Gouvernance
Moderniser le SI d’un réseau de magasins vieux de plus de 30 ans : ou comment transformer une contrainte en opportunité
Par Laurent Delattre, publié le 30 octobre 2025
Rafraîchir un SI historique, c’est un peu comme remettre à neuf une mécanique d’orfèvre : il faut préserver la précision tout en gagnant en puissance. Entre refonte front-end et montée de version back-end, la transformation devient un atout concurrentiel.
De Benoît Epopi, CTO de Cash Converters
Dans un monde où la technologie évolue à une vitesse vertigineuse, de nombreuses entreprises se retrouvent encore avec des systèmes d’information (SI) hérités du passé et parfois vieux de plusieurs décennies.
Ces SI, souvent solides mais devenus rigides, peinent à répondre aux enjeux actuels de performance, d’agilité et de sécurité.
Les enjeux : sortir des limites d’un SI ancien
Un SI ancien n’est pas seulement une dette technologique : il devient une contrainte pour l’innovation et le développement de l’entreprise. Dans certains cas, les limites sont multiples. Les logiciels, jamais réellement mis à jour, exposent alors l’organisation à des failles de sécurité majeures. Les bases de données, construites sur des technologies obsolètes, rendent alors impossible l’usage d’outils modernes de visualisation et d’analyse. Quant aux interfaces, elles n’offrent plus la souplesse nécessaire pour améliorer l’expérience utilisateur ou créer de nouveaux parcours digitaux. Enfin, après trois décennies d’évolution, de patchs et de multiples intervenants, le code lui-même devient une boîte noire. Chaque nouvelle évolution est un saut dans l’inconnu, avec un risque permanent de perte de connaissances ou de dysfonctionnement. Un risque que les entreprises ne peuvent se permettre.
Les choix technologiques : innover sans tout réinventer
La modernisation doit donc répondre à un double impératif : sécuriser et fiabiliser le système existant, tout en lui redonnant la capacité d’évoluer et de s’adapter aux besoins du marché. La stratégie la plus retenue est celle de moderniser sans tout remplacer, afin de préserver la richesse de la connaissance métier accumulée au fil des années.
Sur la partie back-end, il est essentiel de conserver les technologies existantes, en particulier Java et PHP, mais en les faisant évoluer et en les remettant à niveau. Cette approche permet de stabiliser le cœur du système, de renforcer la sécurité et d’améliorer la performance, sans rupture pour les utilisateurs.
Sur la partie front-end, en revanche, il faut opter pour une rupture plus nette. Les logiciels historiques, notamment ceux en lien avec les caisses en magasin, deviennent si anciens qu’ils en sont inexploitables. Le choix de nouvelles interfaces développées en JavaScript et React a été naturel. Ce virage permet d’offrir davantage de flexibilité aux équipes, de rendre les parcours utilisateurs plus fluides et d’en améliorer l’ergonomie. Il est désormais beaucoup plus simple de trouver des développeurs capables d’intervenir, et les évolutions fonctionnelles peuvent être mises en œuvre rapidement et sans risque.
La transition entre l’ancien et le nouveau système représente un défi majeur, car elle doit être progressive et maîtrisée. Une migration mal maîtrisée pourrait entraîner une perte de données ou des interruptions de service.
Pour éviter cela, une approche progressive. Le back-end a évolué par montées de versions successives, sans changement brutal du fonctionnel, ce qui permet de garantir la continuité de service. Pour le front-end, l’idéal est de reproduire à l’identique les fonctionnalités existantes, et de se concentrer sur la restitution des bénéfices utilisateurs. Ce choix a ouvert la voie à des parcours repensés, plus simples, plus connectés et mieux adaptés aux attentes actuelles, tout en rendant la transition plus fluide pour les collaborateurs en magasin.
L’impact humain : transformer l’organisation avec la technologie
Un SI n’est jamais qu’un reflet de l’organisation qui le porte. Moderniser la technologie implique de transformer les pratiques et parfois de renouveler les équipes. Passer d’une logique de maintien en condition opérationnelle à une logique de transformation a nécessité de créer un nouvel élan, d’embarquer les collaborateurs, mais aussi de recruter de nouvelles compétences là où l’existant montrait des limites. Il faut expliquer, donner du sens, convaincre que cette refonte n’est pas une fin en soi mais un moyen de rendre le quotidien plus simple et plus efficace. L’implication de la direction générale a joué un rôle décisif pour légitimer cette transformation et ancrer une nouvelle culture.
Avec les nouvelles équipes, il est important de mettre en place des méthodes agiles, d’organiser le travail en sprints, d’instaurer des rituels d’équipe et de partager régulièrement les avancées avec le reste de l’entreprise. Ce changement culturel permet de mesurer plus finement la progression, d’impliquer les métiers et de replacer la technologie au service de l’expérience utilisateur.
Les premiers résultats et l’ambition future
Les premiers résultats d’une modernisation sont déjà visibles à M+3. Le système est tout de suite plus performant, plus stable et plus sécurisé. Les utilisateurs constatent chaque jour des gains de temps et d’efficacité, et le feedback est largement positif. Cette transformation permet désormais de nourrir une dynamique d’amélioration continue, de tester rapidement de nouvelles idées et d’éliminer les irritants au fur et à mesure.
L’ambition de cette transformation est claire : faire évoluer la fonction informatique, trop longtemps perçue comme un simple support, vers un véritable pôle d’innovation. En s’appuyant sur un système modernisé et ouvert, il est désormais possible d’explorer les opportunités offertes par l’écosystème numérique, et transformer durablement l’expérience des collaborateurs comme des clients.
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