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L’ex Health Data Hub devenu « PDS » prend enfin le cap vers un cloud SecNumCloud souverain
Par Laurent Delattre, publié le 07 juillet 2025
Après des années d’atermoiements, l’État enclenche enfin le rapatriement du Health Data Hub vers une infrastructure cloud européenne certifiée SecNumCloud, garante de la souveraineté numérique. Un appel d’offres de 6,2 M€ doit bâtir une plateforme intermédiaire dès 2026 avant la bascule complète.
Au point mort depuis des mois, la migration du Health Data Hub vers des infrastructures souveraines vient enfin de recevoir le coup de pouce permettant à ce projet devenu symbolique de se relancer.
Pour rappel, le Health Data Hub, plateforme française visant à centraliser les données de santé préalablement anonymisées, est au cœur d’une grosse polémique autour du Cloud Act américain et de la nécessaire souveraineté numérique européenne autour de données aussi fondamentales.
En 2019, faute d’alternatives techniques jugées suffisantes, le gouvernement français avait opté pour Microsoft Azure comme hébergeur. Un choix immédiatement contesté par nombre d’associations et d’hébergeurs français, mettant en avant les risques pour la confidentialité et la souveraineté.
Après que la CNIL ait exhorté le gouvernement à privilégier une entreprise régie par le droit français en 2020, le ministre de la Santé d’alors, Olivier Véran, avait promis une alternative « sous 12 à 18 mois », engagement resté lettre morte. En 2022, sa directrice Stéphanie Combes visait « l’horizon 2025 » mais là encore, l’échéance a glissé.
Le sujet s’est enlisé dans les méandres politiques et le lobbying de Microsoft avant de récemment refaire surface, alors que la loi SREN votée en 2024 impose aux opérateurs traitant des données sensibles de recourir à des prestataires garantissant la souveraineté numérique. Clara Chapaz affirmait d’ailleurs en juin dernier aux sénateurs qu’un appel d’offres avait été lancé mais non encore rendu public. Elle évoquait déjà l’idée d’une solution intermédiaire avant l’arrivée d’une nouvelle plateforme.
Réuni en comité stratégique exceptionnel, le ministère de la Santé a officiellement et publiquement lancé, le 1ᵉʳ juillet 2025, cet appel d’offres de 6,2 millions d’euros sur quatre ans pour déployer une « solution intercalaire » d’abord capable d’héberger une copie du Système national des données de santé (SNDS).
Selon les termes officiels, « respectueux des exigences de sécurité, le système d’information retenu devra notamment réaliser les prestations suivantes :
– L’ingestion, la mise à jour et la mise en qualité des données issues de la base principale du SNDS ;
– La pseudonymisation et la validation de la conformité des données en vue de leur réutilisation ;
– La réalisation d’extractions et de ciblages de données pour des projets de recherche précis, incluant si nécessaire des opérations d’appariement de données ;
– La capacité à transférer ces jeux de données vers des environnements de travail sécurisés conformément aux exigences de sécurité du SNDS ;
– La gestion des accès et habilitations, du stockage, des imports/exports de données ou de codes, avec une autonomie opérationnelle de la PDS, selon les modalités définies dans le cahier des charges.»
Dit autrement, cette « solution intercalaire » consiste à officialiser la création d’une copie des bases du SNDS sur une infrastructure cloud européenne avant que cette dernière ne devienne ultérieurement la fondation d’une nouvelle plateforme unifiée et souveraine de traitement des données de santé. Pour Clara Chappaz, ministre déléguée au Numérique, l’ouverture de ce marché constitue « une avancée décisive pour la souveraineté sanitaire et technologique ».
Contrat mixte (forfait et bons de commande), procédure avec négociation, clause environnementale : le marché sera attribué à un opérateur unique et prévoit en option le chargement d’environ 80 000 fichiers CSV dans une base Oracle de quelque 2 000 tables. L’infrastructure devra satisfaire simultanément au référentiel SecNumCloud 3.2 de l’ANSSI et au statut d’hébergeur de données de santé (HDS). Les dossiers sont attendus d’ici au 4 août 2025. Le démarrage opérationnel est programmé début 2026 pour une mise en service à l’été 2026.
Une mission d’expertise, début 2023, avait conclu que nul fournisseur souverain n’était assez mûr pour reprendre la charge du Health Data Hub (HDH) désormais renommé « Plateforme des données de santé » (PDS). Les acteurs hexagonaux affirment aujourd’hui le contraire.
OVHcloud et Cloud Temple notamment se sont très officiellement déclarés prêts à satisfaire l’ensemble des exigences fonctionnelles et réglementaires. SI on s’attend à ce qu’ils répondent rapidement à cet appel d’offres, il est aussi fort probable que Scaleway, Outscale et NumSpot se positionnent sur ce dossier (ne pas le faire serait envoyer un message assez négatif à leurs clients). La grande question finalement est de savoir si Bleu et S3NS entreront, eux aussi, dans la danse, ce qui ne manquera pas de ranimer les débats. Les conditions de participation limitent à maximum 8 le nombre d’opérateurs invités à soumissionner ou à participer.
Reste à voir si la transparence promise (transparence justement absente de la sélection originelle) dans la phase de négociation et la contrainte budgétaire suffiront à conjurer la répétition des retards.
Néanmoins, la feuille de route semble désormais enfin claire : à partir de 2026, la copie du SNDS devra évoluer dans un cloud qualifié SecNumCloud et HDS. Cette copie doit ensuite permettre dans les 3 années suivantes la mise en œuvre d’une plateforme souveraine accessible aux chercheurs afin de ne plus exposer les données de santé, certes anonymisées, des citoyen·ne·s français·es à la législation extraterritoriale américaine.
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