuel n’est pas homogène. Elle peut cependant être analysée sous l’angle de quatre grands cas d’usage : la communication de données, la gestion de processus, la collaboration d’équipe et l’animation de réunion. Les solutions se différencient en fonction de leur niveau de couverture de ces enjeux, la plus généraliste étant iObeya. Pour le premier usage, on trouve des outils orientés data visualisation. Leur vocation est de rendre une information lisible et compréhensible rapidement. Ils se distinguent par leur capacité à se connecter à tout type de source de données. Tableau, Power BI, Toucan Toco et Pingview font partie de ces spécialistes. La solution du dernier, par exemple, remplace les tableaux d’affichage des sites de production par des écrans tactiles. Elle fournit toutes les informations nécessaires à l’activité dans un wallboard (système d’affichage mural) interactif, alimenté par des données pouvant provenir d’outils métier et collaboratifs (Sharepoint, Google, Trello, etc.) ainsi que de capteurs industriels. De son côté, Toucan Toco se distingue par son approche « storytelling ». Chaque indicateur est conçu comme une histoire, afin qu’il soit mieux compris et assimilé. L’outil de création d’histoire permet notamment de préciser le contexte, ou encore d’ajouter un glossaire et des liens vers des graphiques.
L’usage de gestion de processus répond, lui, aux enjeux de coordination d’équipe. Les solutions se caractérisent par leurs capacités à informer et notifier sur l’avancement d’un projet et à mettre en place des processus. Parmi les acteurs davantage spécialisés sur cette dimension, on compte Asana, Jira, Kantree, Monday. L’interface de la première est un standard du marché, avec ses espaces projet articulés autour des tâches assignées aux membres d’une équipe. Asana joue aussi la carte de la connexion à d’autres environnements. Il est possible de créer des tâches depuis Teams, Zoom, Jira, Salesforce, Outlook ou Gmail. Étoile montante du secteur, Monday permet de créer des tableaux pour gérer les flux de travail en interconnectant les différentes activités. Comme Asana, l’éditeur peaufine son articulation à d’autres outils. On peut travailler sur un tableau Monday dans un canal Teams, créer une activité à partir d’un message Gmail ou Outlook, lui ajouter un document stocké dans Google Drive, Sharepoint ou Dropbox.
Collaborer en synchrone et asynchrone
Troisième grand cas d’usage, la collaboration d’équipe se concrétise dans le « board », un tableau numérique sur lequel on intègre les contenus de travail de l’équipe (documents, médias, etc.) et dispose de fonctions pour faciliter la co-construction (sondages, votes, modèles d’ateliers, etc.). Quant à l’enjeu d’animation de réunion, il passe par la mise à disposition de l’animateur d’outils pour renforcer la participation aux réunions. Un certain nombre d’acteurs couvrent particulièrement ces deux derniers cas d’usage en même temps, tels Beekast, Klaxoon, Miro, Mural ou Yellow.

Avec sa nouvelle solution Workshop Platform, Klaxoon, par exemple, fusionne les deux dimensions. Le board permet aux équipes en contexte hybride de collaborer de manière synchrone, en réunion, ou asynchrone. Pour animer les réunions, une centaine de modèles prêts à l’emploi sont proposés, du simple « brise-glace » (icebreaker en anglais) à la matrice d’analyse stratégique, en passant par la session de brainstorming ou les modes de gestion de projet agile. « Les réunions souffrent d’un manque de prise de décision et de participation. Avec le mode hybride, cette situation s’accentue, dans un contexte où il faut décider toujours plus rapidement, explique Matthieu Beucher. L’enjeu est donc d’aider à mieux faire participer les personnes, de faciliter la décision collective, que tout le monde soit en phase et que la décision se diffuse rapidement dans la chaîne managériale. » Klaxoon génère automatiquement le compte-rendu d’une réunion, mais il dispose aussi d’un format, Mémo, pour créer un résumé interactif, via lequel les destinataires peuvent poser des questions ou bien être sondés et invités à participer à un quiz.

Pour trouver dans cette offre la solution adaptée, le cabinet de conseil Lecko a identifié quatre critères. Le premier est le niveau de collaboration souhaitée. Alors qu’un tableau blanc interactif permet d’impliquer librement tous les acteurs, un outil centré animation sera davantage destiné à un usage plus cadré. Deuxième critère : la liberté offerte dans la création et la gestion de l’espace. Là encore, un tableau blanc permettra de modéliser tout processus, quand une solution comme Kantree et Jira demanderont plus d’efforts. La fréquence de consultation constitue le troisième critère. Un espace de collaboration créé dans un tableau blanc de type Yellow pour animer une réunion n’aura pas la même durée de vie qu’un tableau Miro, fait pour servir de référence à un processus se déroulant dans le temps. Enfin, l’échelle du projet doit aussi entrer en ligne de compte. Le tableau de type Kanban comme Trello, bien adapté à la collaboration restreinte à une équipe, ne conviendra pas à un projet à grande échelle, nécessitant des méthodologies plus structurées. « Mais le vrai sujet, c’est de questionner le mode de fonctionnement de l’organisation, estime Bastien le Lann, directeur chez Lecko. L’ADN de ces plateformes, c’est l’agilité, on gère non plus des personnes, mais des activités, ce qui suppose que les échanges et la relation de travail reposent sur la confiance. Faute de s’interroger sur la question, ce type de solutions n’apporte pas de bénéfices », conclut-il.
