Course aux coûts, guerre des prix et montée de la souveraineté : le Cloud vit sa mue. Les organisations n’ont plus le choix que d’optimiser, structurer et négocier différemment pour rester maîtresses de leurs données.

Cloud

Le Cloud sous tension : coûts, souveraineté, gouvernance

Par La rédaction, publié le 27 octobre 2025

Les cartes du Cloud sont rebattues : prix volatils, règles changeantes, souveraineté incontournable. Entre contraintes et opportunités, les entreprises doivent inventer une nouvelle gouvernance numérique, plus agile et souveraine.


Par Antoine Gourévitch, Directeur associé senior, BCG,
et Gildas Bouteiller, Directeur associé, BCG.


Le Cloud demeure un enjeu aussi stratégique que complexe pour les entreprises. Les DSI doivent composer avec un environnement mouvant, marqué par l’incertitude. Elles doivent aujourd’hui faire face à trois types de pressions : une évolution incessante des politiques tarifaires, un impératif de rationalisation des coûts et, désormais, un défi réglementaire et géopolitique inédit.

En toile de fond d’abord, il y a cette bataille tarifaire mondiale qui ne faiblit pas. L’analyse pour les six premiers mois de 2025 du Nimbus Pricing Index, un indice permettant de comparer le prix des offres des trois principaux fournisseurs, révèle de nouveaux positionnements : stabilité des prix chez AWS, baisses ciblées d’Azure pour Microsoft en Asie-Pacifique, hausses modérées mais continues de Google.

Si les considérations de coûts ont toujours pesé lourd dans les choix des entreprises, un mouvement de fond rebat les cartes : la montée en puissance de la souveraineté numérique. D’ici 2028 en effet, 65 % des pays auront adopté un plan dédié selon le dernier rapport BCG. La souveraineté numérique n’est donc plus une question politique abstraite. C’est un tournant de l’usage du Cloud pour toutes les entreprises. En quelques années, le sujet s’est imposé aux gouvernements de tous les pays et la tendance est encore accentuée par les tensions géopolitiques.

Les États du monde entier structurent leur régulation à un rythme soutenu, imposant une gouvernance locale des données. Mais dans de nombreux cas, le régulateur va plus loin. La souveraineté nationale ou régionale s’étend à la souveraineté opérationnelle et technologique. Seuls les citoyens de la juridiction peuvent alors accéder aux systèmes réglementés et les ordinateurs, réseaux, flux de données et sauvegardes doivent se trouver à l’intérieur d’une zone géographique. Les règles ne cessent de se durcir. Les sanctions risquent, elles aussi, de s’alourdir.

Concrètement, les entreprises doivent choisir. Investir dans des data centers locaux ou s’appuyer sur les offres de Cloud souverain proposées par les fournisseurs. Cette solution offre tous les avantages des services du Cloud tout en aidant l’entreprise à respecter les exigences de souveraineté numérique. Les fournisseurs se structurent pour répondre aux exigences réglementaires et opérationnelles croissantes des clients. Dans la plupart des cas, les modèles de Cloud souverain intègrent différents niveaux de réponses au cadre réglementaire. Il revient alors aux organisations d’arbitrer en fonction de leurs besoins, de leur activité et de leurs moyens. Car les tarifs des clouds souverains sont de 10 à 30 % plus élevés que ceux du cloud public. Les analystes estiment que les dépenses dans ces infrastructures atteindront 169 Md$ en 2028 contre 37 Md$ en 2023.

Le concept de Cloud souverain est encore nouveau, son déploiement en cours. Mais les entreprises ne peuvent ignorer son émergence. Et les surcoûts, ajouté aux investissements déjà massifs réalisés, imposent un changement de méthode. Si la révolution Cloud a rempli ses promesses, il reste largement sous-optimisé. Son adoption à grande échelle génère aujourd’hui un gaspillage estimé à 30 % des dépenses qui lui sont consacrées, du fait d’une mauvaise maîtrise des coûts et d’une utilisation qui demeure perfectible. Cette situation est devenue critique au regard des sommes mobilisées qui représentent aujourd’hui jusqu’à 17 % des budgets informatiques. D’autant que 80 % des entreprises s’attendent à voir grandir ce ratio dans les prochaines années.

Pour entrer dans la nouvelle ère de souveraineté numérique, les entreprises devront donc non seulement absorber des surcoûts, mais surtout revoir leur manière de gérer le Cloud : structurer les usages, renforcer la gouvernance, négocier différemment avec les fournisseurs. En assainissant leurs pratiques et en anticipant les nouvelles règles, elles transformeront cette contrainte en avantage stratégique. Dans un marché où l’incertitude devient la norme, la robustesse d’une stratégie Cloud ne se mesurera plus seulement en termes de performance technique, mais aussi de résilience réglementaire.



À LIRE AUSSI :

À LIRE AUSSI :

À LIRE AUSSI :

Dans l'actualité

Verified by MonsterInsights