Nouvelle Feuille de route de la DINUM

Gouvernance

Une nouvelle feuille de route pour la Dinum

Par Laurent Delattre, publié le 30 mars 2023

Le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques, sous l’autorité duquel est placée la DINUM, a donné un nouveau cap qui se veut plus ambitieux au numérique public et à la direction interministérielle qui le pilote.

La toute puissante DINUM (direction interministérielle du numérique) s’est vue récemment définir une nouvelle feuille de route pour redéfinir la stratégie numérique de l’État afin de moderniser les infrastructures informatiques et services numériques pour mieux servir l’efficacité de l’action publique.

Cette nouvelle feuille de route s’appuie sur un certain nombre de constatations autour de choses qui ne fonctionnent pas, en termes plus diplomatiques de « frictions avec l’organisation administrative ».

Ce qui ne va pas…

Ainsi, le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques, piloté par Stanislas Guerini, note la difficulté actuelle de financer durablement des produits numériques dans une administration trop fortement structurée dans une logique « projet/maintenance » qui voit le numérique comme un coût plutôt que comme un levier d’efficacité.

Il note également la « difficulté d’entretenir une relation de co-construction numérique des politiques publiques » notamment parce que les projets sont d’abord perçus comme des projets de dématérialisation et non comme des projets de services.

Il relève aussi un portefeuille de produits numériques qui reste peu lisible, avec des doublons ainsi que des recouvrements avec des offres ministérielles.

Enfin, il constate la difficulté à fidéliser des talents du numérique du fait de règles administratives variées : plafonds d’emplois, contrats, délais de recrutement… Or, selon le ministère, le recours à la prestation peut coûter jusqu’à près de deux fois le coût d’un agent public ! Mais il constate également que la lourdeur de certains processus administratifs limite la capacité de recrutement de l’État.

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Une feuille de route ambitieuse

De ces constatations est née une nouvelle feuille de route qui met l’accent sur 4 priorités définies pour conduire l’action de la DINUM :

1 – Engager une mutation profonde des organisations publiques

Objectif affiché : mettre en place des équipes pluridisciplinaires intégrées plutôt que les équipes en silos actuelles. La DINUM doit s’inspirer de l’approche « Start-ups d’État » de « Beta.gouv » pour multiplier les expérimentations, itérer vite et passer à l’échelle. La DINUM veut privilégier les échéances régulières et des mesures d’impact au fil de l’eau et s’éloigner des principes « solutionnistes » des projets annualisés.
C’est à la DINUM que revient la responsabilité de faire réussir les projets numériques des ministères. Elle a pour mission de maximiser l’impact de ces projets et de diminuer les coûts, mais aussi d’améliorer le design, l’accessibilité, la sécurité, l’écoresponsabilité et l’interopérabilité des différents projets numériques. Son rôle d’animation, de conseil et d’orientation va être accentué.

2- Renforcer significativement les compétences numériques au sein de l’État

Pour mettre en œuvre des politiques publiques rendues plus efficaces grâce au numérique et faire face à l’augmentation des besoins en outils numériques qui en découle, l’État va devoir séduire, embaucher et retenir des talents numériques. Une mission compliquée qui doit s’appuyer sur des projets attractifs et le développement de solutions innovantes.
Dit autrement, la DINUM va endosser le rôle transverse de « DRH de la filière numérique ».

3- Développer l’exploitation effective des données

Objectif : mieux piloter l’action publique grâce à la donnée et en déployant des services innovants et proactifs pour les agents et les usagers.
La DINUM a pour mission de s’inspirer des transformations opérées par les secteurs privés et leurs approches « Data Centric » pour mieux exploiter mais aussi partager les données.
Elle doit valoriser et exploiter les données comme levier d’efficacité de l’action publique en mobilisant des données ouvertes et non ouvertes.
Notamment, la DINUM se voit confier la création d’un « Datalab », un incubateur de projets data doté d’un dispositif juridique, d’une infrastructure technique sécurisée et souveraine, de compétences en IA, et de nouvelles ressources en Data Science.

4- Préserver la souveraineté numérique de l’État

Tout en prenant en compte l’accessibilité, l’écoresponsabilité, les problématiques d’identité numérique et le cloud, la DINUM doit préserver l’indépendance du système d’information de l’État notamment en privilégiant les logiciels libres.
La DINUM va s’engager dans « la structuration d’une offre en tant qu’opérateur de produits numériques interministériels mutualisés, en visant à apporter aux départements ministériels une alternative concurrentielle, évolutive et ergonomique pour les outils de bureautique mais également des outils applicatifs comme les API ».
La feuille de route prévoit que la DINUM va rehausser son niveau de participation aux programmes numériques européens pour notamment disposer d’outils libres et performants.
La feuille de route fixe également à 50€ par utilisateur par an le coût total d’une suite collaborative « à l’état de l’art et plébiscitée par les agents publics ».


Selon le ministère, cette nouvelle feuille de route de la DINUM “est le fruit d’un travail collaboratif associant l’ensemble des parties prenantes du numérique au sein de l’État – directions du numérique, administrateurs ministériels des données, des algorithmes et des codes sources, directions d’administration centrale. Elle prend également en compte les meilleures pratiques du secteur privé comme de nos voisins européens.

Sa concrétisation ne sera pas aisée. Sa lecture révèle également quelques succès de la DINUM mais aussi parfois leur manque de notoriété. On pense par exemple aux services “Nos Gestes Climat”, “Démarches Simplifiées” et ses 2,5 millions de démarches numérisées réalisées par an, “Tchap” et ses 500.000 agents publics qui l’utilisent. D’autres sont plus controversés tels FranceConnect et ses déboires alors que 40 millions de Français y sont inscrits et que 300 millions de connexions par an y sont réalisées.
On rappellera également que la DINUM opère le RIE (Réseau interministériel de l’Etat) sur lequel se connectent plus d’un million d’agents publics depuis 14000 sites pour un coût de 100€ par agent et par an et qui est, selon le ministère, “un exemple clair d’une mutualisation réussie tant sur le plan économique que sur le plan des usages (en facilitant l’interopérabilité des systèmes d’information ministériels)“.

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