AMD développerait un processeur ARM pour Copilot+ PC

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AMD préparerait une puce ARM pour PC

Par Laurent Delattre, publié le 03 novembre 2025

Face à la montée de Qualcomm et à la maturité de Windows on ARM, AMD préparerait un retour stratégique vers l’architecture ARM avec son projet de puce « Sound Wave », marquant une inflexion majeure dans sa stratégie centrée jusqu’ici sur le x86.

Avec l’alliance « x86 Ecosystem Advisory Group », groupe consultatif pour l’écosystème x86 créé par AMD et Intel avec Broadcom, Dell, Google, HPE, HP, Lenovo, Meta, Microsoft, Oracle et Red Hat, on pensait AMD désormais très focalisé sur ses gammes Ryzen et Epyc et donc sur l’évolution et la modernisation de la plateforme x86.
Il n’en est rien. Selon plusieurs fuites, AMD préparerait son entrée (ou plus exactement son retour) dans l’univers ARM.

AMD et ARM, une histoire plus longue qu’on ne le croit

Ce n’est pas la première fois que des rumeurs annoncent l’arrivée de processeurs ARM estampillés AMD. Le fondeur américain dispose d’ailleurs officiellement d’une licence ARM depuis 2012 !

Et pour cause, le PSP/AMD‑SP, souvent évoqué à travers le “Platform Security Processor”, est un sous-système basé sur un cœur ARM intégré aux SoC AMD qui assure l’ancrage de confiance, la vérification de l’intégrité au démarrage et diverses fonctions de sécurité isolées. Il a introduit chez AMD une maîtrise industrielle des microcontrôleurs ARM embarqués, bien avant toute ambition de CPU ARM grand public.

En 2014, l’Opteron A1100 (nom de code Seattle), lancé à l’ère des ARMv8, fut la première incursion d’AMD sur le marché alors embryonnaire des serveurs 64 bits basés sur ARM. Ciblant des usages de stockage et web, il proposait une alternative économe aux x86, mais est arrivé trop tôt sur un marché qui manquait encore d’outils et d’écosystèmes matures pour les déploiements à grande échelle. Il fut abandonné dans l’année (dans le même temps, Qualcomm abandonnait de son côté son projet de processeurs ARM pour serveurs Centriq).

Project K12, prévu pour 2017 et mené à l’époque par Jim Keller, visait des cœurs ARM custom hautes performances pour des PC et serveurs. Ambitieux, il a été mis en pause dans un contexte de priorisation de Zen, mais il a laissé chez AMD savoir‑faire et IP réutilisables, notamment en conception de front‑ends, cohérence cache et intégration SoC.

Un peu à la même époque, Project Skybridge, annoncé comme une plateforme commune capable d’accueillir des puces x86 et ARM dans des sockets et designs partagés, incarnait le pari d’une flexibilité maximale pour les OEM. Il a été finalement annulé, la réalité économique et l’insuffisance de l’adoption ARM sur PC à l’époque rendant l’équation trop risquée face à la traction de Zen et aux coûts de validation.

Enfin, rappelons qu’il existe toujours chez AMD une vraie compétence ARM avec la gamme d’accélérateurs réseaux « DPU Pensando ». Ces coprocesseurs programmables, basés sur des cœurs ARM et des pipelines dédiés, déchargent le CPU des fonctions de dataplane, de chiffrement et d’observabilité, et montrent la capacité d’AMD à packager ARM là où la latence et l’efficacité comptent plus que les instructions x86.

Ce que l’on sait du projet Sound Wave

À en croire différentes indiscrétions et fuites, AMD s’intéresserait de nouveau de très près aux processeurs ARM et serait en train de développer toute une gamme de puces « APU » en architecture ARM.

Les premières fuites évoquent un SoC dénommé “Sound Wave” basé sur l’ISA ARM, pensé pour des PC Windows sur ARM et des designs mobiles à très faible consommation. AMD “s’éloignerait” de ses designs x86 au profit d’un SoC ARM, vraisemblablement avec des cœurs Cortex standards, et qu’il viserait notamment les laptops Surface à venir, tout en conservant le GPU Radeon plutôt que l’officiel mais bien moins puissant GPU Mali d’ARM. La puce s’appuierait sur un nouveau socket FF5, successeur du FF3 utilisé par les APU Aerith/Sephiroth des consoles Steam Deck (avec finalement le retour de Skybridge et de l’idée d’un socket universel).

Les premières fuites laissent penser qu’il s’agirait là essentiellement d’un processeur pour machines mobiles et très probablement pour des ordinateurs portables estampillés « Copilot+ PC », confirmant que l’APU, outre le CPU ARM et le GPU Radeon, intègrerait aussi un NPU. Certaines sources évoquent un processeur doté de deux cœurs “P” et quatre cœurs “E” (six au total), un iGPU RDNA 3.5, jusqu’à quatre CUs, un NPU 50 TOPS et une enveloppe de 10 W avec options de TDP ajustables selon clients. Le positionnement évoqué s’étend des laptops fins aux consoles portables.

Un retour qui a du sens

L’idée d’AMD serait non seulement de ne pas laisser les coudées franches à Qualcomm qui a, cette année, acquis des parts de marché significatives (on parle de plus de 15% et une forte croissance) avec ses Snapdragon X pour Copilot+ PC, mais également de s’affirmer en concurrent de Nvidia qui, avec son partenaire Mediatek, ambitionnerait également d’équiper des Copilot+ PC dès l’an prochain.

Il faut dire que contrairement à l’époque des A1100, K12 et Skybridge, l’écosystème Windows on ARM est devenu très mature avec une version de Windows 11 parfaitement optimisée et dotée d’un émulateur Prism qui fait le job mais aussi avec un univers d’OEM désormais très intéressé par des machines “AI‑first” qui maximisent l’autonomie. Un SoC ARM signé AMD offrirait aux partenaires OEM une seconde source crédible, gardant Radeon dans la boucle graphique, et évitant une dépendance unique à Snapdragon dans des PC où l’IA embarquée devient vitale. De quoi faire baisser les prix et donner une vraie signature gaming aux Copilot+ PC, ce qui contribuerait encore à accélérer l’écosystème Windows on ARM.

Pour AMD, revenir aujourd’hui sur ARM n’est pas une volte-face idéologique mais un réalisme industriel. Pour étendre son marché, servir toutes les poches de demande (perf/W, Copilot+, edge), protéger ses parts dans l’univers des PC portables Windows mais aussi défendre l’avenir de ses technologies GPU et IA (et des frameworks qui les accompagnent), AMD a aujourd’hui bien des raisons de s’intéresser à Windows on ARM et aux Copilot+ PC en ARM.

Et l’on peut même se demander si AMD ne planche pas aussi sur des déclinaisons « serveurs » de son futur APU ARM. Car contrairement à l’époque de l’avorté Opteron A1100, le marché « Serveur ARM » non seulement n’est plus théorique mais existe très concrètement : AWS Graviton, AmpereOne (192 cœurs), et Nvidia Grace, sans oublier Azure Cobalt-100 et Google Axion structurent des offres à forte densité/perf/W dans les clouds. AMD-EPYC domine l’x86 « dense », mais certains hyperscalers arbitrent désormais entre EPYC et ARM « maison » sur des workloads spécifiques. Un EPYC-ARM (ou dérivé) donnerait à AMD une cartouche maison face à Graviton/Ampere, et une option d’attache différente dans les nœuds AI/edge.

Reste que l’arrivée d’AMD sur le marché Windows on ARM serait une très mauvaise nouvelle pour le PC sous x86. Les Copilot+ PC en ARM ont en quelques mois acquis une réputation de fiabilité, de stabilité et de performance sous batterie bien meilleure que les PC x86. Et Microsoft pousse désormais coûte que coûte ARM dans sa propre gamme Surface (la marque a abandonné les machines x86 sur le grand public). La rumeur AMD sur ARM, si elle se confirme, enverra un message comme quoi l’avenir du PC Windows se joue désormais en ARM.

L’histoire commune d’AMD avec ARM (sécurité, serveurs, DPU) et son outillage IP (RDNA/NPU) rendent aujourd’hui un tel pari crédible. Si les rumeurs « Sound Wave » se confirment, 2026 pourrait voir apparaître le premier vrai concurrent ARM de Qualcomm côté PC… et installer durablement un triangulaire ARM (Qualcomm/AMD/MediaTek) sur tous les PC mobiles, laissant aux x86 la main sur le seul haut de gamme performance.



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