EuroHPC transforme son Leonardo en AI Factory avec le projet LISA confié à Eviden

Data / IA

EuroHPC officialise sa seconde “AI Factory” avec le projet d’extension LISA pour le HPC Leonardo

Par Laurent Delattre, publié le 15 mai 2025

L’Europe passe à la vitesse supérieure avec ses “AI Factories” promises par le plan “AI Continent”. À Bologne comme à Sofia, les supercalculateurs européens s’équipent pour l’ère de la GenAI : GPU dédiés à l’IA, architectures modulaires et hubs IA se mettent en place. EuroHPC vient de confier à Eviden la construction d’un “AI Booster” dénommé LISA pour doper les capacités d’entraînement de modèles IA du HPC Leonardo.

À peine un mois après la présentation du plan d’action « AI Continent », la Commission européenne confirme sa détermination et passe à l’exécution. Et il n’y a pas de temps à perdre. Treize « AI Factories » (usines à IA) doivent ouvrir d’ici 2026 pour offrir aux chercheurs et aux industriels de l’UE la puissance de calcul, les jeux de données et l’ingénierie nécessaires à l’entraînement de modèles d’IA avancés.

Bien évidemment, pour concrétiser cette ambitieuse feuille de route, l’Union européenne compte capitaliser sur l’écosystème de supercalculateurs HPC déjà construit par le consortium EuroHPC : dix supercalculateurs ont ainsi été cofinancés ces cinq dernières années, disséminés dans toute l’Europe.

Parmi eux, Leonardo, installé au Technopôle de Bologne et opéré par le consortium italien Cineca, illustre la montée en puissance du Vieux Continent. Ce HPC pré-exascale, livré par Eviden (Atos) sur base BullSequana XH2000, pointe au 9ᵉ rang du TOP500 avec 241,2 Pflops (procurés par une combinaison d’Intel Xeon Platinum 8358 à 32 cœurs et de GPU A100). Il va bientôt pouvoir faire un bon au classement grâce à l’adjonction d’une extension spécialement conçue pour l’IA et l’apprentissage des modèles.

Dénommé LISA (Leonardo Improved Supercomputing Architecture), ce projet d’extension vient relever la barre et s’inscrit dans le plan d’équipement d’infrastructures IA du « AI Continent ».
Il constitue la deuxième initiative pour faire évoluer les équipements existants en « AI Factories » après l’annonce de « Discoverer+ » en avril dernier. Lancé en 2021, le Discoverer est un « petit » HPC du Sofia Tech Park en Bulgarie, qui pointe en 221ème position au TOP500 avec ses 4,5 Pflops. Il avait bien besoin d’un coup de boost, concrétisé par le projet « Discoverer+ » qui lui adjoint une nouvelle partition pleine de GPU. Techniquement, cette partition se compose de 4 systèmes NVidia DGX H200 formant au total un cluster de 32 GPU H200 (animés par 8 processeurs Intel Xeon 8480C).

L’ambitieux projet LISA

Signé pour 28,2 M€, le projet LISA pour le HPC Leonardo a été confié à Eviden. Il consiste, là aussi, à ajouter une partition « dédiée à l’IA » à l’infrastructure existante. Il va doper la puissance de calcul de 100 pétaflops supplémentaires (ce qui n’est en réalité pas très significatif dans ce contexte, cette puissance étant mesurée sur des calculs en FP64 alors que les IA utilisent des calculs en FP32 ou FP16, dit autrement la performance IA sera en pratique bien supérieure aux 100 Pflops).

Le projet LISA vise expressément l’entraînement de modèles génératifs et multimodaux. Il s’appuie sur la conception nativement très modulaire du Leonardo, ce qui permettra son extension sans interruption ni impact majeur sur l’architecture.

LISA va venir ajouter deux modules « AI Booster » à une architecture qui comporte déjà un « General Purpose Module » à base de CPU (1536 nœuds CPU combinant 2 Xeon Platinum à 56 cœurs pour un total de 172.032 cœurs) et un « Booster Module » (3456 nœuds combinant 1 Xeon et 4 GPU A100 pour un total de 13824 GPU).
Concrètement, le projet vient ajouter un total de 166 nœuds de huit GPU Nvidia H100, interconnectés en réseau non bloquant à très haut débit et dotés de mémoire à large bande passante (HBM). Apparemment, le budget ne permet au consortium de s’offrir mieux (les NVidia H200 ou les NVidia Blackwell B200/B300 sont bien plus onéreux que les H100 devenus des entrées de gamme).

LISA partagera avec le Leonardo actuel un espace de stockage multiprotocole (bloc, fichier, objet) susceptible de servir simultanément les calculs traditionnels et les charges LLM. Dans le même calendrier, l’AI Factory italienne IT4LIA doit également venir se connecter au projet LISA, créant ainsi à Bologne un hub IA européen capable d’accueillir start-up, PME, laboratoires et administrations pour des projets IA critiques.

Une bonne nouvelle pour ATOS

Pour Eviden, filiale HPC d’Atos, ce contrat tombe à point nommé : vingt-quatre heures plus tôt, la maison-mère présentait « Genesis », son plan de relance sur quatre ans (cf. encadré). Le marché des supercalculateurs européens, où Eviden aligne notamment l’élaboration du Leonardo, du Jupiter et de Roihu, offre au groupe à la fois des vitrines technologiques et des volumes, alors que la nouvelle organisation mise sur justement sur l’IA et les systèmes critiques pour renouer avec une marge opérationnelle de 10 % à l’horizon 2028.

Reste que LISA ne constitue qu’une petite brique dans l’ambition « AI Continent » : il faudra encore préparer et déployer dans les prochains mois les 11 autres « AI Factories » mais aussi sécuriser les budgets pharaoniques des futures 5 « AI gigafactories » tout en maîtrisant l’empreinte énergétique de ces infrastructures. La véritable souveraineté européenne en matière d’IA passera autant par la puissance de calcul que par la capacité à l’utiliser de manière durable, ouverte et compétitive.


Genesis : Le plan de renaissance d’Atos

Présenté le 14 mai, le plan de transformation « Genesis » d’ATOS vise 9 à 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires et 10 % de marge opérationnelle à l’horizon 2028. « Genesis » doit marquer la renaissance de l’ESN française après plusieurs années de difficultés financières et organisationnelles. ATOS veut devenir un leader mondial de l’IT « AI Powered », avec une structure simplifiée et une gouvernance resserrée. Le plan repose ainsi sur seulement deux marques : Atos (services cloud, data & AI, cybersécurité) et Eviden (produits HPC, systèmes critiques, cybersécurité, vision AI). Le groupe investira 500 M€ en R&D sur quatre ans, doublera ses effectifs IA pour atteindre 10 000 experts et prévoit de ramener son levier d’endettement sous la barre des « x1,5 » d’ici 2028. Le groupe ambitionne sa neutralité carbone en 2050 et promet 40% de femmes dans les recrutements dès cette année.




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