Nvidia investit 100 milliards de dollars dans OpenAI

Data / IA

Nvidia – OpenAI : L’accord à 100 milliards qui propulse l’IA dans une nouvelle dimension

Par Laurent Delattre, publié le 23 septembre 2025

Jamais une technologie n’aura suscité autant de chiffres vertigineux que l’IA. OpenAI s’allie à Nvidia dans un accord colossal de 100 milliards de dollars pour créer la plus puissante infrastructure mondiale d’intelligence artificielle et verrouiller la concurrence. Pourtant, derrière les exaflops et les milliards, l’avenir de l’IA se joue aussi sur le terrain humain.

Voilà bientôt trois ans que ChatGPT a vu le jour et métamorphosé à jamais la planète numérique tout en faisant entrer l’humanité dans l’ère de l’IA. Et depuis ce jour, il n’y a plus un chiffre autour d’OpenAI qui ne soit interstellaire, au-delà de ce que le commun des mortels puisse réellement concevoir. ChatGPT a acquis 100 millions d’utilisateurs en moins de deux mois, un record. Aujourd’hui, elle compte 700 millions d’utilisateurs actifs chaque semaine ! Jamais une technologie (l’IA) n’a été popularisée aussi rapidement, transformant le quotidien de chacun.

Avec OpenAI, on ne parle pas en milliard de dollars, on ne parle pas en dizaine de milliards de dollars mais en centaines de milliards de dollars. Des chiffres qui dépassent l’entendement.

Un partenariat à 100 milliards de dollars

Hier, Nvidia et OpenAI ont scellé une nouvelle alliance dans laquelle le premier va investir jusqu’à 100 milliards de dollars dans le second. Parallèlement, OpenAI s’engage à bâtir sa prochaine infrastructure d’apprentissage et inférence de l’IA d’au moins 10 gigawatts sur les technologies de Nvidia et plus précisément sur la prochaine génération de superchips « Vera Rubin ».

Les termes de l’accord restent relativement flous. Nvidia précise que ces 100 milliards seront investis progressivement au fur et à mesure qu’OpenAI déploiera chaque gigawatt de puissance à base de millions de ses puces.

« C’est le plus grand projet d’infrastructure dédié à l’intelligence artificielle de toute l’histoire », s’enthousiasme Jensen Huang, fondateur et PDG de NVIDIA, lors de l’interview. « Ce partenariat vise à construire une infrastructure capable de faire sortir l’IA des laboratoires pour l’amener dans le monde réel. »

« Aucun autre partenaire que NVIDIA n’est capable de réaliser cela à une telle échelle et avec une telle rapidité », explique de son côté Sam Altman, CEO d’OpenAI.

En 2026, l’IA va changer d’échelle

La révélation de cet accord a lieu une semaine après celui conclu entre OpenAI et Oracle d’un montant annoncé de 300 milliards sur cinq ans autour de l’hébergement et l’exploitation des charges de calcul de l’IA sur l’infrastructure Cloud d’Oracle.

Bien que dévoilés séparément, ces deux accords sont liés et forment l’ossature du fameux projet Stargate présenté en début d’année. Avec ces deux annonces, OpenAI cherche en réalité à sécuriser la fourniture des équipements et les investissements financiers qui seront essentiels à la création et l’hébergement de ses futurs modèles IA. Ces accords permettent à OpenAI à la fois de s’assurer la fourniture de la prochaine génération de puces Nvidia en million d’exemplaires dans un marché sous très haute tension et de disposer de la capacité d’hébergement et de mise en réseau à grande échelle sur les infrastructures d’Oracle Cloud.

« Construire cette infrastructure est essentiel à tout ce que nous voulons accomplir, » a déclaré Sam Altman. « C’est le carburant dont nous avons besoin pour stimuler les progrès, améliorer nos modèles, générer des revenus… pour tout. »

La première phase, qui doit être opérationnelle au second semestre 2026, reposera sur la plateforme Vera Rubin de Nvidia. Celle-ci combine en un superchip la nouvelle génération de CPU « Vera » en architecture ARM et la nouvelle génération de GPU « Rubin ». Elle doit remplacer l’actuel superchip « GB200 » qui combine les CPU « Grace » et les GPU « Blackwell » (superchip qui équipe le fameux Booster Module du HPC européen Jupiter).
Cette nouvelle plateforme est capable de délivrer huit exaflops de puissance de calcul IA par rack, avec cent téraoctets de mémoire rapide et une bande passante de 1,7 pétaoctet par seconde. Cette architecture est pensée pour des usages dits « massive-context », où les modèles doivent raisonner sur plusieurs millions de tokens simultanément, par exemple pour du codage logiciel à grande échelle ou de la génération vidéo longue durée. Elle intègre des optimisations pour l’encodage/décodage vidéo et l’inférence longue, afin de dépasser les limites des GPU actuels.

Une course hors de portée de l’Europe ?

Cette montée en puissance vise à lever l’un des principaux verrous de l’IA actuelle : l’accès à des ressources de calcul massives pour entraîner et faire fonctionner des modèles avancés, capables de raisonnement complexe, d’orchestration multiagentique, de traitement multimodal et de gestion de contextes étendus.

L’accord a de quoi inquiéter la concurrence. Les rivaux d’OpenAI, qu’ils soient éditeurs de modèles ou fournisseurs d’infrastructures, voient le standard de performance se déplacer vers des niveaux qui seront très difficiles à atteindre sans alliances de même envergure. AMD, Google DeepMind, Microsoft, Meta, Anthropic devront accélérer leurs investissements pour rester dans la course. Ils devront aussi trouver un moyen de sécuriser la fourniture d’accélérateurs IA alors que les capacités de production ne sont pas illimitées.

Pour l’Europe et pour Mistral AI, le défi commence à prendre vraiment mauvaise tournure. Comment ne pas se laisser distancer trop rapidement à la vitesse où s’enchaînent les innovations et où coulent les milliards de dollars outre-Atlantique ?

L’accord NVIDIA–OpenAI ne se limite pas à un contrat commercial. Il redéfinit les rapports de force dans l’IA, fixe un nouveau seuil technique et économique, met une pression intenable sur les startups de l’IA concurrentes et impose aux géants du numérique d’ajuster leurs stratégies.

Entre milliards et lignes rouges, l’alerte des Nations Unies

Le plus abyssal reste le fossé qui sépare le monde de la Tech du monde politique. Car au moment même où Nvidia et OpenAI officialisaient leur accord, des voix comme celle du prix Nobel Maria Ressa ou de l’auteur et philosophe Yuval Noah Harari appelaient lors de l’Assemblée générale des Nations Unies à définir des « lignes rouges » contraignantes pour encadrer les usages à haut risque de l’IA, allant des deepfakes à la surveillance de masse, en passant par les systèmes autonomes d’armement. Une prise de parole assortie d’une pétition portée par plus de 200 personnalités et 70 organisations réclamant un accord international d’ici 2026 afin de bannir ces dérives. L’enjeu, rappellent les signataires, est d’éviter que l’IA ne dépasse le contrôle humain et ne devienne une menace pour la démocratie, la sécurité et les droits fondamentaux. Comme le résume Yuval Noah Harari, « l’IA est la première technologie capable de prendre des décisions par elle-même, d’inventer de nouvelles idées par elle-même et d’échapper à notre contrôle ».

Ainsi, au-delà des chiffres vertigineux et des architectures titanesques, derrière chaque exaflop, chaque gigawatt, une question fondamentalement humaine émerge : que voulons-nous que ces machines fassent pour nous, et non à notre place ? Plus que jamais, c’est aujourd’hui aux DSI d’éclairer cette question. Comme l’évoquait Thomas Chejfec dans sa dernière chronique (Game Over pour les DSI), ils sont à la croisée des chemins : architectes de la performance mais aussi gardiens du sens à l’ère numérique. Leur rôle ne se limite plus à intégrer la prochaine génération d’IA mais à l’inscrire l’IA dans une trajectoire qui respecte la dignité, la liberté et la créativité humaines. Il y a un changement d’échelle à la hauteur des milliards de dollars qui déferlent sur OpenAI. Au-delà des règlementations à venir, ce sera bien au DSI de faire en sorte que la puissance informatique serve le progrès, et que le progrès serve l’humain. Dit autrement de s’assurer que, dans la course à l’IA, la vraie avance ne se mesure pas en téraflops… mais en valeurs.



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