McKinsey estime que les entreprises européennes sont encore loin de savoir tirer la valeur du Cloud

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L’Europe sous exploite le potentiel du Cloud selon McKinsey

Par Laurent Delattre, publié le 18 avril 2024

En dépit d’une adoption massive du cloud en Europe, le rapport « State of Cloud in Europe 2024 » de McKinsey révèle que les entreprises européennes peinent encore à maximiser la valeur du cloud. Trop focalisées sur les gains IT, les entreprises européennes négligent l’exploitation stratégique du Cloud pour stimuler leur croissance et l’innovation.

En plein conflit européen autour de l’EUCS et alors que le risque n’a jamais été aussi grand de voir purement et simplement disparaître notre SecNumCloud et son soutien à l’économie cloud européenne, McKinsey sort son rapport 2024 sur l’état du Cloud en Europe. Avec à la clé un constat : les entreprises européennes ne savent pas encore comment en tirer toute la valeur pour leur business.

Sur le papier, l’Europe a massivement adopté le cloud. Selon McKinsey, 95% des entreprises européennes interrogées capturent déjà de la valeur grâce au Cloud et plus d’une entreprise sur trois a l’intention de mettre dans le cloud plus de la moitié de ses workloads.
Plus de 90 % des entreprises européennes considèrent leurs programmes Cloud comme une priorité et plus d’un tiers d’entre elles discutent régulièrement des progrès accomplis au niveau du comité exécutif.
Plus des deux tiers des entreprises interrogées affirment disposer d’ores et déjà d’une solide « fondation Cloud » (avec plus de 20% des workloads de production hébergés dans le cloud).
Enfin, 75% des entreprises européennes affirment avoir réalisé des économies IT grâce au cloud ou constatent des améliorations dans leur productivité. Et 55% des entreprises se disent satisfaites de leurs investissements Cloud contre seulement 13% qui considèrent leurs retours sur investissement du cloud comme insuffisants.

McKinsey note une forte disparité dans le niveau de migration des Workloads vers le Cloud entre les entreprises européennes. Mais, au final, plus de 65% des entreprises ont déjà placés plus de 20% de leurs Workloads dans le Cloud.

Pourtant le paysage au final dépeint par McKinsey est bien moins lumineux que ces chiffres ne le laissent croire. Toute la conclusion des analystes tient en une phrase : « La grande majorité de la valeur du Cloud capturée par les entreprises demeure dans des poches isolées et à petite échelle ».

Ainsi, selon McKinsey, trop d’entreprises européennes regarderaient encore le Cloud par le seul prisme de l’IT plutôt que celui du Business. Il serait temps pour elles, désormais, de « voir plus grand ». En un mot, il est temps d’adopter le cloud pour innover, pas seulement pour économiser. Certes, McKinsey reconnaît que partout dans le monde les entreprises peinent encore à pleinement mesurer la valeur du Cloud. Mais l’Europe serait plus en retard encore.

Une approche Cloud encore beaucoup trop IT

Pour McKinsey, « jusqu’à 3 000 milliards de dollars d’opportunités Business sont à saisir pour les entreprises du Forbes Global 2000 qui vont au-delà de la simple adoption du cloud et s’aventurent dans l’innovation et la création de nouveaux produits et services. La capacité à tirer parti des nouvelles technologies, en particulier de l’IA générative (gen AI), dépendra de la manière dont les entreprises pourront établir et mettre à l’échelle leurs programmes Clouds. Il n’est pas exagéré de dire que les ambitions de croissance de l’Europe dépendront de sa réussite dans le domaine du Cloud ».

Le problème pour McKinsey, c’est que 71% des entreprises mesurent l’impact du cloud par le seul prisme des améliorations opérationnelles IT. 66% des entreprises s’intéressent aussi aux réductions des coûts IT engendrés. Mais elles ne sont environ que 30% à mesurer les gains « non-IT », comme les gains réalisés sur le fonctionnement des métiers ou la génération de nouveaux revenus rendus possibles par un passage à l’échelle du cloud.


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Vers un cloud générateur de valeur

Mais de quel cloud ? McKinsey se garde bien de le préciser. L’étude reste très vague sur les partenaires choisis et les critères utilisés pour les choisir.

Elle préfère se focaliser sur la quête de valeur sans tenir compte de la destination d’une partie de cette valeur.

Et les rapporteurs de suggérer 5 priorités stratégiques pour faire du Cloud un générateur de valeur :

1/ Des partenariats stratégiques avec les fournisseurs de Cloud

McKinsey recommande aux entreprises européennes de développer des partenariats stratégiques avec les fournisseurs de services cloud (CSP) pour aller au-delà des relations fournisseurs traditionnelles et capturer de la valeur ajoutée, construire des capacités et accélérer les transformations. Ces partenariats devraient être structurés autour de quatre dimensions clés : nouvelles opportunités Business, financement de la migration, renforcement des capacités et modèle opératoire. Les contrats doivent être structurés de manière à ce que les CSP et les SI aient des incitations à long terme pour fournir des résultats de qualité et un code facile à entretenir. Et pour étayer son histoire, McKinsey donne l’exemple d’un grand groupe multinational européen qui a noué un partenariat stratégique avec un CSP pour accélérer la migration vers le cloud et créer une usine numérique de plus de 100 personnes. Cette collaboration a permis de réduire les effectifs de 20 %, de réaliser des économies de coûts de plus de 20 millions d’euros par an et d’accélérer le développement, générant ainsi une valeur ajoutée de plusieurs millions d’euros.

2/ Moderniser la façon de travailler

Pour tirer parti des capacités du cloud, les entreprises doivent moderniser leur façon de travailler en se concentrant sur trois éléments clés : la valeur commerciale, le travail en petites équipes cross-fonctionnelles pour avancer rapidement, et la construction de fondations solides.

3/ Adopter une approche FinOps

Pour McKinsey, il est fondamental d’investir dès le départ dans des outils FinOps de gestion des dépenses et d’intégrer cette approche directement dans les pratiques d’ingénierie, plutôt que de la traiter comme une activité séparée administrée par une équipe distincte. Ce qui impose un changement de culture au sein des équipes d’ingénierie.

4/ Savoir faire les bons compromis ROI

Pour McKinsey, il faut arrêter de se focaliser sur le nombre de workloads dans le Cloud et évaluer le ROI d’une montée en puissance dans le Cloud. Sans perdre de vue que les points d’équilibre du ROI varient selon les cas et doivent être évalués individuellement. « Une entreprise pharmaceutique a constaté que 40 % d’adoption étaient nécessaires pour un ROI positif sur huit ans, tandis qu’une banque d’Europe du Sud a obtenu des avantages significatifs avec moins de 20 % de charges de travail sur le cloud grâce à des pratiques d’ingénierie Cloud natives et à des partenariats forts ».

5/ Gérer l’évolution rapide de l’environnement réglementaire en s’appuyant sur les CSP

En perpétuelle évolution, les réglementations concernant les nouvelles technologies telles que le cloud ou l’IA générative mettent à rude épreuve les processus existants. Les fournisseurs de services cloud (CSP) ont souvent des capacités dédiées et avancées dans ce domaine et peuvent fournir conseils, expérience et bonnes pratiques. D’où l’importance de mettre en place une collaboration entre les experts conformité du CSP et ceux de l’entreprise.

Au final, on regrettera quand même que ce rapport ne s’intéresse pas davantage aux enjeux européens des fournisseurs de cloud et de l’importance que les DSI accordent au choix de partenaires clouds purement européens. En pleine crise EUCS, l’éclairage aurait été pertinent et intéressant.
En attendant, le rapport McKinsey invite en réalité les entreprises européennes à moins percevoir le cloud comme une opportunité technologique et bien davantage comme une opportunité Business à même d’engranger davantage de valeur dans un monde qui doit apprendre à conjuguer adoption de l’IA générative, renforcement de la cyber-résilience et optimisation des coûts.

Pour en savoir plus : The state of cloud computing in Europe | McKinsey


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