

Data / IA
Demian Wassermann (Inria/DataIA) : « L’IA nous aide à décrypter le cerveau et à ouvrir la voie à une médecine de précision »
Par Laurent Delattre, publié le 03 octobre 2025
À la croisée des chemins entre IA et neurosciences, Demian Wassermann explore comment les modèles du cerveau peuvent transformer notre compréhension de l’esprit humain. Directeur de recherche à l’Inria Saclay (au sein de l’équipe MIND) et directeur adjoint recherche de l’Institut DataIA, il nous éclaire sur les synergies qui redessinent les frontières de la recherche en neurosciences et ouvrent la voie à de nouvelles applications cliniques.
Cette semaine, IT for Business était présent sur le salon Big Data & AI Paris 2025 avec notamment une grande émission diffusée en direct que nous vous invitons à revivre en replay durant votre Week-End en suivant ce lien :
L’occasion de discuter avec des acteurs, des DSI et des Data Scientists sur les difficultés qu’ils rencontrent et solutions qu’ils mettent en œuvre pour déployer l’IA auprès des métiers et en retirer la valeur attendue. L’occasion surtout de plonger dans la multitude des cas d’usage de l’IA avec toute une série d’invités accueillis en dehors de l’émission mais dans les conditions du direct tout au long des deux jours du salon. Et justement, l’IA est porteuse de beaucoup d’espoir dans le domaine de la santé et l’appui qu’elle peut apporter aux chercheurs. Pour en discuter, Demian Wassermann, Directeur de recherche à l’Inria Saclay (au sein de l’équipe MIND) et directeur adjoint recherche de l’Institut DataIA, a accepté notre invitation et pris dans son agenda très chargé le temps de s’arrêter sur notre plateau.
L’opportunité d’évoquer les différences mais aussi les synergies entre le cerveau humain et l’intelligence artificielle était trop belle pour que nous ne la saisissions pas au vol. « Dans l’équipe MIND, nous développons toute la chaîne IA : des algorithmes d’IA conçus pour mieux comprendre le cerveau, jusqu’à leur application en neurosciences, par exemple pour guider des neurochirurgies », explique d’emblée notre invité.
Si l’IA puise son inspiration dans les réseaux de neurones du cerveau, la réalité est plus nuancée : « Au départ, on pensait que les réseaux neuronaux devaient imiter le fonctionnement du cerveau. Aujourd’hui, on sait que c’est très loin d’être le cas. Mais comme métaphore, cela reste un outil précieux pour essayer de comprendre certains mécanismes » reconnait le chercheur.
Là où l’IA se révèle incontournable, c’est dans l’analyse des images cérébrales. « Les images du cerveau sont toujours particulières. L’IA nous aide à en décrypter la géométrie, à détecter des pathologies ou des phénomènes subtils que l’œil humain seul ne pourrait pas voir » explique-t-il. Et derrière cet usage se profile une révolution médicale : « C’est le socle de ce qu’on appelle la médecine de précision, avec l’idée d’un jumeau numérique qui permettrait de mieux guider un traitement et de prédire l’évolution d’une maladie. »
Dans le champ des maladies neurodégénératives ou des troubles comme l’autisme, l’IA ouvre déjà des perspectives. « Beaucoup de recherches cherchent à identifier des biomarqueurs ou à prédire l’évolution d’une sclérose en plaques par exemple afin d’adapter les traitements » analyse Demian Wassermann.
Pour autant, de nombreux verrous restent à lever, notamment du côté de la fiabilité : « Il faut progresser sur l’IA explicable et sur la capacité des modèles à quantifier leur degré de certitude. Pour un médecin, savoir si un diagnostic a une probabilité de 60 % ou de 95 % change tout. »
Demian Wassermann évoque également NeuroLang, un projet dont il est l’instigateur, conçu pour éviter les malentendus des IA de langage : « Avec NeuroLang, on formalise la connaissance scientifique de manière sémantiquement précise. L’idée est de garantir que la question à laquelle l’IA va répondre est bien celle qui a été posée par le médecin ou le chercheur. » Autrement dit que l’IA ne fait pas d’erreur d’interprétation de la demande.
Enfin, il aborde le grand débat sur la conscience artificielle : « Ma réponse automatique, c’est non, une IA n’a pas de conscience. Mais pour poser correctement la question, il faudrait déjà que nous, neuroscientifiques, soyons d’accord sur ce qu’est la conscience humaine. Et ce débat est encore ouvert » affirme-t-il en guise de conclusion.
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