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Où en est la cybersécurité dans l’aviation ?
Par La rédaction, publié le 07 mai 2025
Des cockpits aux terminaux, l’aviation se transforme en terrain stratégique pour les cybercriminels, poussant l’industrie à renforcer ses défenses de cybersécurité à tous les niveaux. La sécurité numérique des aéronefs et de leurs infrastructures repose sur une traçabilité rigoureuse, une gouvernance interopérable et l’intégration proactive des technologies émergentes.
De Marc Rivière, Senior Director Industry Aerospace and Defense, PTC
La numérisation et les connexions des aéronefs et des infrastructures associées confrontent le secteur de l’aviation à des cybermenaces grandissantes et de plus en plus complexes. En ligne de mire : tout un champ qui va des opérations de vol aux données des passagers. La mise en œuvre du cadre normatif et des bonnes pratiques édictées par l’Union européenne et les organisations professionnelles exige des acteurs du secteur des ajustements techniques et organisationnels, ainsi que l’intégration rapide de nouvelles solutions. À cet égard, la continuité numérique permet une traçabilité des produits infaillible et une optimisation des processus, de la conception à la production. Deux voies majeures pour renforcer la cybersécurité aéronautique.
L’ampleur des scénarios catastrophes
Les scénarios les plus sombres laissent entrevoir la compromission des systèmes de gestion, la manipulation des systèmes de navigation, la perte de contrôle du trafic aérien, la violation des données et des attaques sur les réseaux de communication et la chaîne d’approvisionnement. En cause, des logiciels malveillants qui viennent compromettre les systèmes de contrôle critiques ou des attaques DDoS contre les systèmes aéroportuaires (et les perturbations opérationnelles qui en résultent).
Bonnes pratiques initiales en cas de menaces
Pour contrer ces menaces, l’industrie aéronautique mise sur un arsenal de technologies et de pratiques éprouvées visant différents objectifs : la protection des systèmes et des accès, avec le chiffrement des communications et l’authentification multifactorielle ; le maintien de la sécurité, par des mises à jour logicielles régulières, une gestion rigoureuse des correctifs de sécurité et des tests de pénétration ; la détection et la réaction, grâce à des dispositifs de détection d’anomalies et des outils SIEM ; la réduction des risques, via la segmentation des réseaux ; et la prévention proactive, par les renseignements cyber.
Par ailleurs, la traçabilité numérique des pièces sécurise la chaîne d’approvisionnement et garantit leur authenticité. Il est impératif, enfin, de lever les silos entre ingénierie et production. Leur intégration via des boucles de rétroaction numériques permet un suivi en temps réel des évolutions et une détection précoce des risques.
Vers une sécurisation maximale
Au-delà de ces mesures fondamentales, la cybersécurité dans l’aviation nécessite une étroite collaboration entre les acteurs concernés : compagnies aériennes, aéroports, constructeurs, agences gouvernementales. La défense cohérente repose sur leur coordination. C’est dans cette optique que l’Union Européenne, l’EASA, l’OACI et d’autres institutions associent leurs efforts pour une révision constante des normes et exigences.
Sans surprise, ces pratiques impliquent un investissement dans les technologies émergentes, en particulier celles reposant sur l’intelligence artificielle. Elles supposent aussi la formation des équipes car, face à des menaces évolutives, le protocole de sécurité n’est viable que s’il est régulièrement réévalué. Dans un même ordre d’idées, on s’assurera de l’interopérabilité des systèmes, en interne mais également au sein du réseau de partenaires.
Se pose enfin la délicate question du rééquipement d’avions en service. C’est un défi, mais il est techniquement possible. Des systèmes de protection modulaires peuvent être intégrés aux architectures existantes sans compromettre leur fonctionnement. Cela nécessite toutefois une planification rigoureuse et, parfois, des ajustements sur le plan réglementaire. Dans le cas d’un aéronef très ancien, la tâche se complique. L’accès aux données de configuration, souvent chaotiques, peut confiner au cauchemar.
Le rôle croissant de l’intelligence artificielle
L’IA s’impose dans la cybersécurité moderne. Elle permet non seulement d’analyser d’immenses volumes de données, mais aussi de détecter les anomalies et d’anticiper les menaces. Nous n’insisterons jamais assez sur la nécessité d’audits de sécurité réguliers, et le recours aux technologies d’automatisation qui détectent les vulnérabilités potentielles en temps réel. Ces processus doivent s’inscrire dans la maintenance de routine, sans perturber l’exploitation.
Dans d’autres secteurs, comme l’automobile, l’IA générative est déjà intégrée à des outils de cycle de vie des applications afin de faciliter la gestion des exigences et l’identification rapide des vulnérabilités. Dans le domaine aéronautique, ces technologies ouvrent naturellement la voie à une cybersécurité prédictive.
Par ailleurs, si la réglementation actuelle offre une base solide, elle est tenue au mouvement perpétuel. L’intégration de l’intelligence artificielle ou de l’informatique quantique dans les cadres législatifs est essentielle, pour en exploiter les potentiels bien sûr, mais aussi pour anticiper les nouveaux risques qu’elles engendrent.
Les grands acteurs du secteur considèrent désormais la cybersécurité comme un pilier stratégique de leurs activités et l’intègrent dès les premières phases de développement. Avec des technologies telles que l’ingénierie des lignes de produits basée sur des modèles (MB-PLE), ils parviennent à concevoir de façon performante et résiliente. Ici, la continuité numérique s’avère déterminante : elle permet d’assurer la traçabilité complète de la configuration de vol, en la synchronisant avec les dernières exigences techniques et réglementaires. Seule une continuité numérique fluide peut garantir une réactivité à la hauteur des enjeux, entre la rigueur de l’ingénierie et les impératifs opérationnels.
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