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Quandela livre sa nouvelle machine quantique photonique « Lucy » au TGCC
Par Laurent Delattre, publié le 24 octobre 2025
Avec Lucy, Quandela électrise le quantique européen. Cette machine photonique de 12 qubits débarque au TGCC pour fusionner puissance HPC et innovation made in France. C’est la seconde machine quantique à faire son entrée au TGCC après celle de Pasqal en 2024.
Pendant que Google annonçait avoir atteint un énième « avantage quantique », cette fois-ci paraît-il vérifiable, la jeune pousse française Quandela officialisait de son côté la livraison de Lucy, le « plus puissant ordinateur quantique photonique » au monde… doté de 12 qubits TGCC-GENCI (le fameux Très Grand Centre de Calcul du CEA sur le plateau de Saclay) ! En France aussi, le marketing quantique commence à se faire entendre.
Petit retour en arrière avant d’aller plus loin. En janvier 2022, la France officialisait son initiative HQI « Hybrid Quantum Initiative » visant à faire entrer des machines quantiques au sein du TGCC et les coupler au HPC Joliot-Curie dans une véritable approche hybride où les machines quantiques pourraient être employées comme accélérateur sur des fonctions de calculs limitées mais pour lesquels le quantique imparfait de notre décennie peut apporter un réel plus.
Fin 2023, le TGCC accueillait sa première machine quantique dans le cadre de cette initiative : une machine à atomes neutres (piégés par laser) de plus de 100 qubits rendue disponible aux chercheurs en 2024.
Lucy est donc officiellement la seconde machine quantique à faire son entrée dans le TGCC. Acquise par l’entreprise commune européenne EuroHPC dans le cadre du consortium EuroQCS-France, elle sera, elle aussi, prochainement couplé au supercalculateur Joliot-Curie, ouvrant la voie à des flux de travail hybrides entre calcul haute performance et quantique.
Quandela, une pépite française en pleine ascension
Fondée en 2017, Quandela s’est imposée comme l’un des acteurs majeurs de l’informatique quantique et un pionnier du quantique photonique (qui exploite les photons comme Qubits). Après avoir déployé ses premiers calculateurs dans les data centers d’OVHcloud (en 2023, le MosaiQ de 5 quits) et d’Exaion (filiale d’EDF, en 2024), la start-up franchit une nouvelle étape avec Lucy. Avec pour ambition de contribuer un peu plus à faire de l’Europe un leader mondial du quantique, capable de rivaliser avec les géants américains et asiatiques.
La roadmap de Quandela repose sur trois axes : industrialiser rapidement ses machines photoniques, les intégrer dans des environnements HPC hybrides pour des usages concrets, et monter en puissance vers des processeurs de 24 qubits (dénommés CANOPUS et attendus en 2026) et plus afin de rivaliser avec les leaders mondiaux. Avec en ligne de mire, une machine de plus de 40 Qubits d’ici 2028.
Lucy : 12 qubits pour expérimenter
Lucy dérive directement du Belenos, la première machine photonique 12 qubits expérimentale de Quandela introduite sur son propre service cloud QaaS en mai de cette année. Lucy et Belenos consacrent ainsi la seconde génération de machines photoniques de la startup, donnée comme 4000 fois plus puissante que la première génération.
D’une performance annoncée de 576 QOPS, elle affiche une fidélité de 99,6% sur les portes 1 qubit, de 99% sur les portes à 2 qubits et de plus de 85% sur la préparation d’intrication à 3 qubits. Mais la grosse force de cette machine est surtout de ne consommer que 5 kW !
Sur le papier, Lucy doit permettre de développer de nouveaux algorithmes pour simuler les propriétés de larges molécules, améliorer la prédiction financière comme la prédiction des défauts de crédit, simuler des contraintes mécaniques dans les grandes structures (pour prévenir les défaillances).
En pratique, il ne faut cependant pas s’attendre à des miracles avec seulement 12 qubits à disposition. L’idée est bien davantage de faire progresser l’algorithmique quantique et explorer ces futurs cas d’usage que de déjà mettre en pratique des scénarios industriels.
Néanmoins, Quandela a déjà montré que son Belenos, et donc le Lucy du TGCC, pouvaient être utiles pour accélérer certains calculs d’IA, tels que la classification et la génération d’images. La jeune pousse française a, sur ces sujets, remporté fin 2025 le défi lancé par BMW-Airbus. Preuve que l’on peut déjà un minimum exploiter l’informatique quantique pour booster l’IA.
Après une phase de tests, Lucy sera ouvert aux chercheurs européens début 2026 via le portail eDARI du GENCI. Pourront alors réellement commencer la recherche de premiers cas pratiques et la poursuite de la R&D sur l’algorithmie quantique.
Une étape stratégique pour la souveraineté technologique
Assemblé en douze mois dans l’un des deux labos d’assemblage de Quandela, Lucy illustre la montée en puissance de l’écosystème quantique européen. Plus de 80 % de ses composants, dont l’ensemble des éléments critiques, sont d’origine européenne.
« Dans la course mondiale au développement d’ordinateurs quantiques, la livraison au CEA de Lucy, l’ordinateur quantique photonique le plus puissant d’Europe, fabriqué par la société française Quandela, représente une avancée majeure dans les ambitions quantiques françaises et européennes » explique ainsi Philippe Lavocat, Directeur Général et Président du GENCI. « GENCI et le programme HQI sont particulièrement fiers d’avoir contribué à l’acquisition par EuroHPC de cette technologie souveraine, qui sera ensuite connectée au supercalculateur Joliot-Curie et, en 2026, à Alice Recoque, le supercalculateur exascale franco-européen, afin de multiplier les synergies entre les environnements HPC et l’informatique quantique, le tout au service d’une recherche de classe mondiale pour les chercheurs académiques et industriels ».
Une étape stratégique pour l’informatique quantique européenne comme le souligne Niccolo Somaschi, cofondateur et CEO de Quandela : « La livraison de Lucy n’est pas seulement une nouvelle étape – c’est un élément clé pour l’avenir du calcul hybride européen. En collaboration avec attocube systems, nous avons construit un processeur quantique photonique qui s’interfacera avec le supercalculateur Joliot-Curie, permettant ainsi de véritables flux de travail hybrides HPC-quantique. En offrant cette capacité à une large communauté de chercheurs et d’utilisateurs industriels européens, nous leur donnons les moyens d’explorer de nouvelles frontières en matière de simulation, d’optimisation et d’apprentissage automatique. Cette réalisation renforce la souveraineté technologique de l’Europe et démontre le pouvoir de la collaboration transfrontalière pour façonner la prochaine génération d’informatique ».
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