L'europe domine le classement GREEN500 des HPC les plus efficients de la planète

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Le classement Green500 est dominé par l’Europe !

Par Laurent Delattre, publié le 16 mai 2024

Le dernier classement Green500 des supercalculateurs les plus éco-énergétiques au monde vient d’être dévoilé. Pour la première fois, les trois premières places sont toutes occupées par des systèmes situés en Europe. Parce que l’Europe est plus sensible aux problématiques climatiques ou parce que l’Europe est en retard sur l’IA ?

Deux fois par an, l’organisme « Top500.org » publie ses classements autour des HPC, les supercalculateurs les plus puissants de la planète. Le TOP500 liste les 500 « machines » les plus puissantes de la planète, alors que le Green500 réordonne cette liste non plus en fonction de leur puissance brute mais en fonction de leur efficacité énergétique.

Le nouveau classement « TOP500 » publié cette semaine ne diffère guère du précédent. Il est largement dominé par les deux premiers super-ordinateurs exaflopiques américains, le Frontier (né l’an dernier) et le nouvel Aurora (encore en cours de construction). En l’absence de toute publication chinoise sur ses super-systèmes, les USA sont officiellement la seule nation classée à dominer le monde de l’exaflop.
Le troisième système du podium est, lui aussi, américain mais provient du Cloud : il s’agit de l’Eagle de Microsoft Azure, un HPC assemblé au sein d’Azure pour essentiellement satisfaire les besoins d’OpenAI. On notera également que Microsoft glisse au total 7 « supercalculateurs » dans le TOP 100 de ce classement.
Les Européens trustent de leur côté 4 places du TOP 10 (dont la 5ème place avec le LUMI finlandais).

Le TOP 10 du classement TOP500 des HPC les plus puissants de la planète
Le TOP 10 du classement TOP500 des HPC les plus puissants de la planète

Si le TOP500 se révèle au final peu surprenant et nous rappelle une nouvelle fois la suprématie américaine dans le supercomputing, l’autre classement, le Green500, offre un visage bien différent et multiplie les surprises.

Un proto européen en tête du Green 500

Le Green500 reprend les machines du TOP500 mais ne classe plus les machines sur leur puissance de calcul pure mais bien au contraire en fonction de leur efficience énergétique autrement dit le nombre d’opérations réalisées par Watt consommé !

Et la machine en tête de ce classement est une surprise à double titre. D’abord c’est une machine européenne, ensuite c’est une machine qui n’existe que très partiellement !

Le JEDI, acronyme de Jupiter Exascale Development Instrument, est en réalité un prototype expérimental du futur « Booster Module » du futur « Jupiter ». Pour rappel, développé dans le cadre de l’initiative EuroHPC et hébergé au centre de recherche de Jülich en Allemagne, le Jupiter doit devenir le premier supercalculateur exaflopique européen. Sa construction devait débuter en 2024 et comporter deux éléments : un « General Cluster Module » et un « Booster Module » .
Mais le retard (confirmé cette semaine) pris dans la conception du processeur européen Rhéa-1 de SiPearl, qui doit animer le « General Cluster Module », repousse désormais l’assemblage du Jupiter au plus tôt à 2025 ! Ce qui n’empêche néanmoins pas les ingénieurs d’Eviden et du JSC de Jülich de plancher d’ores et déjà sur le « Booster Module » qui est, lui, animé par les « superchips » GH200 de NVidia. « JEDI » est le nom donné au premier élément du futur « Booster Module » du futur Jupiter.
Et JEDI affiche déjà une efficacité énergétique record de 72,73 GFlops/Watt ! Celle-ci résulte de la combinaison des « superchips » de NVidia et du système de refroidissement liquide très efficace de la plateforme BullSequana XH3000 d’Atos/Eviden.

Une Europe plus éco-responsable ?

Au classement Green500, le JEDI devance l’Isambard-AI de l’université de Bristol au Royaume-Uni (68,83 GFlops/Watt) et le polonais Helios de Cyfronet (66,95 GFlops/Watt).

Pour la première fois, les trois premières places de ce classement sont donc trustées par des systèmes situés sur le Vieux Continent.

Trois autres systèmes européens figurent dans le Top 10 : le Suisse Alps-PreAlps en 5ème position (avec ses 64,38 GFlops/Watt), l’Allemand HoreKa-Teal du KIT (62,94 GFlops/Watt) et le français Adastra du GENCI fabriqué par Atos à la 9ème place (59,28 GFlops/Watt).

Difficile de ne pas voir dans cette présence une volonté globale des Européens de ne pas sacrifier l’éco-responsabilité sur l’autel de l’ultra-performance.

On notera néanmoins que l’ordinateur le plus puissant de monde, le Frontier, est lui aussi présent dans le TOP10 du Green500, en 7ème place avec ses 62,68 GFlops/Watt. Preuve que les machines les plus puissantes et les plus récentes sont aussi celles qui affichent le meilleur rapport puissance/énergie consommée.

L’ère des APU et Superchips pour HPC

Et ce n’est pas un hasard. De façon ironique, ce sont justement les machines conçues pour l’apprentissage des LLM et autres modèles gigantesques – tant décriées par les écologistes et dénoncées comme aberrations à l’ère du numérique responsable – qui sont justement les machines qui trônent en tête du palmarès.

Le TOP 10 est intégralement trusté par deux fournisseurs : NVidia et AMD. Une seule machine Intel (secondée par GPU H100 de NVidia) s’y glisse en 4ème position (Le Henri de l’américain Flatiron Institute).

Si on poursuit le classement, Intel n’équipe que 4 machines du TOP 20, AMD en anime 9, et les GPU NVidia sont présents dans 13 des 20 HPC du Top 20 du Green500.

Le TOP 20 du classement GREEN500 des HPC les plus efficients...
Le TOP 20 du classement GREEN500 des HPC les plus efficients…

Toutefois, ces derniers résultats mettent aussi en lumière l’impact considérable des processeurs hybrides de type “APU” (Accelerated Processing Unit) et “Superchip” sur la consommation électrique des systèmes HPC.

Leader de cette nouvelle génération, le très récent processeur Grace Hopper GH200 de Nvidia est en effet présent sur 7 machines du TOP 20, sur 5 machines du TOP 10 et truste surtout les 3 premières places du podium !

Pour rappel, le GH200 inaugure une nouvelle génération de processeurs HPC (dénommés Superchip chez NVidia et APU chez AMD) qui embarquent sur une seule puce à la fois un CPU et un GPU. Ainsi chaque processeur GH200 est composé de 72 cœurs ARM Neoverse v2 et d’un GPU Hopper (dérivé du H100 avec 480 Go de mémoire LPDDRX5, 8 cœurs GPC, 66 cœurs TPC).

Cette intégration poussée au sein d’un même superchip/APU permet une communication extrêmement rapide et efficace entre CPU et GPU et contribue à réduire significativement la consommation énergétique. En supprimant les goulets d’étranglement de bande passante entre CPU et GPU et en rapprochant les unités de calcul des données, ces designs hautement intégrés s’affranchissent des limites des architectures conventionnelles. La consommation électrique s’en trouve considérablement réduite à puissance équivalente.

En mars dernier, NVidia a dévoilé sa nouvelle architecture Blackwell et son nouveau superchip GB200 qui devrait afficher une efficacité énergétique jusqu’à 25 fois supérieure !

De son côté, AMD prépare sa réponse avec son APU MI300X qui embarque 3 dies de calcul totalisant 24 cœurs et pas moins de 6 accélérateurs graphiques CDNA 3, le tout relié à jusqu’à 128 Go de mémoire HBM3. Une configuration qui sera utilisée dans le supercalculateur El Capitan du Lawrence Livermore National Lab (qui sera la 3ème machine exaflopique américaine et pourrait frôler voire dépasser les 2 exaflops).

Associées à des systèmes de refroidissement liquide performants comme le Direct Liquid Cooling d’Atos, ces nouvelles « super puces » ouvrent la voie à une informatique haute performance plus durable. De quoi rendre écologiquement moins détestable non seulement la course à l’exascale mais également l’effrénée course à l’Intelligence Artificielle Générale (AGI).


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