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Le digital disrupte même les grèves

Par Mathieu Flecher, publié le 23 juillet 2018

Dans un monde où nous vivons dans un souci permanent d’optimisation de notre temps, les grèves SNCF ne sont pas les bienvenues. Heu-reu-se-ment, y a la techno!

3 avril 2018. On arrête tout, on stoppe tout. Plus de déplacements, plus de réunions, on arrive en retard au travail, on en repart plus tôt. C’est la grève re- conductible échelonnée à la SNCF. TER, TGV, Intercités… Toute la France est bloquée. Toute ? Non. Un village d’irréductibles Gaulois fait face et contourne les grèves… grâce à la technologie. Pardon grâce au « digital ». 

Derrière les mauvaises nouvelles il y toujours une 
bonne nouvelle, finalement. Même si cette grève nous
 pénalise dans nos déplacements professionnels, il faut
 se rendre à l’évidence : la digitalisation de la SNCF fait 
quand même passer la pilule. Il y a quelques années,
 point d’applications mobiles. En cas de grève, il se pas
sait quoi ? Un blocage des trains. Lesquels ? Impossible
 de savoir. Il fallait se déplacer à la gare, au mieux ap
peler un numéro de téléphone pour connaître les trains maintenus, et je suis plutôt gentil sur la fiabilité qu’un tel service pouvait offrir. Je me souviens de gares bondées, de foules massées devant les grands panneaux d’affichage et des grands cris de désespoir quand les trains prévus étaient finalement annoncés comme annulés. C’est du passé tout ça. Place à la SNCF 2.0 – pour de vrai ! 

Outre l’application mobile SNCF, la refonte du site internet – qui est un vrai bonheur à l’utilisation – autorise tellement plus de possibilités qu’il y a dix ou quinze ans ! Désormais, plus la peine de se déplacer. La digitalisation de la SNCF permet aujourd’hui de contourner de façon assez efficace les effets néfastes de la grève, même si celle-ci reste un élément perturbateur dans notre train-train quotidien, que ce soit pour les déplacements professionnels ou pour se rendre au travail. On est prévenu par SMS 24 heures à l’avance, voire plus, de la circulation ou non du train ; on bénéficie généralement d’alternatives, soit quelques heures avant ou quelques heures après ; et le cas échéant les billets sont remboursésà100%. 

Donc finalement, sans bouger de chez soi, on finit par « s’y faire ». Attention, ce n’est pas une généralité, mais dans l’ensemble, depuis deux mois, je circule plutôt sans encombre. De ce fait quelle portée a cette grève ? Est-elle vraiment efficace ? Les cheminots font pression sur un gouvernement en mettant la pression sur les usagers. C’est un peu cela la philosophie. Si le gouvernement ne veut pas entendre raison, les usagers la leur feront entendre. Donc avec cette digitalisation, l’impact est très nettement réduit. 

La « vraie grève » en fait serait très probablement que les informaticiens de la SNCF coupent les services de l’appli mobile, la réservation et le site web. Là, ce serait vraiment une grève 100% efficace ! Quand 20 % des cheminots se mettent en grève, très probablement 20 % des trains ne circulent pas. Mais quand un service informatique est coupé, pas de demi-mesures : si on ne peut pas réserver… c’est 100% du service qui n’est pas rendu. Comment s’affranchir alors de cette absence de service ? Comment contourner les grèves ? Comment s’organiser son PCA anti-grève ? Désormais, de nombreux moyens existent. Le premier évidemment est de substituer la voiture au train pour des distances raisonnables, mais les limites sont vite là : bouchons, fatigue… Le second c’est bien évidemment, pour des distances plus longues, de remplacer le ferroviaire par l’aérien. Pour autant qu’Air France ne soit pas lui-même en grève… Cela dit, pour l’avion, attendu que la concurrence existe, il est beaucoup plus facile de trouver un moyen de substitution. Enfin la « solution 2.0 » qui, depuis quelques années, fait son chemin, ce sont évidemment les services de type covoiturage : le fameux BlaBlaCar, mais aussi de nombreux services pour des trajets plus quotidiens, permettent aux employés d’une entreprise d’enregistrer leur trajet pour covoiturer avec leurs collègues ou bien d’autres salariés d’une entreprise voisine. La société Karos par exemple fournit ce type de service de mise en relation, mais aussi La Roue Verte, Klaxit… pour ne citer que ceux que je connais. 
Je n’évoque ici que la grève SNCF, mais il en a été de même quand les taxis ont fait grève pour protester contre la concurrence « déloyale » qui leur était faite par les VTC. Qu’ont fait les usagers ? Ils se sont tournés vers les Uber et autres Chauffeurs Privés… Même effet finalement qu’avec la grève SNCF. La technologie a permis de contourner les grèves. 

On le voit, les technologies et leur évolution ont vraiment permis de pouvoir trouver des alternatives raisonnables. Ici nous sommes sur un vrai cas d’école de ce que la technologie peut nous apporter. On le dit à voix basse, mais très vraisemblable- ment la digitalisation forte des services SNCF a permis de rendre moins douloureuses les grèves subies par les usagers, tout en proposant naturellement en période normale des services innovants. Sans cette digitalisation interne (dans le cas de la SNCF) et des services proposés par ses concurrents (Uber, BlaBlaCar, etc.), cette grève nous paraîtrait bien longue et douloureuse. L’autre élément qui nous amène à réfléchir sur cette situation, n’est pas en tant que tel ce qu’apporte la technologie, mais d’un ordre de survie économique : si une société ne rend pas le service, que ce soit pour cause de grève ou de mauvais service rendu, la technologie dite disruptive viendra à un moment donné bouleverser le jeu et proposer des alternatives sérieuses, crédibles et bien plus efficaces que le service rendu nativement. Quand j’étais gamin, on me disait toujours que la concurrence de la SNCF, c’était l’avion… quel manque de vision. La plus belle concurrence vient de là où l’on ne s’y attendait pas : de la technologie.

 

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