Développeurs contre IA : une cohabitation plus qu’une disparition

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L’IA générative va-t-elle supprimer les développeurs et les plateformes de développement ?

Par La rédaction, publié le 25 novembre 2025

Avec l’essor des assistants IA et des nouvelles pratiques de développement, la même question revient sans cesse : les développeurs sont-ils voués, tôt ou tard, à disparaître ? Quelles plateformes survivront ? Entre promesse, réalité technique et pratiques humaines, la réponse mérite pourtant nuance.


Par Joffrey Chu, Directeur de la Division IT au sein du cabinet en transformation digitale et métier Sqorus


Avec l’arrivée de l’IA générative, on assiste à l’arrivée de nouvelles solutions qui permettent de créer des sites web et de réaliser des développements complets. C’est ce qu’on appelle le vibe coding. Des plateformes telles que Lovable, Bubble ou Hostinger Horizons offrent la possibilité de créer des sites de A à Z simplement, avec des prompts en langage naturel.

En quelques minutes et en quelques itérations successives, il est désormais possible d’obtenir un site parfaitement fonctionnel. Par ailleurs, l’utilisation de l’IA pour le développement ne se limite pas à la création de sites simples : cela accélère aussi la réalisation de développements complexes de back-office grâce à des outils comme GitHub Copilot ou Claude IA. Des développements qui auraient pris des jours de travail sont aujourd’hui réalisés en quelques heures.

Alors si on se projette dans les années à venir et l’évolution des modèles IA, est-ce que les développeurs seront tout simplement « supprimés de la carte » et tout sera-t-il de facto généré par IA ?

Vers la fin des développeurs ?

Ce n’est pas si sûr. Pour commencer, si on regarde d’un point de vue fonctionnel, il est illusoire d’imaginer s’en remettre complètement à une IA pour concevoir une architecture et une ergonomie adaptées en partant d’un cahier des charges. Réfléchir à la meilleure expérience utilisateur, identifier les personas qui vont utiliser la solution, préparer l’adoption de celle-ci nécessitera toujours de faire appel à des ergonomes, des architectes et/ou des UX designers qui sont certes assistés par IA mais assument au final leurs prises de décisions.

Ensuite si l’on se penche sur le volet technique (ceux qui concrètement codent les applications), il est indéniable que l’IA accélère grandement le travail des développeurs. C’est un fait : le travail simple et rébarbatif où on codait chaque fonction, classe ou morceau de code n’a cessé de diminuer ces 20 dernières années grâce à l’arrivée des IDE et frameworks de développement. L’IA va encore plus loin puisqu’elle est capable de générer tout un ensemble de code mais aussi de corriger et détecter les bugs techniques.

Toutefois, l’IA ne peut pas encore proposer une solution globale pour résoudre un bug complexe qui impliquerait de repenser une partie de l’architecture logicielle. Elle n’est pas davantage en mesure de remettre en cause une fonctionnalité qu’elle a(urait) générée mais mal ou non-utilisée.

Autrement dit, s’il est certain que le rôle du développeur est amené à évoluer, l’expertise pour comprendre et résoudre les problèmes complexes restera toujours nécessaire.

Last but not least, l’intelligence artificielle a ses propres limites : il est ainsi encore très difficile de forcer l’IA à corriger ou à modifier ce qu’elle va générer. Ce qui fait qu’au final, on se retrouve souvent avec une solution qui convient à 80% mais sans arriver à forcer les 20% restants pour que ce soit fait de la manière souhaitée… même si on peut d’ores et déjà imaginer que les modèles vont aller en se perfectionnant et que les limites technologiques seront progressivement levées.

Mais la raison majeure qui fera qu’il y aura encore besoin d’humains demain pour le développement sera probablement moins technique que comportementale et psychologique…

L’attachement émotionnel aux solutions construites brique par brique

Pour bien comprendre : depuis des décennies, il est tout à fait possible d’acheter des maisons préfabriquées ; pourtant, quand on peut se le permettre, on préfère souvent les construire de manière traditionnelle brique par brique. Pour prendre une autre image : si on peut acheter aujourd’hui des jouets très sophistiqués, force est de constater que les jeux de construction Lego ne se sont jamais aussi bien vendus…

Parce que l’homme aime imaginer, construire, bâtir et comprendre comment les choses fonctionnent.

C’est là que la promesse du low code assisté par IA devient pertinente. Puisqu’à l’instar des Lego, cela permet de construire des applications robustes dont on peut facilement comprendre le fonctionnement. Cette capacité à assembler une solution brique par brique est clé pour l’adoption et le déploiement de celle-ci.

Le temps passé à réfléchir à l’architecture de la solution, à l’expérience utilisateur, à son ergonomie, à la façon dont les fonctionnalités seront présentées est loin d’être un temps perdu. Il fait partie du projet, cela contribue à créer une application qui sera mieux adoptée. Certes une IA peut générer une application correspondant au cahier des charges, mais peut-elle aussi bien appréhender les besoins réels des utilisateurs, leur niveau de maturité, leurs besoins « non fonctionnels » et plus expérientiels ?

Lorsqu’il s’agira de corriger une fonctionnalité, ou de réaliser une mise à jour, l’IA ne risque-t-elle pas de générer directement une nouvelle application plus moderne, plus complète pour remplacer l’ancienne ? Alors que les utilisateurs préféreraient peut-être garder leur ancienne version avec une petite rustine pour prendre en compte les changements souhaités ?

Certes, l’humain sait s’adapter au changement mais il aime aussi son confort avec ses habitudes et ses repères. C’est pour ce côté rassurant que les applications « traditionnelles » construites ou assemblées tout ou partie par des développeurs continueront à coup sûr de perdurer.

Pour les solutions qui comptent

En conclusion, l’IA pour le développement est un outil extrêmement puissant qui va continuer à réduire le nombre d’heures et de jours passés à développer. Oui, il est probable que la génération d’applications via intelligence artificielle va remplacer un grand nombre d’applications qui auraient été développées entièrement à la main.

Mais est-ce que ces solutions seront durables ? Qui regrettera de supprimer ou remplacer une application générée en quelques heures ou minutes ? Nous assisterons probablement à des applications de plus en plus éphémères générées par IA.

Tout laisse ainsi à croire, pour les applications qui comptent, celles pensées pour s’inscrire dans la durée, que nous aurons toujours besoin d’une vraie expertise humaine.



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