Hyperconnexion et Infobésité : quand la collaboration digitale devient toxique

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Hyperconnexion : quand le stress électronique nuit gravement à la santé

Par Xavier Biseul, publié le 24 décembre 2025

La surcharge cognitive liée à la multiplication des pratiques digitales a des impacts sur notre santé physique et mentale. La généralisation du télétravail et la montée en puissance de l’IA générative augmentent encore cette intensité numérique.

Flot incessant d’e-mails et de notifications, enchaînement des réunions en « visio » parfois sans de temps de pause… La multiplication des sollicitations numériques entraîne une surcharge informationnelle qui altère notre santé physique et mentale. Ce triste constat est dressé par l’Observatoire de l’infobésité et de la collaboration numérique (OICN) et l’éditeur Mailoop dans leur deuxième édition du Panorama des Connaissances, intitulée Technologies numériques et risques professionnels.

Il faut dire qu’en une semaine, un dirigeant consacre en moyenne 27 heures à traiter les courriels, les messages instantanés et les réunions. Pour un manager, c’est « seulement » 17 heures.

Avec tout ce bruit numérique, « le temps disponible pour se concentrer sur les tâches de fond est désormais minoritaire », « ce qui alimente un sentiment de “travail empêché” particulièrement néfaste pour la santé mentale », écrivent les auteurs de l’étude.

Et ce stress électronique se poursuit au-delà du bureau, le numérique brouillant les frontières entre vie professionnelle et vie privée. 60 % des actifs travaillent régulièrement en dehors des horaires contractuels (le soir et le week-end) souvent de manière diffuse.

Le phénomène est devenu plus insidieux encore avec la généralisation du télétravail, qui a bouleversé les « bornes temporelles » du travail en supprimant les temps de transport, qui servaient de sas de décompression entre le bureau et la maison. Autre facteur aggravant : l’adoption massive des IA génératives. Elles devraient « accroître encore l’intensité numérique chez les professions intellectuelles et les risques associés. »

Des risques de TMS… et de burn-out

Cette hyperconnexion est lourde de conséquences. Sur le plan de la santé physique, le travail sur écran provoque une fatigue visuelle, des maux de tête, des problèmes de sommeil et des troubles musculosquelettiques (TMS) de type lombalgie et douleurs cervicales lorsque l’ergonomie du poste de travail n’est pas adaptée.
Les risques psychosociaux (RPS) sont au moins aussi graves, qui vont du désengagement des collaborateurs à l’épuisement professionnel, voire au burn-out.
Le document évoque également un isolement des salariés, notamment en télétravail, une perte d’autonomie et un sentiment d’hyper- contrôle renforcé par les outils de suivi à distance.

Des collaborateurs sont confrontés à des conflits de valeurs « lorsque les usages numériques nuisent à la qualité du travail ou empêchent l’atteinte de la mission initiale. »
L’automatisation croissante des tâches cognitives et la rapidité des transformations technologiques nourrissent, enfin, une insécurité professionnelle sur fond de menace sur l’emploi.

« En quelques années, les TIC sont devenues la première source de dispersion, de surcharge mentale et de désengagement, estime Suzy Canivenc, directrice scientifique de Mailoop, chercheuse pour l’OICN et auteure de l’étude. Pourtant, dans la plupart des entreprises, ces effets restent invisibles car ils ne laissent ni trace ni blessure apparente. Mais en les nommant, en les mesurant et en agissant collectivement, il devient enfin possible de reprendre la main. »

Le document se conclut sur une note positive. « Les effets délétères du numérique ne sont pas une fatalité, mais la conséquence d’usages non maîtrisés ou non questionnés. »

Il appelle donc les organisations à réévaluer leurs pratiques digitales. Cela suppose de redonner aux salariés une forme de maîtrise sur leur organisation, leur temps et les outils. Il s’agira aussi de « définir collectivement des usages numériques durables, adaptés aux contextes réels de travail », puis « d’utiliser les outils pour travailler mieux, et non pas travailler plus, en préservant la qualité de vie au travail autant que la performance. »

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